Selon Jean Lacouture, de Gaulle « mit deux mois à rédiger, vingt-sept minutes à prononcer, douze à remâcher, dix ans à mettre en pratique » le discours de Bayeux.
Il fut prononcé le 16 juin 1946 par le Général de Gaulle, et pour embrasser toute la valeur symbolique du discours, il est nécessaire de le replacer dans son contexte géographique et temporel. Bayeux fut la première ville libérée, le 7 juin 1944, par les Alliés. Le discours se tient à l'occasion du second anniversaire de cet événement, un moment de commémoration nationale.
1946 est une année de réflexion sur la construction d'une quatrième République française. Un premier projet de constitution vient d'être refusé par référendum un mois plus tôt. Au moment où les discussions reprennent pour mettre au point un nouveau projet de Constitution, De Gaulle qui s'était écarté de la campagne, et de la vie politique s'adresse pour la première fois aux français depuis sa démission de la tête du GPRF.
[...] II) Une vision prophétique de l'avenir : la constitution pré-dite Tel un texte juridique, de Gaulle va parcourir les champs institutionnels et dresser la description de ce qu'elles doivent être d'après lui. Dans cette seconde partie, il sera donc fort intéressant de voir en quoi la vision du général de Gaulle était prophétique. De plus, et c'est ce qui est le plus intéressant rétrospectivement, c'est que ce discours a eu très peu d'écho immédiat. Pire, les gaullistes le refuseront presque en accordant leur confiance au second projet de constitution pour la 4ème république. [...]
[...] En cela, le discours de Bayeux s'inscrit dans une certaine continuité du discours de l'Hôtel de Ville du 25 août 1944, jour de la Libération de Paris, jour auquel la France et les français ont retrouvé leur berceau. Une fois assuré le statut de l'Etat, légitime et fort, de Gaulle présente la nécessité de fonder de nouvelles institutions pour une nouvelle république, par le biais d'une nouvelle constitution accordée par le peuple. Conscient de se trouver dans une période charnière (entre un premier rejet de constitution et le début d'une nouvelle activité constituante), il déclare avec un brin d'hypocrisie ne pas vouloir fausser l'œuvre des législateurs Alors qu'il compte bien que son propos résonne aux oreilles de l'assemblée constituante. [...]
[...] Néanmoins, on devine qu'il souhaite un bicamérisme inégalitaire puisque la seconde chambre a plutôt un rôle d'examen après que la première ait décidé. Et puisque vie locale, elle aussi, a ses tendances et ses droits de Gaulle souhaite que la nouvelle constitution de l'Union Française s'adapte à ses territoires d'outre-mer en prenant une forme fédérative, que le temps précisera peu à peu. On comprend déjà la nécessité d'un compromis avec l'Algérie (entre autres). Afin de représenter cette union, les membres de la seconde assemblée pourront se réunir avec les élus des assemblées locales des territoires d'outre-mer pour former le grand Conseil de l'Union française, qui délibèrera des lois et des problèmes intéressant l'Union, voteront les budgets, interviendront dans les relations extérieures et les rapports intérieurs, dans la défense nationale, l'économie et les communications. [...]
[...] Il serait élu par un collège qui englobe le Parlement mais beaucoup plus large et je cite composé de manière à faire de lui le président de l'Union française en même temps que celui de la République Certains devinèrent déjà ici, l'intention d'instaurer le suffrage universel pour élire le chef de l'état, ce qui sera inscrit dans la constitution à partir de 1962. Et d'autre part un premier ministre (mot que l'on entend pour la première fois) désigné par le président de la République, en fonction de la majorité à l'Assemblée. [...]
[...] Portrait d'une nation friande de divisions politiques, que les institutions doivent prendre en compte. Avant d'exposer sa réponse, et c'est le deuxième point de cette première partie, de Gaulle se doit de mettre en garde le peuple et les acteurs de la future 4ème république, des fâcheuses tendances politiques des français, dont les institutions à venir feraient mieux de tenir compte. Au cours d'une période de temps qui ne dépasse pas deux fois la vie d'un homme, la France fut envahie sept fois et a pratiqué treize régimes dit- il, en introduction de son portrait d'une nation friande de conflits politiques. [...]
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