Toute l'argumentation de l'auteur sur la rupture Nord/Sud s'articule autour d'une comparaison entre deux moments historiques: Rome après la disparition de leur mortel ennemi, Carthage, et l'Occident après la fin du Bloc de l'Est. Pour survivre à cette absence de menace, créatrice d'une cohérence interne, le Nord est en train de s'inventer un nouveau danger, le Sud. Comme le Sud n'a pas l'existence unifiée que possédait le camp communiste, c'est le Nord qui va devoir lui donner cette unité. Dans une première partie, J.C Rufin exposera les oppositions Nord/Sud, et dans une seconde partie la façon dont le Nord projette de se protéger du Sud
[...] La construction d'une opposition Nord/Sud Le territoire du Sud, des nouveaux barbares, diffère de celui du Nord en ce qu'il est composé de terrae incognitae, de régions fermées par la volonté d'états dictatoriaux, à cause de rebellions, ou parce que les mégapoles du Sud sont des endroits de mystère et de violence. En comparaison, le Nord est ouvert, perméable. Ensuite, si la population du Nord est peu nombreuse et stable, celle du Sud est innombrable et déracinée. La transition démographique y est incertaine, il perdure un malthusianisme naturel (guerres, famines, maladies Le Sud a donc une capacité de déferlement dont le Nord veut s'effrayer. Les nouveaux barbares sont une masse qui a perdu son organisation traditionnelle de vie sociale. [...]
[...] Les invasions qui l'ont balayé de façon presque continue depuis les temps antiques font de sa population un sable mouvant, où chaque vague à peine formée s'est vue recouverte et effacée par une autre, de sa civilisation une mosaïque barbare, où le raffinement extrême de l'Orient côtoie la sauvagerie des nomades. Sur cette base mal raffermie, la vie politique s'est développée à la manière de pulsations aussi brutales que déconcertantes: tantôt le pays, en proie aux dissensions, s'affaisse sur lui-même et semble prêt à s'émietter en clans féodaux opposés par des haines de races mortelles - tantôt une vague mystique, née dans le creux de ses déserts, fond ensemble toutes les passions.» Le livre de J.C Rufin est facile à lire, l'écriture est alerte mais son style, qui a son charme, a aussi des inconvénients. [...]
[...] Le limes sépare deux mondes et en même temps unifie chacun d'eux, car c'est par leur opposition que se définissent et se solidifient Nord et Sud. Le limes construit par le Nord différencie les barbares: Les Etats tampons qui jouxtent le limes. Ils se doivent d'être stables en tout point et dépendre du Nord. Leur régime politique importe peu. Il s'agit du Mexique, de la Turquie, du Maroc, de la Chine, de l'Iran même. Des relations économiques ou stratégiques disséminées comme l'Afrique du Sud, Panama, Singapour. [...]
[...] On trouve un profond divorce entre les données économiques et la réalité sociale, entre l'officiel et l'informel dans les performances. Pour l'auteur, cela ne provient pas d'un mauvais fonctionnement mais d'une différence d'essence de l'économie des pays du Sud. C'est pour cela que survivent malgré leurs résultats catastrophiques les PMA d' Afrique. En fait, que ces oppositions Nord/Sud existent ou non n'est pas l'important. Ce qui compte, c'est l'idée que l'on peut se faire de ces oppositions. Identifier deux mondes différents, Nord et Sud, c'est déjà les faire s'affronter. [...]
[...] La question est de savoir si le limes apportera un équilibre durable au Nord. Pour cela, il faut un équilibre militaire, qui semble acquis, en faveur du Nord. Le Nord peut aussi se garantir des soubresauts du Sud livré à lui-même. Terrorisme, trafic de drogue, péril écologique sont encore des arguments pour renforcer le limes. Le limes instaure une diplomatie de l'inégalité. Le limes égalise ses deux rives et tend donc à faire perdre toute justification à l'inégalité de statut qui les distingue. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture