Jean-Pierre Chrétien est un historien français né en 1937, spécialiste de l'Afrique des Grands Lacs. Il est également directeur de recherche en histoire de l'Afrique au CNRS. Il a par ailleurs été témoin-expert auprès du Tribunal Pénal International pour le Rwanda.
Précisons que ce texte a été publié en 1985, donc presque dix ans avant le génocide de 1994, qui a marqué une des pages les plus sanglantes de l'histoire du 20e siècle, après les massacres arméniens, ukrainiens, et la Shoah. Jean-Pierre Chrétien tente de remettre en cause l'analyse ethnique convenue qui est opérée sur les sociétés rwandaise et burundaise. L'ethnie doit être considérée dans son évolution chronologique et son élaboration progressive. Elle correspond plus à un phénomène social d'identité héréditaire qu'à une catégorie raciale, image qui s'est pourtant catégorisée en quelques décennies. Pour Jean-Pierre Chrétien, l'ethnicité du Rwanda et du Burundi ne peut s'expliquer que par « une analyse historique rigoureuse », il va ainsi essayer de démontrer quel est le processus qui a « cristallisé des consciences ethniques dans des pays sans ethnies dignes de ce nom ».
Sa thèse est que la colonisation aurait radicalisé les conceptions sociales antérieures, menant au clivage actuel entre Hutu et Tutsi. Il s'agirait en fait d'une conception autoréalisatrice de l'ethnie, dont la définition n'est en fait basée que sur des classifications, issues de critères purement occidentaux. Cela a ainsi débouché sur des visions stéréotypées et manichéennes, niant les histoires spécifiques de ces ethnies qui finalement n'en étaient pas.
[...] Les rapports sociaux ont été cristallisés sur un clivage présenté comme ethnique et les contradictions, transmises aux générations, éclatèrent dès le retrait des Occidentaux. Les théories raciales ou politiques ont légitimé les guerres fratricides par une lutte des classes. [...]
[...] Ainsi, du début à la fin de la colonisation, les négociateurs pensèrent le Rwanda et le Burundi en fonction de l'ethnie tutsi qu'ils avaient eux-mêmes contribué à créer. La critique de la vision racialiste ne se développera que plus tard, dans les 80's, mais trop tard pour pouvoir effacer le poids des perceptions antérieures. II- Une féodalité pseudo traditionnelle : seigneurs tutsi et serfs hutu Un système féodal est un système politique où l'autorité centrale a été affaiblie et où le pouvoir souverain est attribué à des principautés, gouvernées par des seigneurs pour plus de stabilité. [...]
[...] "Hutu et Tutsi au Rwanda et au Burundi" de Jean-Pierre Chrétien Jean Pierre Chrétien est un historien français né en 1937, spécialiste de l'Afrique des Grands Lacs. Il est également directeur de recherche en histoire de l'Afrique au CNRS. Il a par ailleurs été témoin-expert auprès du Tribunal Pénal International pour le Rwanda. Précisons que ce texte a été publié en 1985, donc presque dix ans avant le génocide de 1994, qui a marqué une des pages les plus sanglantes de l'histoire du 20e siècle, après les massacres arméniens, ukrainiens, et la Shoah. [...]
[...] Sous les prétendues inégalités naturelles reposent évidemment des enjeux politiques. Les peuples pasteurs, batutsi, étant dominants, on en déduit qu'ils étaient destinés à régner, d'autant plus que les bahutus, braves mais stupides, se sont laissés asservir (Léon Classe) Une conviction religieuse Dès leur arrivée les catholiques et les protestants se convainquent de la filiation kouchitique (donc asiatique) des dynasties, et la multiplication de ce genre de fantasmes cautionne la politique d'évangélisation par le haut de la hiérarchie injustement établie. La conclusion générale est donc que les Batutsi sont des Hamites, descendants de Cham, Africains supérieurs, donc des faux nègres, venant certainement d'Asie. [...]
[...] Les élites et dirigeants furent formatés par les livres et les pratiques des administrations coloniales, et contribuèrent à l'inscription dans la vie politique de l'équation {noblesse/caste tutsi/race hamitique} d'une part, et {masse du peuple/ethnie majoritaire hutu/race bantoue} d'autre part. De même que, pour Sartre, c'est l'antisémitisme qui fait le Juif, la supériorité tutsi établie fit la soumission hutu. Le problème repose sur la problématique des élites et de leur promotion. Les élites hutues ont pris conscience de leur exclusion et se constituèrent en une élite contre le groupe dominant, appuyé par l'Église catholique, qui va les amener à se penser en tant qu'égaux des Tutsi et vouloir s'émanciper de la tutelle de ces derniers. [...]
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