Le piège humanitaire, initialement paru en 1986, est un des premiers ouvrages qui présente un panorama de l'histoire, des acteurs, des situations et des implications politiques de l'activité caritative.
Au travers d'une retranscription historique et géopolitique, Jean Christophe Rufin explique, à partir d'exemples concrets et contemporains, comment se passe dans la pratique la rencontre de l'humanitaire et du politique. Il procède à une série d'études de cas comportant toutes les problématiques de l'aide aux guérillas, l'aide en situation de révolution, l'aide à l'occasion de catastrophes que des Etats tentent d'exploiter Par delà les crises particulières évoquées, c'est le principe d'analyse qui est le véritable sujet : il révèle que les secours d'urgence, dans « des îlots de drame total », sont un extraordinaire enjeu de pouvoir
[...] L'auteur Entré à Médecins Sans Frontières en 1977, Jean-Christophe Rufin effectue de nombreuses missions dans la Corne de l'Afrique, en Amérique Latine et en Extrême Orient. De 1985 à 1987, il est le premier directeur médical d'Action contre la Faim, ouvrant notamment la difficile mission Ethiopie pendant la grande famine de 1985. Il a poursuivi son engagement dans plusieurs organisations, vice-président de MSF puis administrateur de la Croix Rouge Française. Il a également été chargé de mission auprès du Secrétaire d'Etat aux Droits de l'Homme, Claude Malhuret, et conseiller du Ministre de la Défense, chargé d'opérations de l'ONU en Bosnie et au Rwanda notamment. [...]
[...] Un humanitaire d'Etat ? Jean-Christophe Rufin situe l'apparition de l'humanitaire d'Etat en 1986, au moment où le gouvernement de Jacques Chirac crée un secrétariat d'Etat aux Droits de l'Homme (dont il est chargé de mission ) : Claude Malhuret, responsable de cette fonction se rend au Soudan, mais pas en Afrique de l'Ouest où la responsabilité de la France est engagée. L'initiative apparaît donc surtout comme une entreprise de relégitimation du politique, voire une récupération. Mais l'auteur estime que cette expérience a permis de mettre en place un réseau au Quai d'Orsay et a suscité une réflexion au sein de l'armée française. [...]
[...] Elle ne désigne pas la capacité de résister aux pressions militaires et aux manipulations politiques : elle a perdu son sens actif. La neutralité de la diplomatie humanitaire est devenue passive : [ elle] ne modifie pas les rapports de force, elle leur fournit seulement un nouveau milieu pour se matérialiser, et parfois se résoudre. Ce qui est intéressant, c'est le fait que l'engagement des uns et des autres est compatible avec une neutralité globale. Si un front de libération possède une branche humanitaire, le gouvernement contre lequel il lutte peut s'en doter également Neutralité et naïveté Le refus du politique, qui conduit à l'aveuglement involontaire, conduit les organismes neutres à être vulnérables à la manipulation : ils sont involontairement engagés. [...]
[...] La neutralité et le caractère philanthropique de l'action humanitaire respectent en apparence le caractère interne du conflit. Mais cela permet d'apporter aux forces en présence des éléments décisifs pour leur survie L'action humanitaire est une diplomatie L'action humanitaire est une diplomatie : elle ne s'oppose pas à la politique, elle la prolonge par d'autres moyens que la guerre. Elle intervient dans des situations où l'appareil diplomatique se révèle incapable d'assurer une relation efficace entre la communauté internationale et un foyer de crise. [...]
[...] Qu'est-ce que la neutralité ? 1. La neutralité, une fiction précieuse Engagée par nature, l'aide humanitaire est neutre par réputation. Cette fiction apparaît d'autant plus précieuse qu'elle fait de l'action humanitaire un moyen à la fois efficace et acceptable dans les situations de crise. Ainsi, plutôt que de livrer des armes, en Afrique du Sud en juin 1986, les Etats européens ont adopté une solution humanitaire, en octroyant une aide civile aux mouvements de libération. La fiction de neutralité, exploitée par les forces en présence, offre deux avantages : la légitimité médiatique et la notoriété humanitaire sont deux moyens complémentaires pour amorcer la pompe des secours. [...]
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