L'historien Arno Mayer considère, dans son ouvrage La persistance de l'Ancien Régime, qu'en 1914, « l'Europe est non seulement agraire et nobiliaire mais aussi monarchique. (…) Les éléments féodaux ont conservé une prépondérance écrasante au sein des régimes européens ». Cette affirmation va à contre-courant de l'historiographie moderne qui voyait les traces de l'Ancien Régime comme quasiment disparues à l'aube de la Première Guerre mondiale, en 1914.
L'Europe de 1914 est le résultat d'un long cheminement politique qui dure tout au long du XIXe siècle. Celui-ci est caractérisé par une instabilité chronique des régimes politiques et des ensembles géographiques; le mouvement libéral se répand en effet de plus en plus, provoquant des guerres et des révolutions qui remodèlent progressivement la carte de l'Europe jusqu'à lui donner une certaine stabilité au début du XXe siècle. l'Europe s'étend alors du Royaume-Uni à la Russie en passant par le récent empire d'Allemagne, la France ou encore l'Autriche-Hongrie. Ce mouvement libéral aboutit à des revendications de type démocratiques. Par démocratie, on entend une démocratie de type politique, c'est-à-dire une réelle souveraineté populaire qui exclut l'existence d'une classe dirigeante aristocratique illégitime, et une démocratie de type sociale, comme l'explique Alexis de Tocqueville dans son œuvre De la démocratie en Amérique, une société qui tend délibérément vers l'égalité des conditions. La démocratie implique donc concrètement un parlementarisme représentatif de la population, un suffrage universel, des politiques sociales d'aide aux classes les plus démunies, une liberté de l'information, un accès universel à l'instruction… L'Europe, et en particulier l'Europe du Nord Ouest, est en 1914 le symbole de ces avancées sociales et politiques, appuyées par une révolution industrielle en pleine expansion qui lui assure une domination économique considérable, que seuls les Etats-Unis sont en mesure de contester. Les progrès institutionnels démocratiques effectués par la libéralisation des différents régimes européens sont en effet globalement considérables mais connaissent un retard dans certains États tels que l'Empire d'Allemagne ou la Russie. Les progrès sociaux, quant à eux, ne sont pas autant prononcés que les précédents mais cependant bien présents dans certains États où une volonté claire de promotion des classes les moins fortunées est présente. Ainsi, il est légitime de se demander si l'évolution politique et sociale constatée tout au long du 19e siècle permet-elle caractériser l'Europe de démocratique en 1914.
L'Europe de 1914 connaît indéniablement un formidable essor de la démocratie libérale, autant sur le plan politique que social. Cependant, ce progrès n'est généralisé et les persistances de l'absolutisme d'Ancien Régime subsistent de diverses manières dans les États européens.
[...] La démocratisation en Europe à l'aube de la Première Guerre mondiale L'historien Arno Mayer considère, dans son ouvrage La persistance de l'Ancien Régime, qu'en 1914, l'Europe est non seulement agraire et nobiliaire mais aussi monarchique. ( ) Les éléments féodaux ont conservé une prépondérance écrasante au sein des régimes européens Cette affirmation va à contre-courant de l'historiographie moderne qui voyait les traces de l'Ancien Régime comme quasiment disparues à l'aube de la Première Guerre mondiale, en 1914. L'Europe de 1914 est le résultat d'un long cheminement politique qui dure tout au long du XIXe siècle. [...]
[...] La Confédération Générale du Travail (CGT) voit le jour en 1895. L'aspect de lutte et d'indépendance de la vie politique des syndicats est consacré par la Charte d'Amiens en 1906. Des mouvements se réclamant du socialisme voire de l'internationalisme de développent partout en Europe ( En Allemagne, le SPD, le parti social-démocrate, est en 1912 le premier parti allemand avec 52% des votes en sa faveur. ( En Italie, le parti socialiste élit 59 députés à sa chambre basse en 1913. [...]
[...] La démocratisation de l'Europe est en effet rendue partiellement possible par l'instauration d'un parlementarisme. Cependant, celui-ci ne peut être démocratique s'il est réellement représentatif de la population. Ainsi, l'Europe de 1914 connaît une généralisation progressive mais globale du suffrage universel. B. Le suffrage universel est généralisé Tout d'abord, bien que l'extension considérable du suffrage soit une avancée conséquente dans la démocratisation de l'Europe, celui-ci est à nuancer par son caractère discriminant : il ne concerne que la population masculine L'extension globalisée du suffrage Le suffrage universel masculin est progressivement adopté par les États européens jusqu'à s'imposer pratiquement entièrement en Europe en 1914 ( En France, la première élection du président de la République au suffrage universel des hommes de plus de 21 ans s'effectue dès 1848 et entraîne Napoléon III à la tête du pays, suivi trois années plus tard par le rétablissement de l'Empire. [...]
[...] En Allemagne, entre 1870 et 1914, la carte des circonscriptions reste inchangée. Or, la population est passée de 40 à 65 millions. Les forces conservatrices s'opposent fortement à une modification de la carte électorale. Ainsi, un État tel que le Waldeck qui comporte électeurs a le droit à un député selon le principe fédéral. Cependant, Berlin, qui comporte 1 million d'électeurs n'en a que soit un député pour électeurs : un électeur du Waldeck compte 12,5 fois un électeur de Berlin. [...]
[...] L'entrée de l'Europe dans une guerre sans précédent en 1914 est analysée par l'historien Arno Mayer dans son ouvrage La persistance de l'Ancien Régime comme un moyen de venir à bout de ces archaïsmes structurels dont l'Europe ne parvient toujours pas à se défaire, plus d'un siècle après la Révolution française. De plus, ce dernier prétend aussi que la Première Guerre mondiale ne parviendra pas à bout des persistances de l'Ancien Régime et que cette victoire ne sera effective qu'après la Seconde Guerre mondiale. [...]
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