La démocratie ne se définit pas seulement au niveau électoral ni même constitutionnel, mais a aussi un caractère substantiel. L'existence d'une vie démocratique authentique passe par le respect de conditions démocratiques effectives au niveau institutionnel. La démocratisation de l'Etat apparaît donc comme un objectif à atteindre dans le cadre de sa réforme.
À l'aune de ces problématiques actuelles, un regard historique sur les réformes de l'Etat intervenues en Amérique Latine depuis la deuxième moitié du XXe siècle, permis par la lecture des articles sélectionnés, permet pourtant de mettre en avant les héritages issus des réformes menées par les régimes militaires, en particulier dans le cas de la décentralisation. Paradoxalement, certaines de ces réformes ont ensuite joué dans les transitions démocratiques entre 1979 et 1991.
Le regard porté dans ces articles, sur les réformes de l'Etat menées en Amérique Latine sous les dictatures militaires puis au cours de la transition démocratique amène, entre autres, à s'interroger sur le lien entre démocratie et réforme de l'Etat, à considérer l'aspect graduel et progressif de certaines réformes et à prendre en compte les jeux complexes d'acteurs impliqués dans ces réformes.
Enfin, un autre point abordé dans ces textes est celui du rapport existant entre bureaucratie et coutume dans le cadre de la réforme de l'Etat. Au-delà des problèmes liés à l'état de la démocratie en Amérique Latine, ce sont bien les liens entre les différentes réformes mises en place et les spécificités institutionnelles, politiques, sociales, en bref l'identité même de l'Amérique Latine, qui sont questionnés dans ces articles.
[...] Le rapport s'intéresse donc successivement aux décentralisations ayant eu lieu au Brésil, au Mexique, en Argentine, au Venezuela et au Guatemala. Dans aucun de ces pays, la décentralisation est un phénomène nouveau. Les structures mêmes du régime colonial espagnol ou portugais avaient laissé de larges pouvoirs à des institutions locales, auxquels a répondu plus tard la figure traditionnelle du caudillo Cependant, le vaste mouvement de recentralisation opéré au cours du XXe siècle a abouti à une forme de renaissance de la décentralisation. [...]
[...] Pour tenter de comprendre la raison de cette singularité argentine, l'auteur se livre donc à une comparaison entre les processus de décentralisation en Colombie (où les progrès formels de la décentralisation ont été les plus forts, et où l'équilibre des pouvoirs a le plus évolué), et l'Argentine. Il apparaît en réalité que le processus de décentralisation est avant tout lié à la naissance et l'expression d'intérêts locaux particuliers. En effet, face à l'agencification précédente des politiques de développement locale, et à son inefficacité chronique, nombre de grèves et de protestations civiques ont eu lieu. A l'inefficacité des politiques gouvernementales s'est progressivement ajoutée la demande de gouvernements locaux efficaces et représentatifs (ils étaient auparavant désignés). [...]
[...] Si l'existence d'espaces politiques indépendants au niveau local était considérée comme un problème par le pouvoir militaire central, qui a rapidement décidé de démettre les responsables politiques infrarégionaux, cette nouvelle centralisation apparaît en fait comme une condition nécessaire à de nombreuses décisions postérieures accroissant les pouvoirs des gouvernements locaux. La décision de démettre ces autorités locales répondait d'ailleurs à des objectifs nationaux différents. Au Chili, les municipalités étaient considérées comme un espace de contestation politique important malgré leurs faibles pouvoirs. [...]
[...] Le point de départ des processus de décentralisation étudiés ajoute aux préférences des acteurs nationaux et locaux les caractéristiques institutionnelles des différents régimes. Sans revenir sur le cas argentin, on constate que le Brésil se caractérise par le maintien de certaines formes de politique représentative et d'autorité civile. Afin de bénéficier d'un soutien politique, les militaires, après avoir démis de leurs fonctions les gouverneurs précédents, ont cherché à changer les règles du jeu pour bénéficier d'un soutien électoral et politique. [...]
[...] L'émergence de nouveaux acteurs de poids peut avoir un impact négatif, en provoquant de nouveaux conflits d'intérêts compris entre les institutions infranationales elles-mêmes), mais aussi assurer une plus grande efficacité des politiques publiques, réalisées au plus près des citoyens, permettant ainsi à l'Etat de se concentrer sur ses tâches les plus essentielles, gagnant en efficacité. Telle qu'elle est présentée par Tulia Falleti, la décentralisation est un processus, réalisé par étapes graduelles et progressives, auquel l'Etat est associé à chaque instant. Il est d'ailleurs le seul à pouvoir permettre juridiquement la décentralisation (la plupart du temps par une modification de la Constitution). Quelle place pour les spécificités latino-américaines ? Les articles analysés rendent tous compte, en particulier dans leur introduction, d'un phénomène mondial de décentralisation. [...]
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