On ne traitera pas dans notre analyse de guerres privées, des guerres civiles en particulier. Michael Walzer dans "De la guerre et du terrorisme" rappelle que l'adjectif « juste », quand il s'agit de la guerre, signifie « justifiable, défendable, voire moralement nécessaire au vu des alternatives possibles ». Plus globalement le concept de « guerre juste » désigne une philosophie morale.
Celle-ci vise à se démarquer à la fois du pacifisme – qui condamne également toutes les guerres sans aucune distinction - et du militarisme – qui considère que face à l'adversaire guerrier, plus aucune loi ne mérite d'être suivie. À chaque fois, ces doctrines établissent une distinction entre la morale et la guerre. Au contraire, la doctrine de la guerre juste cherche à réunir l'activité guerrière et la morale.
Certes, ce postulat initial apparait ambigu : comment une guerre peut-elle respecter la morale ? De même, comment la morale peut-elle justifier la guerre ?
[...] La distinction est permise grâce à Gratien qui sépare le domaine séculier des guerres et le domaine spirituel. Dans ce dernier cas, étant donné que la guerre a pour but de punir le mal causé à l'Église ou au christianisme par les Infidèles, l'intervention se fait au nom de l'Église : les hérétiques n'ont aucun droit et la confiscation de leurs biens après la bataille est tout à fait légitime. Ainsi, l'objet des croisades est de récupérer des territoires tombés aux mains des infidèles et de punir les méfaits des musulmans contre les chrétiens. [...]
[...] Guerres justes et injustes Comme le soulignent Gilles Andréani et Pierre Hassner dans l'introduction de Justifier la guerre ? De l'humanitaire au contre- terrorisme, deux phénomènes sont marquants depuis la fin de la guerre froide. D'une part, les interventions militaires internationales, les guerres se sont multipliées c'est ce que l'on a à juste titre nommé le nouveau désordre mondial D'autre part, dans ces nouveaux conflits la morale occupe une place nouvelle, inédite. En effet, les signes sont multiples qui montrent cela ; parmi eux la montée de la justice internationale, l'attention accrue portée à l'observation des lois de la guerre dans la conduite des interventions internationales ou encore les actes de repentance entre États pour s'excuser des fautes du passé. [...]
[...] Enfin, la guerre pour motifs humanitaires est elle aussi considérée comme une guerre juste. En effet, dans certaines situations il apparaît nécessaire d'aller au-delà du droit de non-ingérence pour défendre des populations dans le besoin. La problématique est celle du droit voire du devoir d'intervention face à un génocide ou un massacre. Ainsi, lors de l'intervention au Kosovo, l'action militaire a été qualifiée d'illégale mais légitime par Koffi Annan. De même, selon François Mitterrand l'obligation de non-ingérence s'arrête à l'endroit précis où naît le risque de non-assistance En fait, le point de départ doctrinal se situe en 1987 avec l'organisation d'un colloque, Le devoir d'ingérence. [...]
[...] En Occident, la guerre juste a en particulier été défendue par la religion chrétienne, ce qui apparaît déjà comme paradoxal. En effet, les textes sacrés semblent d'abord exclure le recours à la guerre comme le prouve la célèbre parole de Jésus rapportée dans l'Évangile de Saint-Mathieu qui déclare que tous ceux qui prennent l'épée périront par l'épée La condamnation de la guerre est encore plus marquée que dans les textes sacrés juifs ou plus tard, musulmans qui justifient la guerre sous certaines conditions et prohibent des pratiques condamnables même contre les adversaires couper les arbres fruitiers notamment. [...]
[...] Les guerres sont justes et peuvent donc être justifiées si elles réparent elles-mêmes une injustice. Au XIIIe Siècle, Saint-Thomas-d'Aquin met en forme la théorie dans sa Somme Théologique. D'une part, la guerre défensive, assimilée à la légitime défense est toujours juste. De plus, venir au secours d'alliés attaqués ressort aussi de la conception défensive de la guerre. D'autre part, la guerre offensive pour être juste doit répondre à trois critères : elle doit être déclenchée par une autorité légitime, il faut que ceux que l'on attaque aient mérité par une faute d'être attaqués En fait, c'est le préjudice qu'a causé l'adversaire qui permet d'évaluer en retour le caractère juste de la cause à défendre c'est une guerre punitive Enfin, il faut de la part du belligérant une intention droite, c'est-à-dire avoir en vue le bien commun et ne pas agir par intérêt personnel. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture