En octobre 1962, Robert Kennedy, alors ministre de la justice, fut l'un des hommes prenant part aux discussions et aux réunions du groupe formé afin de trouver une parade à la présence militaire menaçante de l'URSS sur l'île de Cuba. Dans son livre 13 jours. La crise des missiles de Cuba, paru en 1968, il livre ses souvenirs, ses impressions et son analyse sur ces journées critiques qui mirent le monde au bord du conflit nucléaire. En retraçant les évènements advenus lors de la crise, R. Kennedy révèle les dynamiques de production de décision, notamment au plan stratégique, témoignant ainsi d'une logique particulière de « pression/ réaction » présidant au processus de fabrication.
[...] Ce comité est restreint et informel afin de préserver les débats des pressions extérieures. Le président lui même se tient à l'écart, craignant que sa présence ne modifie le comportement des uns ou des autres. Il demande à ce que ce comité élabore et propose plusieurs options possibles. Chaque solution envisagée doit être analysée quant à sa valeur, sa faisabilité et ses conséquences supposées. La proposition de plusieurs options peut en effet permettre de dégager une action possible maximisant les valeurs de la nation en tant qu'acteur. [...]
[...] Il y a donc là une recherche de légitimité et de soutien de la part de la communauté internationale. Toutefois, le processus de décision procède également d'un marchandage entre une multitude d'acteurs, fort de la dynamique de débat qui anime les réunions du comité. Cependant R. Kennedy souligne que les hommes en présence ont aussi bien pu rester constants dans leurs opinions que changer du tout au tout et ce jusqu'au dernier instant. Tels qu'ils sont présentés par R. Kennedy, les débats semblent plutôt conduits par une volonté de chacun de trouver et de faire prévaloir ce qu'il croit être l'intérêt national. [...]
[...] Lorsque l'on se tourne vers eux c'est précisément pour savoir de quelles possibilités d'intervention l'on dispose, c'est ce que souligne R. Kennedy lorsqu'il rapporte les paroles de son frère concernant l'attitude de l'Etat Major. Les procédures de décision telles qu'elles sont relatées apparaissent articulées autour de la concertation. C'est d'après R. Kennedy l'élément fondamental de ces journées, et celui qui fut le plus enrichissant. Chacun exprime son opinion librement, sur un pied d'égalité avec les autres, la défend, se voit opposé des objections, des critiques. [...]
[...] Le travail de communication fut très important, il s'agissait pour le gouvernement américain de faire clairement connaître ses intentions, de s'assurer d'être bien compris, d'une part par l'URSS et d'autre part par la communauté internationale. C'est dans cet esprit que le président Kennedy répéta un passage de son discours du 4 septembre lors de la visite de Gromyko. Ainsi, le processus de décision lors de la crise de Cuba apparaît comme innovant. Le président Kennedy, très marqué par l'ouvrage de Barbara W. Tuchman, The guns of august a su ne pas se réfugier dans le passé, évitant ainsi de répéter les erreurs de ses prédécesseurs. [...]
[...] Un autre point essentiel fut celui de la liberté des débats qui permit une réflexion exceptionnellement féconde. Le comité formé, informel et secret avait l'avantage de faire échapper les discussions aux pressions extérieures, qu'elles proviennent de la sphère politique (on pense alors à la vive réaction du congrès) ou de l'opinion publique. Les hommes réunis avaient ainsi une totale liberté d'expression, ils étaient libérés non seulement des pressions extérieures, mais également de leur hiérarchie. La nature exceptionnelle de ce comité admit certainement plus d'audace de la part des membres du gouvernement. [...]
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