L'impôt est, aujourd'hui comme hier, ressenti par les individus comme une coercition, une charge imposée à la base par le haut. Nonobstant cette apparence, l'impôt ne fut-il pas en France, à l'inverse d'une marque de souveraineté arbitrairement imposée, l'un des principaux vecteurs de démocratisation de l'Etat ? Une analyse plus poussée mène en effet à cette conclusion : dès lors que la nation s'est cristallisée en France, le consentement à l'impôt s'est révélé être l'un des principaux vecteurs de participation du peuple au système politique.
[...] Le premier vecteur de participation politique de l'individu au pouvoir est donc sa représentation par les Etats généraux. Or, ceux-ci sont bien apparus par la nécessité d'un consentement à l'impôt. Ainsi, La Barre, dans le Formulaire des Elus, publié à Lyon en 1631, affirme : Les lois fondamentales du Royaume n'autorisent personne [ ] à lever les deniers, non pas même les Rois sans délibération du public et consentement d'états, les trois Ordres du Royaume étant pour ce congrès et assemblés De nos jours, plus encore qu'un simple vecteur de démocratisation, l'impôt semble même être un miroir de notre conception de la démocratie. [...]
[...] L'impôt en France : allié ou ennemi de la démocratisation de l'Etat ? L'impôt est, aujourd'hui comme hier, ressenti par les individus comme une coercition, une charge imposée à la base par le haut. Nonobstant cette apparence, l'impôt ne fut-il pas en France, à l'inverse d'une marque de souveraineté arbitrairement imposée, l'un des principaux vecteurs de démocratisation de l'Etat ? Une analyse plus poussée mène en effet à cette conclusion : dès lors que la nation s'est cristallisée en France, le consentement à l'impôt s'est révélé être l'un des principaux vecteurs de participation du peuple au système politique. [...]
[...] L'individu ne se sent pas français et un serf de l'Artois n'a pas conscience d'avoir une part d'identité commune au Duc d'Aquitaine. Avec la monarchie, la nation se forme progressivement en France. De là, selon la fameuse définition d'Ernest Renan, c'est un projet commun qui s'esquisse, partagé pour tous les Français, un même désir d'avancer ensemble, une conscience d'appartenir à une communauté. Or, ce projet commun légitime que l'individu s'aliène d'une partie de ses ressources pour édifier des structures vouées à une utilisation par les autres membres de la communauté. [...]
[...] A contrario, il peut y avoir impôt sans nation (c'est l'exemple de la féodalité), mais alors point de consentement. La relation unissant impôt et nation perdure aujourd'hui, mais sous une autre forme. Et pour cause : les modalités internes de l'impôt, le savant dosage entre impôts directs et indirects, reflètent notre conception de la nation. Au gré des élections, les projets communs essence de la nation auxquels adhère la majorité du peuple, varient. C'est là la cause du phénomène d'inflation législative souligné plus haut : si le CGI est si souvent révisé, c'est qu'il est vu comme le vecteur de transposition concrète de ce projet commun. [...]
[...] Ainsi, il est maintenant clair que, dès lors que la nation s'est cristallisée en France, l'impôt s'est révélé être un allié précieux de la démocratisation de l'Etat. S'esquisse alors la question de la viabilité de la transposition de cette analyse française au système politique de l'Union Européenne. Il est en effet possible que seule une participation financière directe consentie au système politique européen puisse faire naître une participation politique de chacun, et le sentiment d'une démocratie européenne. Toutefois, il est de même fort probable qu'un impôt européen unifié ne soit réalisable seulement si naît une nation européenne. [...]
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