Alain Garrigou, histoire sociale, individualisation du vote, capacité électorale, droit électoral, élection directe, expression des citoyens, mécanismes politiques, opinion personnelle, vote secret, clientélisme
Les élections présidentielles comme celles de février 2019 au Sénégal sont souvent l'occasion d'aborder les problématiques d'individualisation du vote, à travers des résultats souvent contestés et des accusations d'achat de conscience ou d'influence de la part de certaines communautés religieuses sur le vote des citoyens. Ce débat est indissociable de la mise en place du suffrage universel, et l'individualisation du vote a été une construction progressive en France à partir du XIXe siècle.
[...] Il dépend de logiques communautaires et de logiques d'appartenance, il n'est donc en aucun cas individuel. Souvent, les électeurs vont voter ensemble pour le même candidat après des délibérations communales, c'est donc une vraie « affaire familiale ». Au XIXe siècle, la religion représente une autorité morale qui a également une influence considérable sur le vote des citoyens. La parole des prêtres est relayée par les femmes, considérées comme plus réceptives, ce qui fut d'ailleurs l'un des arguments pour limiter leur droit de vote. Le deuxième élément d'entrave à l'individualisation du vote est la corruption. [...]
[...] Les manuels électoraux ont également vocation à apprendre les mécanismes du vote : on tente de créer une réelle capacité électorale. C'est ainsi que s'est opérée l'individualisation du vote en France. Aujourd'hui, celle-ci évolue encore pour prendre une forme différente. Lors des dernières élections présidentielles en France, le taux d'abstention d'élevait à 25%. Même si la crise de la représentation politique peut expliquer ce taux élevé, les politologues considèrent de moins en moins cette abstention comme révélatrice d'un désintéressement politique car elle est souvent accompagnée d'une vraie conscience et traduit un choix du citoyen. [...]
[...] Le vote est en effet devenu un droit plus qu'un devoir, et ne pas l'utiliser symbolise l'autonomie qu'ont acquise les individus. « Dans ce contexte, l'abstention est la marque du processus d'individualisation du vote et de desserrement des contraintes normatives qui lui sont associés. Le peuple électeur est certes aujourd'hui plus inconstant, mais peut-être plus réflexif. [...]
[...] Ce système comporte l'avantage de donner une liberté totale à l'individu au moment de son vote tout en lui permettant d'avoir un moment de réflexion. Cette pratique rompt symboliquement avec la communauté : l'individu est seul face à son choix. Enfin, le changement le plus important est la mise en place d'une instruction pour tous à travers l'école laïque et obligatoire. L'instruction primaire est fixée comme un préalable à l'exercice du droit électoral, les instituteurs sont rémunérés par l'état et leur statut leur assure une certaine indépendance. Ils deviennent concurrents au pouvoir religieux sur le thème politique. [...]
[...] Les transformations sociales et économiques qui surviennent durant le XIXe siècle participe à ce changement de paradigme. Des outils sont mis en place pour permettre une plus grande individualisation du vote, à commencer par l'usage du bulletin. Celui-ci est placé dans une enveloppe qui évite de reconnaître les bulletins, ce qui permet de limiter les tentatives de pression auparavant exercées par les présidents des bureaux de vote. Désormais, l'électeur doit également introduire lui-même son enveloppe dans l'urne. Le secret du vote est ainsi affirmé avec toute la notion d'intimité qu'il comporte. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture