histoire économique, afrique, mode de production, mode de production asiatique, lignes d'évolution, afrique noire, Cissé, Dubois, Blyden, capitalisme rénové
Dans son ouvrage Histoire économique de l'Afrique noire, publié en 1988, Daniel Amara Cissé souhaite démontrer que l'histoire économique africaine répond à une évolution qui lui est propre. Le chapitre commenté ici instaure une analyse plus technique sur le pourquoi du sous-développement de l'Afrique, dont la recherche d'un mode de production typique et de ses conséquences constitue un volet spécifique déterminant.
Il convient de se demander alors en quoi l'histoire économique africaine est complexe et ne peut être enfermée dans une vision occidentalo-centrée erronée ?
Ainsi, pour l'auteur, la colonisation a permis à certains de devenir de véritables précurseurs du discours nationaliste et panafricaniste d'aujourd'hui. Edward Wilmot Blyden ou William Edward Burghardt Dubois sont des intellectuels anglophones du 19ème siècle qui apparaissent comme à l'origine des idéologies africaines modernes.
Blyden est l'un des premiers à avoir promu, avec tant de fougue, la race noire. Pour lui, si tous les hommes sont égaux, il faut néanmoins protéger cette race noire des influences étrangères, comme le christianisme, devenu l'apanage (inévitable) des blancs selon lui. Outre l'Islam et le paganisme, le secret de l'unité de cette race se trouve dans un nouveau système d'éducation qui privilégierait des textes plus anciens, ceci afin d'exclure une culture européenne aliénante. C'est ainsi qu'il prône une véritable solidarité entre les Noirs, solidarité réaffirmée également par Dubois. Pour ce dernier, les Noirs sont liés entre eux du fait du colonialisme qui les met devant le fait accompli et qui les empêche de détourner les yeux.
Cissé s'inscrit, lui, dans une démarche qui, malgré son histoire personnelle, étonne par son objectivité...
[...] Pour terminer, si cette critique peut sembler virulente en apparence, elle n'enlève néanmoins en rien le mérite de l'auteur à fournir un large éventail d'explications, de raisons internes et externes, pour cerner la spécificité économique africaine. Bibliographie : Daniel Amara Cissé, « Chapitre II : lignes d'évolution caractéristiques de l'histoire économique africaine », In Histoire économique de l'Afrique noire, L'Harmattan Samir Amin, L'échange inégal, Maspero Mbog Bassong, Les fondements de l'état de droit en Afrique précoloniale, L'Harmattan, Paris Walter Rodney, Et l'Europe sous-développa l'Afrique , Editions Caribéennes, Paris, 1986. [...]
[...] Ainsi, en ce qui concerne la recherche d'un mode de production esclavagiste en Afrique, l'auteur argue, certes, de l'arrivée tardive de la traite comme source de profits considérables mais aussi de la dénomination et du rôle particulier de ces esclaves. En effet, selon lui, les captifs ou les prisonniers n'étaient pas considérés comme étant de simples marchandises à échanger ou vendre. Ceci est mis en valeur, notamment, par l'acquisition possible de droits pour ces derniers, comme l'accession au titre de chef dans des armées, la possibilité d'enfanter une femme libre ou encore de devenir membre à part entière d'une famille. [...]
[...] Il en est de même, dans le second temps, en ce qui concerne « le passage des formes de sociétés sans classe aux formes sociales de luttes de classes ». En effet, c'est par la capacité de certains à contrôler le commerce que née une certaine division du travail de laquelle découle l'apparition de classes. Mais ce schéma, selon Cissé, semble différer du modèle classique dans la mesure où il tend à devenir un modèle conféodal (terme qui découle de celui de confédéral), c'est à dire regroupant diverses allégeances. [...]
[...] De plus, si le mode de production asiatique ressemble à celui africain, c'est uniquement en ce sens qu'ils sont tous les deux tributaires, c'est à dire dépendants. Cependant, précise Cissé, la spécificité africaine a trait à son économie de base, agraire pour être précis, où la production d'un surplus n'est pas recherchée, ainsi qu'à la maitrise, par toute la communauté, du commerce longue distance. En se plaçant dans la perspective inverse, l'auteur démontre que si ce trafic venait à être contrôler par quelques uns (c'est à dire en fait monnayer la sécurité autour de ces échanges), cela déboucherait sur un système politique particulier, à savoir un modèle conféodal. [...]
[...] Ainsi, les explications offertes par Cissé m'apparaissent comme réellement insuffisantes dans la mesure où ce dernier parle d'un modèle capitaliste en adéquation avec la spécificité africaine sans en développer les modalités. Il a été, et il est encore aujourd'hui, souvent reproché au capitalisme de concourir au non développement de l'Afrique en raison, notamment, de sa tendance à accroitre les inégalités entre les individus au prix d'une ouverture d'un maximum d'activités à la loi du marché. Cependant, on ne trouve, dans le texte de Cissé, aucune solution pour réguler ce capitalisme, et la figure de style du « capitalisme rénové » laisse sur sa faim des lecteurs frustrés de ne voir qu'un titre accrocheur de plus dans la vitrine des tentatives d'essais sur les causes du sous-développement de l'Afrique. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture