"Les seigneurs de la paix" - Roger Faligot (Seuil, Paris, 2006)

Résumé du document

Les seigneurs de la paix, expression néologique fondée par opposition aux « seigneurs de la guerre », désigne ces personnes, dont l'action se situe à la frontière entre la médiation internationale et la résolution des conflits, qui, dans l'ombre, agissent pour prévenir ou résoudre les conflits contemporains. Individus, membres d'une organisation religieuse, représentants d'un État, d'un parti politique ou d'un ancien groupe armé, leur action s'inscrit dans une temporalité longue, faite de négociations et de médiations, souvent rompues, parfois reprises, faisant intervenir une multiplicité d'acteurs, et largement dépendante du contexte régional qui l'encadre. Leur succès, jamais assuré, doit ainsi être considéré en prenant en compte tous ces facteurs.

Le livre s'intéresse particulièrement à huit cas d'étude (la fin de l'apartheid en Afrique du Sud, les accords d'Oslo, l'Irlande du Nord, le Pays Basque, l'action de la communauté de Sant'Egidio, le Guatemala, le Kosovo et le Sri Lanka), les chapitres premier et dernier venant introduire et conclure l'ouvrage, dans une perspective plus large que les exemples étudiés.

Extraits

[...] Ibid., p Expression désignant la dernière période de la Guerre Froide, marquée le regain de tensions entre l'URSS et les États-Unis, à partir de l'arrivée au pouvoir de Reagan en 1981, et jusqu'à la chute de l'URSS en 1989/1991. Ibid., p Ibid., p Voir p pour la notion de ripeness. Ibid., p Ibid., p ZARTMAN, William, Ripe for resolution : conflict and intervention in Africa, Oxford University Press, Oxford Voir, par exemple, KRIESBERG,Louis, growth in the conflict resolution field”, in CROCKER, Chester A., HAMPSON, Fen Osler, AALL, Pamela, The challenges of managing international conflict, USIP, Washington, D. C., 2001. [...]

[...] En effet, comme nous l'avons souligné, les factions les plus radicales, et même la population, peuvent être opposées à un tel processus, et les en informer, au moins initialement, peut faire avorter le dialogue. Une nouvelle fois, Oslo est un cas révélateur, les discussions se déroulant dans le secret le plus absolu (rappelons ici que le gouvernement israélien n'est initialement même pas averti), et laisse même la possibilité à chacun des participants de se rétracter tant qu'aucun accord public n'est signé ; le lieu est tenu secret, à tel point que la dernière réunion, tenue à Paris, se fait dans l'ignorance la plus absolue des autorités françaises. [...]

[...] Mais, l'action combinée des Brigades Internationales pour la Paix (mouvement non-violent pacifiste, fondé pour suivre les principes du Mahatma Gandhi) et de la Lutherian World Federation, conjointement avec la diplomatie norvégienne, permet l'ouverture des négociations en 1990 ; mais, en 1993, celles-ci s'achèvent sur un échec. Elles reprennent néanmoins en 1995, à Oslo, et se concluent le 29 décembre 1995 par la signature d'un accord de paix. Le cas d'étude suivant est celui du Kosovo. La province serbe, autonome depuis 1974, accroît ses revendications indépendantistes après la mort de Tito en 1980, mais surtout, après les indépendances slovène et croate de 1991. I. [...]

[...] En effet, selon Zartman, l'intervention d'un médiateur a plus de chances d'aboutir lorsque le conflit est ripe, c'est-à-dire, une situation où les parties à un conflit se retrouvent dans une situation de blocage, où aucune ne semble pouvoir l'emporter et où la continuation de la situation s'avère coûteuse pour les deux (mutually hurting stalemate). Plus précisément, analyser la perception qu'ont les seigneurs de la paix de la situation, leur action et la façon dont il l'envisage (ont-ils conscience d'intervenir à un moment favorable ? prennent-ils en compte cette problématique ? . [...]

[...] Si nous nous sommes concentrés ici sur les acteurs clés de chaque processus de résolution du conflit, agit en réalité un faisceau d'acteurs, soit conjointement, soit indépendamment et parallèlement. Si la médiation peut, à l'origine, ne relever que d'une poignée de personnes uniquement, on constate en effet à la lecture du texte que les intervenants sont généralement variés, et qu'ils agissent relativement indépendamment, que ce soit dans un domaine, un moment ou une logique qui leur est propre ; comme c'est le cas, par exemple, au Guatemala, avec la Lutherian World Federation, les Brigades Internationales pour la Paix et le gouvernement norvégien. [...]