Dans son introduction, Philippe Schmitter constate que, sur un plan mondial, on a observé un « tsunami politique », une vague de démocratisation politique qui a touché l'ensemble de la planète, à l'exception de ce qu'il appelle « deux îlots » de résistance : le Moyen-Orient et l'Asie du Sud-Est. Ce tsunami politique a vu le développement graduel de deux proto-sciences : la transitologie et la consolidologie. Ces sous-disciplines embryonnaires de la science politique comparative ont pour revendication d'appliquer un ensemble de considérations, concepts et hypothèses universalistes afin de « baliser la voie royale » menant d'un régime autoritaire vers un régime démocratique. Ce faisant, le but de cet article est de se demander si, munis de leur trousse à outils conceptuelle, les transitologues et les consolidologues peuvent voyager en toute sécurité dans les pays du Moyen- Orient et de l'Afrique du Nord. Peuvent-ils comprendre le monde musulman sous l'angle de leurs concepts et hypothèses universalistes ?
[...] Ces sous-disciplines embryonnaires de la science politique comparative ont pour revendication d'appliquer un ensemble de considérations, concepts et hypothèses universalistes afin de baliser la voie royale menant d'un régime autoritaire vers un régime démocratique. Ce faisant, le but de cet article est de se demander si, munis de leur trousse à outils conceptuelle, les transitologues et les consolidologues peuvent voyager en toute sécurité dans les pays du Moyen- Orient et de l'Afrique du Nord. Peuvent-ils comprendre le monde musulman sous l'angle de leurs concepts et hypothèses universalistes ? [...]
[...] Pour lui, il faut se méfier de l'essentialisme qui voudrait que l'émergence de la démocratie soit liée à une compatibilité prédéterminée Degré et étendue de l'effondrement du régime précédent En analysant les processus de transition démocratique en Amérique latine et en Europe du Sud, Philippe Schmitter a observé que cette transition s'est souvent amorcée sous l'égide de l'ancien régime qui a lui-même introduit la libéralisation (comme ce fut le cas en Espagne, au Brésil Pour lui, les rares transitions déjà amorcées au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ont pris à cette image la forme de transitions imposées (il cite l'Egypte, la Jordanie, le Koweït, le Maroc et la Tunisie). Cette libéralisation amorcée par les anciens régimes est l'objet d'un calcul visant à prévenir d'éventuelles aspirations démocratiques perçues par ces régimes autoritaires. Ce même phénomène était également perceptible en Amérique latine mais les détenteurs du pouvoir ont par la suite été dépassés par les demandes de plus en plus nombreuses de la population pour la poursuite des réformes. [...]
[...] Toutefois, il ne répond pas lui-même à la question est-ce que cette aire est perméable à la démocratie ? : s'il nous démontre qu'il n'y a pas de prédéterminisme, il laisse ouverte l'analyse des leviers de la transition démocratique au Moyen-Orient et en Afrique du Sud. On peut également reprendre la critique de Michel Camau : transitologues et consolidologues ont une vision linéaire de l'Histoire ; ils considèrent que les régimes autoritaires sont forcément transitoires dans le sens où ils sont voués à disparaitre pour laisser place à l'avènement de la démocratie, considérée comme meilleur régime possible. [...]
[...] Enfin, transitologues et consolidologues savent qu'il est possible d'évoluer d'un régime autoritaire à des types de démocraties sans obligatoirement respecter les pré-conditions autrefois considérés par les politistes comme indispensables. Ainsi, la transition est possible : sans recourir à une phase de violence et à l'élimination physique d'une frange de la population, sans forcément voir l'apparition d'une mobilisation populaire prolongée, sans par ailleurs avoir atteint un niveau de développement économique élevé, ni même entrainer une redistribution plus égalitaire des richesses, sans l'existence à priori d'une bourgeoisie nationale, sans culture civique préexistante ou encore sans la présence inéluctable et fondatrice de nombreux démocrates. [...]
[...] Une fois fait ce bref panorama, l'auteur résume son travail sur la démocratisation à travers une douzaine de réflexions génériques qu'il appelle leçons à ses yeux pertinents pour comprendre les résultats de toute tentative de transition et de consolidation démocratique. Nous reprendrons ici les 12 leçons, en en faisant un bref résumé : 1. Tout d'abord, la transition vers un régime démocratique, tout comme la consolidation de celui-ci, n'est pas inéluctable ou irréversible La consolidation d'un régime démocratique n'est qu'une résultante possible de la transition d'un régime vers un autre : il n'y a pas de déterminisme mais plusieurs voies possibles Il n'y a pas une voie unique de consolidation mais autant de voies que de types de démocratie : chaque démocratie et chaque société adopteront leur forme et leur rythme bien particulier Dans ce moment précis de l'Histoire, la démocratie est la seule forme légitime de domination : c'est un constat et un postulat des théories de la transitologie et de la consolidologie. [...]
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