La Déclaration Schuman du 9 mai 1950 s'inscrit dans un contexte particulier : les stigmates de la Seconde Guerre Mondiale ne sont pas encore cicatrisés et l'Allemagne est toujours mise à l'amende par les Alliés, mais c'est aussi le début de la Guerre Froide symbolisé par ce « rideau de fer » entre l'Est et l'Ouest dont parlait Churchill dès 1946 et bientôt matérialisé par l'invasion de la Corée du Sud par la Corée du Nord.
A la fin des années 40, un groupe d'hommes pacifistes (craignant une nouvelle guerre), anti-communiste (proche ainsi des USA) mais également profondément européens vont agir dans l'ombre pour mettre sur pied une entente sectorielle, d'abord entre la France et l'Allemagne, puis élargie à quatre autres pays (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg soit le « Benelux » et l'Italie). De ce groupe d'hommes, deux noms ont été particulièrement retenus : ceux de Jean Monnet (1888-1979) et de Robert Schuman (1886-1963). Le premier, en homme d'affaires avisé, travaillera à faire consensus sur l'idée de regrouper le charbon et l'acier sous une gestion commune de la France et de l'Allemagne. Le second est plus que le porte-parole institutionnel (puisqu'à l'époque de sa Déclaration, il est Ministre des Affaires Etrangères), il en est le symbole de par le fait notamment de sa biographie : né au Luxembourg de parents lorrains, donc allemands, il sera avocat puis entrera en politique comme député de Moselle. Bien que votant les pleins pouvoirs au Général Pétain en 1940, il démissionnera de son gouvernement pour entrer en résistance.
Cette Déclaration, qui a surpris l'opinion publique d'alors, est le fruit du travail d'hommes espérant voir l'Europe de nouveau rayonner au plan international. Nous pouvons nous demander alors dans quelle mesure cette Déclaration jette les bases d'une nouvelle Europe économique et politique.
Cette Déclaration énonce, en effet, des objectifs pour l'Europe qui sont toujours les siens aujourd'hui : construire une entente économique (qui s'est considérablement développée depuis) doublée d'un projet d'intégration politique (qui s'est lui aussi développé tout en suscitant nombre de critiques qui en font un processus « à petits pas »).
[...] Ainsi, il s'agit de placer sous une Haute Autorité commune l'ensemble de la production franco-allemande de charbon et d'acier. Cette institution sera chargée du fonctionnement de tout le régime et sera composée de personnalités indépendantes De par une gestion hors-étatique du secteur et de ses membres indépendants des Etats, la Haute Autorité apparaît comme la première institution supranationale dont se dote l'Europe. C'est dans ce sens que l'on peut y voir l'ancêtre de la Commission européenne d'aujourd'hui, institution indépendante, s'il en est, de l'Union Européenne (ses membres sont encore désignés par les gouvernements, mais soumis à l'approbation du Parlement, mais son Président n'est pas, comme pour la Haute Autorité, désigné par les gouvernements, mais nommé par le Conseil puis approuvé par le Parlement). [...]
[...] Nous pouvons nous demander alors dans quelle mesure cette Déclaration jette les bases d'une nouvelle Europe économique et politique. Cette Déclaration énonce, en effet, des objectifs pour l'Europe qui sont toujours les siens aujourd'hui : construire une entente économique (qui s'est considérablement développée depuis) doublée d'un projet d'intégration politique (qui s'est lui aussi développé tout en suscitant nombre de critiques qui en font un processus à petits pas (II). Une coopération économique Le souvenir de la Seconde Guerre Mondiale étant encore dans toutes les têtes et le spectre de la Guerre Froide se profilant à l'horizon, la volonté principale des instigateurs de cette Déclaration est de préserver la paix. [...]
[...] II) dont l'ambition est d'être le socle d'une construction politique Appartenant tous les deux à la démocratie chrétienne française à l'époque, Jean Monnet et Robert Schuman sont de profonds européens ayant à cœur de voir se relever l'Europe par la coopération et l'entraide et de doter celle- ci de véritables institutions politiques lui permettant de devenir une Fédération européenne Dans cette optique, cette coopération économique induit la création d'institutions qui feront l'objet d'un traité entre les Etats à savoir le Traité de Paris (18 avril 1951). Si des négociations préciseront les mesures d'application la Déclaration dévoile d'ores et déjà la clef de voûte institutionnelle de cette coopération : la Haute Autorité. [...]
[...] Mais, à notre époque, c'est aussi et peut être surtout l'inauguration d'une méthode communautaire induisant un transfert de souveraineté des Etats vers la Communauté qui importe le plus dans cette Déclaration. L'histoire ultérieure a d'ailleurs repris cette méthode puisque l'intégration économique est allée de pair avec une intégration institutionnelle. Néanmoins, cet esprit de la CECA, s'il fait toujours référence pour bon nombre d' européanistes est aussi combattu. Ainsi, un de ses plus farouches adversaires est la Grande-Bretagne et c'est dans les années 80 que Mme Thatcher s'en prendra le plus violemment aux institutions de celle-ci, les accusant de confisquer la légitimité de l'esprit européen. [...]
[...] Le Traité de Paris créera donc une Cour de Justice qui préfigure la Cour de Justice de l'Union Européenne donc l'action vise, outre le fait de défendre le droit européen, de permettre aussi aux citoyens d'avoir des moyens de recours contre les décisions de l'Union européenne. La Déclaration institue ainsi la Haute Autorité dont le fonctionnement, loin d'être neutre, préfigure la supranationalité dont nous avons coutume de caractériser l'Union Européenne aujourd'hui. Conclusion : La Déclaration Schuman du 9 mai 1950 proclame la naissance d'une coopération économique entre l'Allemagne et la France dont l'objectif est, avant tout, d'assurer la paix en Europe via l'impossibilité technique de faire la guerre. [...]
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