La géopolitique du sud de l'Afrique a longtemps présenté un intérêt relativement mineur. De fait, la principale puissance de la région, l'Afrique du Sud, est restée soumise à un embargo économique et financier, en raison de sa politique d'Apartheid, même si elle était parvenue à éviter une prescription absolue grâce à sa diplomatie non officielle. Par ailleurs, les autres pays de l'Afrique australe, Botswana, Namibie, Lesotho et Swaziland, peu peuplés, dépourvus de richesses naturelles, ne parvenaient pas à s'affranchir de sa domination. Quant aux pays frontaliers, la plupart se débattaient dans les difficultés intérieurs et les conflits, tels le Mozambique ou l'Angola. De fait, la région, mais aussi le continent en général, est apparue de plus en plus négligeable sur le plan politico-économique, perdant sans cesse du terrain en termes de commerce international et devenant une plaque tournante des grands trafics planétaires.
La transition démocratique de l'Afrique du Sud, amorcée en 1991 avec la libération de Nelson Mandela, bouleverse cet état de faits. Malgré une position géographique très en retrait des principaux courants d'échanges mondiaux (mis à part le passage des "supertankers"), l'Afrique du Sud s'affirme comme le principal pôle de développement du Sud de l'Afrique, grâce à une industrialisation avancée et réussie ainsi qu'à l'exploitation de ses ressources naturelles, principalement l'or et les diamants. A l'évidence, sa réinsertion officielle au sein des principaux forums lui permet de jouer un rôle accru au niveau international et notamment sur la scène continentale. Elle tend ainsi à affirmer son rôle politique en Afrique: Nelson Mandela envoie ainsi une aide logistique au Rwanda et sert de médiateur dans la débâcle angolaise; il est même probable que l'Afrique du Sud sera le terrain de rencontre entre le général Mobutu et Laurent-Désiré Kabila. Petit à petit, c'est une redéfinition complète de la géopolitique du Sud de l'Afrique qui se dessine.
[...] En juillet 1994, elle adhère officiellement à la SADC, tandis que la FLS décide de participer à un accord sur la sécurité de la région, se rebaptisant Association des Etats d'Afrique australe (ASAS). Une première coopération sérieuse entre les principaux dirigeants d'Afrique australe est rendue nécessaire dès 1993, l'armée du Lesotho menaçant de prendre le pouvoir. De même ils sont obligés d'accorder leurs politiques devant la menace du roi du Lesotho d'abolir la Constitution en septembre 1994, et de surveiller le processus électoral au Mozambique, qui voit la victoire en décembre de la Renamo, la Résistance nationale, et pour lequel l'Afrique du Sud a fourni une aide logistique et des observateurs. [...]
[...] La transition démocratique de l'Afrique du Sud semblait rendre obsolète ces institutions. Cependant, la continuation de la domination économique sud- africaine faisait craindre aux dirigeants d'Afrique australe l'émergence d'une nouvelle hégémonie sud-africaine. L'adaptation des institutions à la nouvelle dynamique régionale se fait donc progressivement. Lors d'une réunion à Windhoek en août 1992, la SADCC se rebaptise Communauté de Développement de l'Afrique australe (SADC), et l'Afrique du Sud annonce sa volonté de prendre part à ces institutions régionales. Elle lance d'ailleurs l'idée d'une conférence sur la sécurité et la coopération en Afrique australe, mais son intégration dans l'OUA en 1994 met en frein à ce projet, en lui permettant de se réinsérer dans le système inter-étatique africain autrement que par un accord régional plus limitatif. [...]
[...] L'économie de l'Afrique du Sud domine en effet totalement la région. Elle représente trois celle de tous les autres membres de la SADC réunis et quinze fois celle du Zimbabwe, deux puissances de la communauté derrière elle. On estime de plus que les exportations de ce seul pays équivalent presque à celles de l'ensemble de l'Afrique sub-saharienne. Or l'afflux de biens et de capitaux sud- africains, qui a toujours été important mais qui est maintenant officiel, représente une menace pour les fragiles capacités de production de pays tels que la Zambie. [...]
[...] Ainsi, les desseins d'expansion de la SADC à l'économie en plein essor de l'île Maurice accroissent la crédibilité des projets de réalisation d'une Communauté économique du pourtour de l'océan Indien. L'Inde, dont le rôle au sein du mouvement anti-apartheid a été crucial, investit beaucoup pour établir des liens économiques et politiques solides avec l'Afrique du Sud. L'Asie est la partie du monde encore la plus discrète dans la région. L'expansion économique du Japon y est due à la place dominante de l'Afrique du Sud et au rôle important joué par les multinationales japonaises dans l'économie sud-africaine. [...]
[...] Petit à petit, c'est une redéfinition complète de la géopolitique du Sud de l'Afrique qui se dessine. Une difficile redéfinition de la place de l'Afrique du Sud en Afrique australe Longtemps, la nature et le développement des Etats et des institutions de l'Afrique australe ont été influencés par la politique de déstabilisation menée par l'Afrique du Sud. Angola, Mozambique, Lesotho, Malawi, Tanzanie, Zambie et Zimbabwe avaient été contraints d'adopter des programmes d'ajustements structurels soutenus par le FMI, très durs à réaliser dans des économies où le secteur public avait pris une place très importante. [...]
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