Le premier chapitre met en place le décor de tout ce qui va suivre en examinant l'état du monde vers 1500 et analyse les forces et les faiblesses de chacun des pôles de puissance de cette époque: la Chine des Ming, le monde islamique, avec l'Empire ottoman et sa variante indienne, l'Empire du Grand Moghol, et le groupe d'Etats du centre et de l'ouest de l'Europe. La Moscovie et le Japon des Tokugawa sont également décrits, mais plutôt en tant «qu'outsiders», ou puissance minime, notamment par rapport aux florissants et imposants empires chinois et islamiques.
Au début du XVIème siècle, rien ne laissait présager que l'Europe allait s'élever au-dessus du reste du monde. Et pourtant c'est sur cette dernière que s'est développée la véritable puissance à l'échelle de la planète. Mais si organisés et impressionnants que certains de ces empires orientaux aient pu paraître, ils souffraient tous des effets et des pratiques, aussi bien dans le commerce et l'armement que dans la religion. Ainsi, Kennedy insiste beaucoup sur la centralisation de vastes territoires et sur la stérilisation induite par une uniformisation nécessaire à la survivance de ces empires (par exemple les lettrés en Chine, protecteurs d'une certaine tradition).
En Europe, l'absence d'une autorité suprême comparable et l'existence de rivalités et de conflits entre les divers royaumes et Cités-Etats ont constamment stimulé la recherche d'améliorations militaires; d'où une interaction fructueuse avec les innovations technologiques et commerciales qui surgissaient en même temps dans cet environnement propice à la concurrence et à l'esprit d'entreprise. Comme les obstacles au changement étaient moins nombreux, les sociétés européennes sont entrées dans un cycle régulier de croissance économique et de progrès dans l'efficacité militaire qui, au fil des années, allaient les placer à la tête du reste du monde.
[...] Les travaux de Raoul Girardet ont montré que la définition d'un âge d'or (le terme n'est pas utilisé par Kennedy, mais contenu dans le principe même de l'ouvrage) appartient à certaines mythologies politiques qui, s'ils ne sont pas forcément réactionnaires ou extrémistes de droite, n'en peuvent pas moins être réutilisées par ces forces. S'il n'est pas question de douter de la prudence et de la nuance avec laquelle Kennedy développe sa thèse du lien entre économie et puissance stratégique, il demeure possible d'établir une certaine relation avec la pensée de Marx. En effet, les deux auteurs ont en commun de voir l'économie comme une infrastructure permettant le développement de superstructures (le droit, l'art, mais aussi la puissance stratégique pour Kennedy). [...]
[...] La Première Guerre mondiale marque le caractère étroitement lié de la production économique et industrielle aux forces militaires effectives, comme en témoigne l'inefficacité de l'entrée en guerre de l'Italie, le lent épuisement de la Russie et l'aspect décisif de l'intervention américaine. Chapitre La mise en place d'un monde bipolaire et la crise des puissances moyennes». Deuxième partie: 1919-1942 Après 1919, le rapide désengagement extérieur des États-Unis et l'isolationnisme croissant de la Russie bolchevique instaurent un système international dont le décalage par rapport aux réalités économiques fondamentales est plus marqué qu'il ne l'a sans doute jamais été pendant les 500 ans que couvre le livre. [...]
[...] Les intellectuels américains expriment, en choisissant à chaque fois des axes d'analyse différents, le sentiment de risque (pour la puissance économique, pour la puissance militaire et pour la cohésion sociale américaine) que le tournant du siècle comme celui du millénaire ne coïncident avec le déclin. Participent de ce courant des œuvres majoritairement postérieures, que le livre de Kennedy ait facilité leur expression ou que la fin de la Guerre Froide ait à la fois accentué la sensation de perte de repères et libéré la critique longtemps contenue par «patriotisme» ou idéologie dominante. [...]
[...] La vision prospective des États-Unis dévoile un déclin relatif. Une «surexpansion impériale» souligne des fragilités économiques et financières, en raison du poids du militaire sur l'économie et des contraintes du leadership occidental. L'auteur fixe alors comme but aux États unis de faire en sorte que l'érosion relative au pays se déroule de façon lente et régulière. Il s'agit d'un mouvement inéluctable, mais il ne faut pas pour autant l'accélérer. II. Commentaires Présentation de l'auteur Paul Kennedy, d'origine anglaise, diplômé d'Oxford, est professeur à l'Université de Yale. [...]
[...] De plus, cette notion de puissance analysée sous l'angle de l'école du déclin est quelque peu pessimiste. Il ne s'agit pas de donner dans l'optimisme infondé, mais il est possible de concevoir, à l'instar de Hobbes une certaine forme de contractualisation entre des agents mus par une volonté de puissance, l'affrontement perpétuel entre des puissances organicistes n'est pas forcément inéluctable. En reprenant partiellement la conception de Pierre Manent, il doit exister d'autres «formes» de rapport politique que cet affrontement sans cesse renouvelé. [...]
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