L'ouvrage de Marwa Daoudy a pour ambition d'étudier le long processus de négociations entre la Syrie, l'Irak et la Turquie sur les eaux du Tigre et de l'Euphrate, les deux fleuves-artères de la région, tout en se concentrant sur le rapport de force entre la Syrie et la Turquie.
Il présente les enjeux pour les différents pays et met en avant un processus de négociations « mixte », alternant entre coopération et conflit. Il étudie les variables sur lesquelles peuvent s'appuyer les différentes parties pour accroître leur « position de pouvoir » dans les négociations. Il montre finalement que l'eau sert de catalyseur de conflits complexes sur des sujets très variés.
Nous mettrons ici en avant les grandes idées du texte, en insistant sur les questions liées au développement hydroagricole. Nous montrerons les limites d'une vision qui se contenterait d'être géographique, compte-tenu du contexte historico-politique et des enjeux économiques qui se cachent derrière ce conflit autour de la gestion de l'eau.
[...] Alors que les trois pays annoncent la fin de la construction de plusieurs barrages (Karak aya en Turquie, Al- Baath en Syrie, Qadisiya en Irak, tous sur l'Euphrate), les tensions montent entre eux. En 1987 est signé un accord bilatéral entre la Syrie et la Turquie, celle-ci s'engageant à laisser passer à la Syrie 500 m³/seconde pendant le remplissage du barrage d'Atatürk, représentant une grande avancée puisqu'en vingt ans aucun accord n'avait pu être signé avec la Turquie (p.170). Mais en 1989, la Turquie annonce une coupure totale du débit de l'Euphrate au niveau de ce même barrage, pour permettre le remplissage de son réservoir. [...]
[...] Quoiqu'il en soit, c'est ce contexte historico-juridique qui encadre pour l'instant les négociations entre les trois pays, permettant aux pays aval de se défendre, même si la Turquie n'accepte pour l'instant pas ces réglementations. Négociations et débats essentiels autour de la question de l'eau Les négociations entre les trois pays se sont déroulées entre 1962 et 1992, et elles se traduisent par des discussions bilatérales ou trilatérales, selon les périodes (p.162). Ces négociations ont été interrompues en 1993, mais des discussions entre la Syrie et l'Irak ont repris dès 1997, bien que la Turquie soit toujours défavorable à un accord global sur l'allocation des eaux des deux fleuves (p. 172). [...]
[...] Quels sont les impacts et les conséquences de ce grand projet, à la fois pour la Turquie et pour les riverains en aval que sont la Syrie et l'Irak ? L'impact positif d'un tel projet est la régulation des eaux des 2 fleuves, qui permet d'éviter les inondations en aval et de stocker de l'eau dans les réservoirs pour prévenir les risques liés à une sécheresse soudaine (p. 120). Ce sont surtout les impacts négatifs que relève cependant Daoudy, ainsi que les détracteurs du projet. Les impacts sociaux pour les populations de la zone du GAP sont importants. [...]
[...] Daoudy revient par ailleurs sur les événements climatiques récents, notamment la sécheresse de 1998-2001 qui a entraîné un déficit hydraulique grave en Syrie, et une diminution des réserves souterraines ; cette situation a même entraîné une crise d'eau potable dans la ville de Damas, les pluies abondantes des années 2002 et 2003 ayant permis de rééquilibrer cette situation ( p. 71). L'idée soulevée ici étant la variabilité forte des conditions climatiques : étant donné les grandes variations annuelles, l'utilisation de l'eau des précipitations reste aléatoire. Les fleuves et les ressources souterraines représentent donc une manne importante pour le pays On le verra ci- dessous, cette incertitude sur la pluviométrie a induit une politique active de développement de l'irrigation en Syrie, donc l'objectif est l'atteinte de la sécurité alimentaire nationale. [...]
[...] Le partage des eaux entre la Syrie, l'Irak et la Turquie Négociations, sécurité et asymétrie des pouvoirs, Marwa DAOUDY (2005), CNRS Editions, Paris, 269p. L'ouvrage de Marwa Daoudy a pour ambition d'étudier le long processus de négociations entre la Syrie, l'Irak et la Turquie sur les eaux du Tigre et de l'Euphrate, les deux fleuves-artères de la région, tout en se concentrant sur le rapport de force entre la Syrie et la Turquie. Il présente les enjeux pour les différents pays et met en avant un processus de négociations mixte alternant entre coopération et conflit. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture