Le maréchal Hugh Trenchard (1873-1956) fut l'artisan de la Royal Air Force. S'il s'opposa d'abord à sa création, il y vit ensuite un moyen d'ériger la force aérienne anglaise comme une puissance autonome. La Royal Air Force se devait alors de reprendre la suite de l'Independant Air Force, première force aérienne anglaise autonome vis à vis de l'armée de terre et de la marine.
Comme Douhet et Mitchell, Trenchard est partisan de « l'air power ». Selon eux, une nation qui acquiert la domination de l'espace aérien est plus susceptible que jamais de dominer quasiment la terre entière. Ceci tient au fait que l'avion fait rétrécir tous les pays du monde : on ne compte plus les distances en kilomètres mais en heures. Il n'y a donc pas d'endroit à la surface de la Terre que la puissance aérienne ne puisse atteindre. Depuis l'avènement de l'aviation militaire en 1911, les Etats doivent donc se munir d'une force aérienne en conséquence s'ils aspirent à incarner une puissance militaire dans la guerre.
Dans son mémorandum, Trenchard précise la doctrine de l'état-major de l'air anglais ; définit les objectifs de la force aérienne en temps de guerre. Il prône la paralysie des centres de production des munitions de guerre de l'ennemi ainsi que ses moyens de transport et de communication. C'est en ce sens qu'il est le fondateur de la doctrine du « bombardement stratégique ». La conquête de la supériorité aérienne passe par l'offensive menée contre les centres vitaux ennemis. C'est une nouvelle méthode pour atteindre l'objectif de guerre classique, à savoir la défaite du pays ennemi, tout en respectant les principes de la guerre énoncés dans le Jus In Bello. Cette stratégie basée sur l'air s'explique d'abord par le caractère insulaire de l'Angleterre. Plus que toute autre nation, elle doit être en mesure de se défendre contre les attaques aériennes dirigées contre les paquebots qui la ravitaillent. Il en dépend de sa survie. De plus, c'est une stratégie qui a pour avantage d'être peu coûteuse aussi bien économiquement que humainement. De surcroît, Trenchard fait son mémorandum en 1928 : dix ans après l'hécatombe qu'elle a subie pendant la première Guerre Mondiale, l'Angleterre ne veut plus envoyer une armée terrestre conséquente sur le continent. L'aviation stratégique lui permet de rester une force militaire importante sans avoir à dépêcher des soldats en grand nombre. Enfin, détruire l'aviation de l'ennemi dans ses bases et ses usines lui accorde une posture défensive efficace ; détruire ses industries et ses villes par le déploiement de bombardiers lui offre une position offensive et dissuasive à la fois.
Trenchard propose dans cet extrait le bombardement stratégique comme ligne de conduite de l'aviation anglaise et se demande si l'objectif poursuivi, à savoir la victoire sur l'ennemi, sera atteint par un tel emploi de la force aérienne. Il est donc intéressant de voir les justifications qu'il avance pour le choix d'une telle stratégie au dépend d'une tactique aérienne puis de voir comment il envisage d'ériger la Royal Air Force comme puissance autonome.
[...] Et même si l'aviation parvient à toucher les aérodromes ennemis, la perte causée par le bombardement sera vite annulée par une production d'avions qui lui sera toujours supérieure. Trenchard dit : En une journée de raids sur des aérodromes ennemis, on pourrait peut-être détruire cinquante aéroplanes, alors qu'un pays moderne industrialisé en produira cent par jour On peut ici noter que ces chiffres semblent difficilement applicables dans le contexte de la guerre comme le souligne le commandant de l'aviation américaine en Europe pendant la première Guerre Mondiale, William Mitchell. [...]
[...] Enfin, détruire l'aviation de l'ennemi dans ses bases et ses usines lui accorde une posture défensive efficace ; détruire ses industries et ses villes par le déploiement de bombardiers lui offre une position offensive et dissuasive à la fois. Trenchard propose dans cet extrait le bombardement stratégique comme ligne de conduite de l'aviation anglaise et se demande si l'objectif poursuivi, à savoir la victoire sur l'ennemi, sera atteint par un tel emploi de la force aérienne. Il est donc intéressant de voir les justifications qu'il avance pour le choix d'une telle stratégie au dépend d'une tactique aérienne puis de voir comment il envisage d'ériger la Royal Air Force comme puissance autonome. I. [...]
[...] Comme le précise Trenchard, les bombardiers lourds n'étaient pas encore employés, les raids aériens étaient seulement sporadiques et finalement la Grande Bretagne ne pouvait mettre en place que des raids occasionnels [effectués] par des forces réduites En fait, l'aviation n'en était alors qu'à ses prémisses. Elle n'était utilisée comme force militaire que depuis 1911 et la première Guerre Mondiale fut le banc d'essai de l'aviation militaire. Les avions devaient remplir leur réservoir tous les 150 km, soit une faible durée de vol ce qui leur donnait une portée d'action très faible. [...]
[...] L'attaque aérienne de ces cibles est dite l'interdiction indirecte Si Trenchard donne la primauté à ces objectifs militaires, c'est parce que selon lui : C'est sur ces points que l'ennemi est le plus faible En effet, attaquer les centres de transport de l'ennemi l'empêche d'acheminer des armes sur le théâtre du conflit. Cette action aérienne aide donc directement les forces terrestres et navales engagées contre l'ennemi. De plus, attaquer et détruire les lignes de communication ennemies empêche la coordination de ses armées et entrave un commandement cohérent et efficace puisque le lien entre gouvernement et champ de bataille est coupé. [...]
[...] À l'époque où Trenchard tient son mémorandum, en 1928, l'aviation n'en est qu'à ses prémisses et la précision de tir est quasi inexistante. Il le note lui-même : Chaque raid a une porte qui dépasse de beaucoup la zone effective de l'attaque C'est cette caractéristique même qui a permis aux attaques aériennes d'avoir un effet moral destructeur sur les populations et les civils : Les raids [ ] sporadiques eurent un très grand effet En ce sens, les populations ayant déjà vu les répercussions que l'imprécision d'un raid aérien peut avoir sur les villes, n'hésiteront pas à déclencher une alerte au moindre risque d'une nouvelle frappe aérienne. [...]
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