Dès son introduction, Samy Cohen affiche ses ambitions : il souhaite s'attaquer aux thèses trans-nationalistes très en vogue en ce moment. En effet, selon les tenants de ces thèses, l'Etat subirait actuellement la concurrence de nouveaux acteurs trans-nationaux autonomes tels que les ONG, les firmes multinationales (FMN), les terroristes et les mafias. On assisterait donc à un « déclin » de la souveraineté de l'Etat, et à l'avènement d'un « système multicentré » selon l'expression de James Rosenau. Nous serions donc entrés dans une ère de « gouvernance » à l'échelle mondiale, dont l'Etat ne serait qu'un acteur parmi les autres que sont les organisations internationales et la société civile.
Pour Samy Cohen au contraire ces thèses sont inexactes : selon lui, les Etats font de la résistance, et on assiste en ce moment à un « retour de l'Etat », à une demande accrue pour « plus d'Etat ». En fait, la mondialisation n'est pas un phénomène aussi nouveau qu'on veut bien le dire, et de toute manière les Etats n'ont jamais eu une souveraineté pleine et entière sur leur territoire du fait de l'existence d'un droit international et d'instances de coopération interétatiques. Il ne réfute pas le fait qu'il y ait eu une certaine « érosion » de celle-ci, mais pour lui c'est une stratégie voulue par les Etats et non une marque de leur impuissance. Ceux-ci, en transférant une partie de leur souveraineté, par exemple aux institutions européennes, on souhaité affermir leurs intérêts économiques et politiques. Par ailleurs, il constate également que dès que l'on touche aux « noyaux durs» de la souveraineté des Etats, tels que la police, la défense, la politique extérieure, la politique fiscale, ceux-ci font montre de « réflexes nationaux » et restent maîtres du jeu.
[...] On ne peut donc pas taxer les Etats actuels d'impuissance, en fait l'impression parfois qu'ils ne maîtrisent pas la situation vient du fait qu'il y a eu une démultiplication de leurs tâches, qu'ils ne sont peut-être pas toujours en mesure d'assumer par manque d'organisation. Ils restent donc comme le dit Samy Cohen des acteurs majeurs dans les relations internationales. Cependant, il ne faudrait pas non plus sous-estimer ces phénomènes de globalisation, et on peut se demander si les Etats sont encore vraiment les seuls à être capables d'agir pour maintenir l'ordre international. [...]
[...] Mais enfin et surtout, les Etats face à leurs critiques se contentent de déclarations de bonnes intentions qu'ils ne respectent pas. En définitive, les ONG ont bien une influence sur les Etats, mais celle-ci, au lieu d'aboutir à sa mise en touche, a au contraire abouti plutôt au renforcement de l'interventionnisme étatique. Finalement, les ONG ont l'influence que les Etats ont bien voulu leur concéder, il y a une vraie complémentarité entre Etats et ONG. Samy Cohen passe ensuite à l'étude des rapports entre Etats et organisations terroristes internationales. [...]
[...] Les capacités d'action des puissances ne seraient pas déterminées par des facteurs externes, mais elles dépendraient du système international qui résulte des interactions entre tous les acteurs. En fait, les Etats contribueraient à tisser sans s'en rendre compte les liens dans lesquels ils sont prisonniers. Un Etat tout seul n'est donc pas en mesure d'influencer le système international autant que celui-ci peut l'influencer. Les thèses néo-libérales permettent également d'introduire à côté de la souveraineté des Etats l'existence d'un ordre lié aux régimes internationaux. [...]
[...] De l'autre côté, la menace terroriste aboutit à un renforcement des Etats, face à la demande de sécurité de leurs citoyens. Si on a pu croire que les Etats étaient en péril, comme après les événements du 11 septembre 2001, ce n'est pas par manque de moyens de défense face aux organisations terroristes, mais plutôt parce qu'ils n'ont pas su coopérer ou qu'ils se sont compromis avec certains Etats tampons Pour finir, quid des relations Etats - FMN ? Les FMN, nouveaux maîtres du monde déconnectées de leur nation d'origine pour mieux engranger les profits partout dans le monde, seraient devenues les partenaires obligés de la diplomatie des Etats. [...]
[...] Cependant, les Etats ont su résister à la montée en puissance des ONG. Samy Cohen cite ici l'exemple de la convention d'Ottawa sur l'interdiction des mines antipersonnelles de décembre 1997, souvent présentée comme une victoire des ONG et l'avènement d'une nouvelle forme de diplomatie Il montre qu'en réalité il s'agit plutôt d'un échec, car son application pose de nombreux problèmes, et que finalement les Etats ont signé parce qu'ils étaient déjà convaincus ou qu'ils n'avaient rien à perdre, et non sous l'influence supposée des ONG. [...]
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