Dans son essai intitulé L'Argent suite publié en 1913, Charles Péguy écrivait : « Je repense à cette formule, la paix par le droit, qui paraît si courte, si simple, si commode, si lucide. Parce qu'elle est comme géométrique et équilatérale. Quel enfantillage, aussitôt qu'on y pense. Le droit ne fait pas la paix, il fait la guerre. »
Au lendemain des accords de Munich, qui concluaient en 1938 un fallacieux espoir de paix, Daladier, alors Président du Conseil, aurait murmuré à sa descente d'avion, surpris de voir la foule qui l'acclamait : « Les imbéciles ! Ils croient avoir la paix et ils auront la guerre ! ». En effet le traité de Munich, mettant Hitler à l'abri d'une offensive alliée, lui donnait les pleins pouvoirs pour envahir la Tchécoslovaquie puis la Pologne.
Ainsi le droit - international ici - a malencontreusement permis à la guerre de voir le jour ; Charles Péguy l'avait prédit dès 1913, semble-t-il, déclarant : « Je repense à cette formule, la paix par le droit, qui paraît si courte, si simple [...] Quel enfantillage, aussitôt qu'on y pense. Le droit ne fait pas la paix, il fait la guerre. » Infirmant par là même la pensée kantienne selon laquelle paix et droit sont inextricablement et intimement liés, Péguy considère que non seulement penser la paix par le droit est un leurre, une illusion plaisante, mais qu'en outre, le droit est à l'inverse instrument de la guerre.
Il convient donc de se demander, par le biais de trois oeuvres: projet de paix perpétuelle de Kant, Quatre-vingt-treize de Victor Hugo et la Paix de Aristophane, si au fond, comme l'indique Péguy, le droit ne serait pas finalement au service de la guerre, que ce soit voulu ou non.
[...] Cependant le droit paraît nécessaire. Mais il doit s'accompagner d'un travail personnel, de chacun, pour tenter d'approximer à l'infini la douce utopie de la paix, qu'il faut prendre au sérieux. Entre le sol de l'impossible et l'horizon de l'espérance, l'humanité de l'homme consiste, au milieu des périls sans cesse renouvelés de la guerre, à assumer la tâche sans fin de construire la paix, comme si ce qui, sans doute, ne sera jamais, devait être selon le mot de Simone Gayard-Fabre. [...]
[...] Et elle a choisi la guerre pour faire naître la paix. De même chez Hugo la guerre semble s'arrêter dans la parenthèse des taillis de la forêt, dans le bois de la Saudraie. Comme l'explique Gauvain, l'amour de la nature, des éléments donne la force de stopper l'avancée de la guerre. Les hommes sont las de la voir s'éterniser. Que ce soit en 1873 lorsque Hugo rédigea Quatre-vingt-treize, en 1795 ou en - 421, le climat était belliqueux. La guerre broie le monde dans un immense mortier. [...]
[...] Développons cependant les moyens qu'offre le droit pour s'affranchir de toute guerre. Dans une première partie, six lois prohibitives énoncent les conditions par lesquelles l'humanité peut un jour espérer voir disparaître l'ombre de la guerre. Ainsi les armées permanentes (miles perpetuus) doivent être entièrement supprimées avec le temps (article trois). Avec le temps, le droit exclura donc tout recours à la guerre, car il s'agit d'une loi prohibitive au sens large. De même l'article cinq, qui possède une valeur inconditionnelle et non ajournable, stipule qu'«aucun Etat ne doit s'immiscer de force dans la constitution et le gouvernement d'un autre Etat.» Le recours à la guerre n'est ni licite, ni envisageable ; l'Etat étant vu comme une personne morale la souveraineté nationale est garantie par les moyens du droit. [...]
[...] A l'inverse il dénonce les simples armistices ou trêves, et s'insurge contre toute casuistique diplomatique qu'il trouve dangereuse. C'est pour cela que le philosophe doit être entendu, d'après l'article secret Sinon le semblant de droit, institué par des moralistes politiques par exemple, devient instrument de guerre et de conquête. En outre cette formule, la paix par le droit, dénoncée par Péguy, trouve son pendant dans la pensée de Pascal selon laquelle la justice sans la force est impuissante. La force sans la justice est tyrannique. [...]
[...] Le droit serait-il au service de la guerre ? Dans son essai intitulé L'Argent suite publiée en 1913, Charles Péguy écrivait : Je repense à cette formule, la paix par le droit, qui paraît si courte, si simple, si commode, si lucide. Parce qu'elle est comme géométrique et équilatérale. Quel enfantillage, aussitôt qu'on y pense. Le droit ne fait pas la paix, il fait la guerre. Au lendemain des accords de Munich, qui concluaient en 1938 un fallacieux espoir de paix, Daladier, alors Président du Conseil, aurait murmuré à sa descente d'avion, surpris de voir la foule qui l'acclamait : Les imbéciles ! [...]
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