La sixième partie de l'ouvrage collectif intitulé Les agriculteurs et la politique est consacrée à l'étude du comportement politique des agriculteurs et analyse la question de la spécificité de ce groupe social dans sa relation au politique. Cette étude complète se concentre sur le cas des agriculteurs français sur une période allant des années 1960 à la fin des années 1980. Elle permet de dresser un état des lieux après deux décennies d'évolutions profondes de la condition rurale. Le mouvement vers une agriculture productiviste liée à l'introduction de l'économie de marché dans le domaine agricole après la Deuxième Guerre Mondiale a en effet largement contribué à modifier la nature du travail des agriculteurs ainsi que leurs représentations.
L'introduction de Marcel Jollivet s'intitule : que reste-t-il des paysans ? le changement sémantique du terme de paysan au terme d'agriculteur témoignant de l'évolution de la profession. La question relative à la spécificité de ce groupe s'inscrit dans un débat plus large sur les conséquences de cette évolution, le monde rural étant de plus en plus confronté aux mêmes transformations économiques, sociales et politiques que le reste de la société. L'ouvrage questionne donc la thèse selon laquelle les transformations à l'œuvre dans le monde agricole contribueraient à réduire les différences entre ce groupe social et le reste de la société. Il montre surtout la complexité et la multiplicité des facteurs qui influencent les comportements politiques dans le monde agricole.
[...] Ainsi, l'auteur définit l'identité comme la stratégie qui utilise parmi les symboles et les normes disponibles ceux qu'un groupe croit aptes à lui procurer le meilleur avantage dans les contraintes fixées par l'ordre social Il est intéressant de mettre en perspective ce constat d'une grande diversité des acteurs du monde agricole et de leurs représentations avec les moyens de mobilisation de cet électorat par les organisations politiques, qui insistent en général sur la fibre identitaire particulière de ce groupe social. L'identité paysanne apparaît ici comme un construit. Frédéric Zalewski[3] montre, dans le contexte de la Pologne au cours de sa transition démocratique, le travail de construction et de réappropriation de l'identité paysanne opéré par le PSL ou parti paysan polonais actuel. [...]
[...] Jean Vigreux Le Parti communiste français à la campagne, 1920- 1964. Ruralia, 1998-03, http://ruralia.revues.org/document55.html. Consulté le 1er mars 2008. Duclos, Nathalie, Un nouveau radicalisme agraire ? Critique internationale, nº31- 2006/2 Frédéric Zalewski, Démobilisation et politisation de la paysannerie en Pologne depuis 1989 Critique internationale, nº31- 2006/2 Nancy Andrew, Wilbert Samboda, Zimbabwe : la soif de terres aux origines du mouvement des anciens combattants Critique internationale, nº31- 2006/2 [9]Frédéric Zalewski, Partis politiques et changement de régime en Pologne : mobilisations autour de la restauration du parti paysan polonais PSL , Ruralia, Vol 54 2004/6 Reginaldo C. [...]
[...] Ce sont donc les thèmes de l'identité, de la spécificité de la profession et de la part de la dimension professionnelle dans les comportements politiques qui sont évoqués, mais également les répertoires d'action, la sociabilité politique et les moyens de mobilisations des agriculteurs. En toile de fond réside la question de la capacité et de la légitimité des paysans à participer à la vie politique. Face à cette analyse précise du contexte français à une période donnée, plusieurs articles viennent enrichir l'analyse en s'inscrivant sur des territoires ou des époques différents. Une identité propre La question d'une identité paysanne est largement évoquée dans Les agriculteurs et la politique. [...]
[...] Lynch montre que le parti socialiste tente de plaquer des structures urbaines sur le monde paysan. Il remarque que les socialistes s'appuient en majorité sur des éléments extérieurs à la paysannerie, tels les petits fonctionnaires ou les artisans ruraux. De plus, les structures militantes paraissent inadaptées au vu des modes de sociabilité différents, la sociabilité informelle est privilégiée dans les campagnes, et elle s'exerce particulièrement dans les cafés, où il est possible d'échapper à l'opinion publique villageoise et aux notables. [...]
[...] Un monde résolument à part ? Il est spécifié dès l'introduction de l'ouvrage que la catégorie des agriculteurs paraît souvent rebelle aux modes d'analyse classiques des comportements politiques, qu'il s'agisse du marxisme ou des schémas classificatoires des sociétés industrielles. Ceci se reflète dans les articles de Vigreux et de Lynch, qui montrent la constante adaptation de leur idéologie à ce public dont on ne sait pas où il est censé se situer dans le processus révolutionnaire. Et quand bien même les paysans se convertiraient à ces idéologies réputées urbaines, l'analyse n'en est que plus complexe : en effet, comment expliquer qu'un monde paysan, a priori isolé à l'intérieur d'un système économique archaïque, ait accepté la modernité, c'est-à-dire les idées républicaines apportées par la ville et les couches bourgeoises ? [...]
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