« Mort est le roy ! Vive le roy ! » . Cet adage, qui fut le slogan scandé par les foules lors des funérailles des rois de France et accompagnant généralement sa dépouille jusqu'à Saint-Denis, nous invite à penser que la fonction royale est d'une certaine manière immortelle. Preuve en est, la coutume voulait que les Présidents du Parlement de Paris gardent leur robe rouge vif, se distinguant ainsi du reste du cortège funéraire car ne portant pas le deuil de leur souverain. Ils étaient, dixit un témoin des funérailles de François Ier, « exempt de porter le deuil car la Couronne et la Justice ne meurent jamais ». Ainsi, la fonction royale semble transcender le corps de chair de son occupant.
L'historien allemand Ernst Kantorowicz souligna dans son ouvrage Les Deux Corps du Roi cette dualité du corps du souverain. Cette fiction politique, mais aussi juridique, va permettre l'instauration de règles relatives à la dévolution royale. Ces dernières ont permis l'instauration du principe d'inaliénabilité du royaume. On peut dès lors se demander en quoi ce « mythe politique » contribue-t-il à écarter le domaine royal de toute aliénation ?
[...] La couronne est dévolue au Roi selon des conditions particulières. Mais celui-ci peut-il compromettre par ses actes le domaine d'une Couronne dont la transmission est justement régie par un statut coutumier indépendant de sa volonté ? II/ Incidences sur l'inaliénabilité du domaine royal : vers une dépatrimonialisation du pouvoir Conjointement à la consécration de l'instantanéité de la dévolution royale, se met en marche en France le processus de réunification du royaume pour mettre fin au morcellement féodal. Ce processus a débuté lors du règne de Louis VI, puis fut relancé par Philippe Auguste, et ce, jusqu'à la fin du siècle. [...]
[...] La fiction des Deux Corps du Roi, en plus de consacrer l'instantanéité de la succession royale, dénie tout caractère patrimonial au pouvoir du souverain. Bibliographie BOUREAU Alain, Le simple corps du roi, Les Éditions de Paris, Paris GUILLOT Olivier, RIGAUDIÈRE Albert, SASSIER Yves, Pouvoirs et institutions dans la France médiévale, tome Armand Colin, Paris KANTOROWICZ Ernst, Les Deux Corps du Roi, Gallimard, Paris (trad.). PICQ Jean, Histoire et droit des Etats, Les Presses de Sciences Po, Paris Formulée en tant que telle en 1515 lors de l'inhumation de Louis XII à Saint-Denis Maitland Ordonnances de et 1407 Les fiefs par exemple ne font pas partie du domaine puisqu'un seigneur y exerce son pouvoir. [...]
[...] Ainsi, du domaine éminent qu'était celui dont le roi tirait des revenus, on est passé à un domaine royal public dont la sauvegarde échoit à la dignitas royale qui transcende le corps du souverain. Néanmoins, on parle dès le milieu du XIII° siècle de domaine public bien plus grâce à la fiction du corpus mysticum regis qui a trait à une certaine continuité du pouvoir et une symbolique de l'Etat, qu'à la nature des biens dits publics. Ainsi, dès 1343, on parle de domaine de la couronne de France Le principe d'inaliénabilité trouve ses origines dans le droit canon et les énoncés pontificaux. [...]
[...] Fiction politique des Deux Corps du Roi dévolution royale et inaliénabilité du domaine royal de France aux XIV° et siècles Mort est le roy ! Vive le roy ! Cet adage, qui fut le slogan scandé par les foules lors des funérailles des rois de France et accompagnant généralement sa dépouille jusqu'à Saint-Denis, nous invite à penser que la fonction royale est d'une certaine manière immortelle. Preuve en est, la coutume voulait que les Présidents du Parlement de Paris gardent leur robe rouge vif, se distinguant ainsi du reste du cortège funéraire car ne portant pas le deuil de leur souverain. [...]
[...] La genèse de la doctrine juridique des Deux Corps du Roi et les règles de succession royale Les origines de cette fiction politique sont multiples. Tout au long du XII° siècle, puis lors du concile de Latran en 1215, la théorie bicorporelle du Christ est consacrée. Le dogme de transsubstantiation ainsi établi met fin à de longues querelles théologiques et précise que le Christ a deux corps : l'Eucharistie, étant le corpus verum Christi, et l'Eglise en tant qu'institution, corps politique, étant le corpus mysticum Christi. [...]
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