Allocution télévisée du président de la République, Jacques Chirac, sur la mort de François Mitterrand, 8 janvier 1996

Résumé du document

Le premier tome des mémoires de Jacques Chirac, intitulé "Chaque pas doit être un but", vient d'être publié. Au grand étonnement de certains de ses lecteurs, si Valéry Giscard d'Estaing ou Édouard Balladur ne s'en tirent pas indemnes, François Mitterrand a quant à lui droit à des pages plutôt élogieuses, écrites de la main même de Chirac. De Mitterrand, il va même jusqu'à les ponctuer d'un « salut l'artiste ! » surprenant lorsqu'on se rappelle la relation publique entre les deux. Étrange éloge d'un homme de droite à son éternel rival de gauche. Cet hommage, Chirac l'avait déjà formulé lors d'une allocution télévisuelle le 8 janvier 1996, le jour même de la mort de François Mitterrand.

Extraits

[...] Cet hommage, Chirac l'avait déjà formulé lors d'une allocution télévisuelle le 8 janvier 1996, le jour même de la mort de François Mitterrand. Le président ne pouvait faire autrement : il se devait en effet de réagir le plus promptement possible avant l'inévitable concert de louanges venu de l'extérieur qui allait suivre l'annonce de la mort de son prédécesseur ; plus encore, il avait à répondre à un contexte difficile pour un chef de l'Etat en poste depuis moins d'un an (popularité en baisse), surtout en comparaison du socialiste toujours apprécié des Français, lesquels venaient d'apprendre la disparition de la figure de proue de la politique du pays pendant 14 ans. [...]

[...] L'intellectuel On passera rapidement sur cet aspect du président défunt, aussi vite que Jacques Chirac dont les propos à cet égard ne remplissent que trois lignes au début de son discours (l.5 à 8). Pour autant, le fait qu'il mentionne un tel trait doit nous inciter à ne pas le laisser complètement de côté, car sa mise en perspective aide à la compréhension à la fois du politique et de l'homme, faisant pour ainsi dire le lien entre les deux conceptions du personnage. [...]

[...] Commentaire de l'allocution télévisée du président de la République, Jacques Chirac, sur la mort de François Mitterrand janvier 1996 Le premier tome des mémoires de Jacques Chirac, intitulé Chaque pas doit être un but, vient d'être publié. Au grand étonnement de certains de ses lecteurs, si Valéry Giscard d'Estaing ou Edouard Balladur ne s'en tirent pas indemnes, François Mitterrand a quant à lui droit à des pages plutôt élogieuses, écrites de la main même de Chirac. De Mitterrand, il va même jusqu'à les ponctuer d'un salut l'artiste ! [...]

[...] Seuls, sans doute, les politiques qui ont l'étoffe d'un homme d'État connaissent ce partage. Au politicien tout est simple, et il ne se pose pas tant de questions C'est aussi un peu cette figure que Chirac, magnanime, montre de son grand rival, vaincu par la maladie. Et Chirac trouve pour ce faire des accents paradoxalement gaullistes pour évoquer l'écrivain du coup d'Etat permanent : aux lignes 8 et il évoque ainsi une Europe dans laquelle la France réconciliée avec l'Allemagne et travaillant avec elle occuperait une place de premier rang Il n'est pas vain de déceler un double aspect dans cette remarque de Jacques Chirac : en saluant le travail de son prédécesseur sur ce point, il dévoile la notion d'Europe comme porte-voix de la France dans le monde, manière de réconcilier l'Union moderne avec la souveraineté chère aux gaullistes. [...]

[...] De ses premiers mandats électoraux sous la IVème République à ses charges ministérielles sous les gouvernements, notamment, de Guy Mollet ou de Pierre Mendès-France, de son opposition résolue à la création de la Vème République et au retour du général de Gaulle à la surprenante mise en ballottage au second tour de l'élection présidentielle de 1965 de ce dernier par le dit Mitterrand (lequel avait finalement accepté le principe du suffrage universel, à l'inverse d'un Mendès-France pour ne citer que lui), de la réunification de la gauche et de l'opposition en général à la conquête de la présidence en 1981 et son exercice jusqu'en 1995, Chirac peut facilement se permettre à travers quelques mots une carrière fascinante qui est d'ores et déjà inscrite dans l'imaginaire de chacun. Voilà pourquoi il ne manque pas d'insister enfin sur le fait que François Mitterrand n'est pas réductible à son parcours B. [...]