Dans cet article, Jean-François Médard explique que l'Etat n'est pas une forme d'organisation politique universelle, mais issue d'un processus historique européen, qui s'est érigé en modèle analytique, puis en modèle idéologique à imiter. Cette absence d'universalité, combinée à des facteurs contextuels actuels (mondialisation, crise économique, montée des réseaux informels et mafieux souvent transnationaux articulés au pouvoir d'Etat), explique peut-être le déclin du modèle de l'Etat moderne aujourd'hui. Non pas tant en tant que modèle unique d'Etat, puisque Médard rappelle que tous sont des formes dérivées du modèle d'Etat européen, et non pas su s'ériger en modèle d'Etat alternatif. Mais en tant que modèle d'entité politique, c'est-à-dire que l'Etat est moins légitime dans ses activités de régulation d'un territoire, et qu'il est concurrencé ici par d'autres formes d'organisation politique, telles celles induites par le marché mondial, les organisations transnationales, etc. C'est du moins une tendance que l'auteur souligne, et il n'est pas certain qu'elle tendra à se confirmer.
[...] - Les Etats islamistes ont cela de particulier qu'il y a confusion entre temporel et spirituel (selon B.Badie), comme le modèle d'Etat islamiste iranien. Mais même ce modèle, dans la pratique, se rapproche du modèle unique d'Etat. Ces modèles alternatifs ont dévié vers des sous-formes actuelles de l'Etat moderne. Mais, de même que les tentatives d'imitation ratées, elles sont souvent les signes du déclin de l'Etat. L'Etat patrimonial, en Afrique notamment, est considéré comme une distorsion de l'Etat moderne qui porte en elle les germes de la décomposition de l'Etat. [...]
[...] Pendant la période coloniale, le modèle d'Etat colonial exporté vers les colonies est faussé : les colonies subissent la contrainte administrative, mais les institutions politiques souveraines, qui sont les instruments de légitimation, sont restées en métropole. Le mouvement d'indépendance va souligner cette absence de légitimité souveraine, propre au modèle de l'Etat moderne, pour contester l'Etat colonial. Après l'indépendance, c'est sur ce modèle unique d'Etat que vont émerger ces nouveaux Etats, dans une dernière vague d'Etats à naître : La logique de la concurrence politique les entraîne tout naturellement à emprunter à leur dominateur la technologie politique et administrative qui a permis cette puissance, donc cette domination Le mimétisme était inévitable, et ce n'est pas la raison de l'échec de ces Etats. [...]
[...] Jean-François Médard, "Le modèle unique d'Etat en question", revue internationale de politique comparée, volume 13, p.681-696, 2006/4 Dans cet article Jean-François Médard explique que l'Etat n'est pas une forme d'organisation politique universelle, mais issue d'un processus historique européen, qui s'est érigé en modèle analytique, puis en modèle idéologique à imiter. Cette absence d'universalité, combinée à des facteurs contextuels actuels (mondialisation, crise économique, montée des réseaux informels et mafieux souvent transnationaux articulés au pouvoir d'Etat), explique peut-être le déclin du modèle de l'Etat moderne aujourd'hui. [...]
[...] Mais L'émergence du modèle unique n'est pas contradictoire avec la diversification des Etats historiques. : chaque Etat est différent et n'est qu'une approximation du modèle abstrait de l'Etat au sens de Weber. Le monopole de la contrainte physique légitime existe dans tous les cas, il y a institutionnalisation et bureaucratisation plus ou moins développée pour contrôler la population dans tous les cas. Par contre, des degrés, des caractéristiques d'étatisation vont différencier les Etats d'Europe, créer des sous-modèles. Par exemple, Rokkan établit une distinction entre Etats du nord et Etats du sud. [...]
[...] Médard rappelle d'ailleurs que nous utilisons ici la définition de l'Etat au sens étroit, en d'autres termes, l'Etat moderne, un type particulier d'Etat (différent du sens large : tout système politique différencié). Etat idéal-type (stade un standard auquel sont confrontés les Etats historiques, axiologiquement neutre sert à souligner les caractéristiques de l'Etat moderne, par rapport à d'autres formes d'organisations politiques ou d'autres formes d'Etat (exemple : la tribu, l'Empire), qui peuvent décrire la puissance exceptionnelle de l'Etat moderne. - C'est un idéal-type dans le sens où une organisation politique peut entrer dans la définition de l'Etat moderne, en se détachant toutefois de l'exactitude de la définition de l'Etat au sens wébérien l'Etat est un groupe de domination qui revendique avec succès le monopole de la contrainte physique légitime sur un territoire soit un type idéal de domination légale-rationnelle). [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture