Alexis de Tocqueville est le premier à avoir pointé la passion de l'égalité (dangereuse pour la liberté) en tant que moteur de la démocratie. Mais, après un XXe siècle effectivement égalitariste, le IIIe millénaire accuse un processus de creusement des inégalités, internationales comme nationales. L'obsession de l'égalité, après la chute du communisme, semble avoir cédé la place à celle de l'identité. La crise des cultures collectives traditionnelles repose à l'individu la question de son inscription dans la société, tandis que le surgissement d'identités nouvelles complique encore l'équation identitaire de chacun.
La géopolitique offre une illustration éclairante et attristante de la vigueur actuelle de la passion identitaire. Selon le politique Jean-François Bayart, de récents « conflits se sont noués autour de la notion d'identité », car les peuples supposent qu' « à une prétendue identité culturelle correspond nécessairement une identité politique, en réalité tout aussi illusoire ». Joseph Yacoub parle d' « un ethnonationalisme étroit et envahissant ». Au-delà du champ géopolitique, c'est tout le corps social que semble affecté par ce phénomène d'autodéfense, plus ou moins agressive.
[...] La question d'une soi-disant population pathologique reste donc ouverte. L'homosexualité remet en question les identités masculines et féminines, loin d'être seulement biologiques. Les rôles familiaux sont brouillés ; l'agencement entre rôles sociaux, types psychologiques et appartenance sexuelle est devenu singulièrement plus complexe. Droit à l'enfant L'enfant est devenu rare, donc plus cher dans les contrées vieillissantes. La famille peu nombreuse est considérée comme l'assurance de bien s'occuper de ses enfants. L'enfant est apparemment devenu le véritable centre de la famille. [...]
[...] Les mobilisations éclatées Les identités politiques traditionnelles et les idéologies qui leur sont associées sont elles aussi en crise. L'effondrement du communisme est la manifestation la plus spectaculaire de cette évolution. Un peu partout dans le monde, le modèle de l'Etat-nation est violemment bousculé. Les nouveaux mouvements recherchent avant tout la médiatisation, et jouent davantage sur les émotions, les sentiments, que sur des valeurs transcendantes. On peut parler d'une mise en spectacle du monde Particularités de l'anti-mondialisme La mondialisation est pleine de paradoxes. [...]
[...] Les anciennes formes identitaires sont sur le déclin. Elles évoluent vers des identités sociétaires collectifs multiples, variables, éphémères auxquels les individus adhèrent pour des périodes limitées et qui leur fournissent des ressources d'identification qu'ils gèrent de manière diverse et provisoire. Les trois pôles de l'identité collective traditionnelle, travail-famille-patrie sont affaiblis. L'Etat n'a plus de pouvoir symbolique, à tel point qu'on en vient à croire et à agir en se basant sur son impuissance. Si l'individu a acquis davantage de marges de liberté avec l'effacement des trois anciennes grandes figures d'autorité, son inscription dans l'univers social s'en est trouvée singulièrement compliquée. [...]
[...] La meilleure solution semble être d'accepter l'autre comme un complément et non une menace, sous peine de se résigner à la sombre perspective d'une humanité en miettes. Bibliographie Amin Maalouf, Les identités meurtrières Benedict Richard O'Gorman, l'imaginaire national : réflexions sur l'origine et l'essor du nationalisme Driss Dadsi (conférence), Particularisme et universalisme: la problématique des identités: rapport du séminaire de Klingenthal (1994) Alfred Grosser, Les identités difficiles (1996) Paul Du Gay, Questions of cultural identity (1996) Alasdair MacIntyre, Libéraux et communautarisme (1997) Charles Taylor, Multiculturalisme: différence et démocratie (1992) Henri Ossobi, Les sociétés pluriculturelles (1994) John Rex, Ethnic minorities in the modern nation state : working papers in the theory of multiculturalism and political integration (1996) Daniel Savas, L'identité nationale et la nation pluri-culturelle (1989) Alain Touraine, Pourrons-nous vivre ensemble ? [...]
[...] Cependant, le travail salarié n'est pas en voie de disparition : sa place devient simplement plus modeste dans les vies. Aristote avait le loisir au rang de dignité sociale : le travail est une peine, associée à l'esclavage. Ensuite, le travail est vu comme un effort en vue d'une récompense, et devient donc acceptable. Il avait donc une forte valeur symbolique et sociale. Puis il a été sujet à contestations, avec la constatation de l'existence de choses plus intéressantes à réaliser durant les périodes de loisirs. [...]
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