La disparition de l'ennemi communiste, avec la sortie de la guerre froide, signe la fin d'une des principales sources de légitimation des opérations militaires. Les Etats sont contraints à puiser dans d'autres registres la légitimation de leurs interventions. Un débat sur la légalité et la légitimité des interventions apparaît sur la scène internationale. En effet, en droit l'emploi de la force n'est acceptable qu'en réponse à l'agression militaire d'un autre Etat. Cependant comme le souligne S. Hoffmann dans l'avant-propos, il ne faut pas renoncer « à fermer les portes du mal ». A partir d'un certain niveau de violation des droits de l'homme, une intervention peut se révéler justifiée, à l'exemple du Darfour. Dans le contexte actuel, la tradition de la guerre juste, d'origine religieuse, connaît une renaissance ainsi qu'une transformation. Comme le souligne P.Hassner « Un univers international fondé sur le règne du droit et sur l'unité ne serait plus un univers international, ce serait un empire ou une fédération mondiale. » La guerre a donc d'autres fondements, elle est désormais humanitaire, préemptive, ou bien contre le terrorisme.
L'ouvrage Justifier la guerre ? présente de multiples points de vue qui permettent d'éclairer le concept de guerre juste, en tentant de conceptualiser et définir les acteurs, les buts et les causes de ces nouvelles opérations militaires, ainsi qu'en analysant le rapport entre légitimité et légalité du recours à la force dans une société où abondent « les pouvoirs sans autorité et les autorités sans pouvoir » et dans laquelle « aspirations à la souveraineté et contraintes de la globalisation coexistent et s'affrontent ».
[...] Ainsi, les efforts pour aider le Timor oriental dans sa transition de colonie indonésienne à celui d'État indépendant n'ont pu être couronnés de succès que parce que l'Australie en a pris la direction de la mission multinationale. Si l'ouvrage Justifier la guerre évoque les différentes mutations des interventions militaires, il s'attarde durant toute une partie sur une en particulier : la guerre contre le terrorisme. A. Roberts replace tout d'abord le terrorisme dans son contexte historique en évoquant la tendance consistant à aborder le terrorisme en négligeant l'histoire en soi. [...]
[...] Bertram l'expression de guerre contre le terrorisme se justifie tout autant que celle de guerre froide Il n'y a pas de limitation géographique (hormis les cas des rogue state et failed state), le but reste insaisissable. À cela, s'ajoute le fait que les États ont perdu le monopole de la force. Néanmoins, les termes ne sont pas les seuls objets de débat, les méthodes employées sont aussi remises en question. Ainsi, A. Roberts critique l'idée qu'il faut attaquer le terrorisme à sa source plutôt que d'y parer de manière défensive. Pour lui, cette conception risque de favoriser un retour à l'impérialisme. [...]
[...] Bertram souligne que la lutte contre le terrorisme est avant tout une alliance pragmatique pour la sécurité plutôt qu'une idéologie. La notion de guerre juste réunit plusieurs types d'interventions : humanitaire, sécuritaire Toutes ne peuvent pas se prévaloir de réelles justifications morales. Les auteurs de l'ouvrage mettent en garde le lecteur d'une vision trop idéaliste et manichéenne des motifs constituant la légitimation d'une guerre. À l'exemple des guerres préemptives : le risque y est appréhendé sur un mode contrefactuel (coût d'une non-anticipation de l'agressivité de l'ennemi potentiel). [...]
[...] Glennon débouche sur une vision négative du droit international, démontrant que ce dernier est tombé en désuétude. On ne peut plus prétendre que l'Article de la Charte des Nations Unies Les membres de l'Organisation s'abstiennent dans les relations internationales de recourir à la violence ou à l'emploi de la force est toujours en vigueur. Pour lui, il vaut beaucoup mieux se fier à la conduite d'un État pour savoir quelles règles il accepte plutôt qu'à ses paroles, comme le confirme l'issue du pacte Briand-Kellogg. [...]
[...] L'expression guerre contre le terrorisme employée régulièrement sur la scène internationale ne fait toutefois pas l'unanimité. Pour G. Andréani, cette métaphore sémantique n'est pas adaptée. Elle marque le changement radical de la doctrine américaine qui après le 11 septembre décide de ne plus aborder le terrorisme sous l'angle du crime avec une force policière, mais sous l'angle de la guerre avec une force militaire. Les terroristes sont pourtant des combattants en infraction avec les lois de la guerre, ils sont des combattants illégaux La dénomination de guerre contre le terrorisme peut faire le jeu de ceux-ci, en les survalorisant. [...]
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