A la fin de sa préface dans laquelle il revient sur les attentats du 11 septembre, Olivier Roy souligne la nécessité de retracer l'histoire du radicalisme politique islamique pour mieux comprendre l'actualité. Cette 'généalogie de l'islamisme' a donc pour ambition de remettre en perspective les rapports complexes qu'entretiennent l'islam et le politique dans notre monde contemporain. Cette relecture historique s'impose d'autant plus que, depuis la chute du mur de Berlin et la soi-disante fin de l'histoire (Fukuyama), le diable islamique représente désormais le mal, l ‘ennemi extérieur dénoncé par Huntington dans sa théorie sur le 'choc des civilisations'
[...] La révolution dans ce pays a d'ailleurs rendu possible un discours sur la démocratisation qui est autochtone et non importé (modèle d'élections propres ayant permis la réélection de Khatami). Un certain nombre de politologues et spécialistes de la question partagent la thèse d'Olivier Roy. Citons Fahrad Khosrokavar, Antoine Basbous et Gilles Kepel. Nous nous intéresserons plus particulièrement à ce dernier, qui s'est appuyé sur la problématique de l'échec et celle du postislamisme énoncées par Oliver Roy, pour conclure de façon virulente à échec d'un modèle devenu désormais un monument historique daté, dépassé et rejeté et non plus une utopie porteuse d'avenir (Jihad. [...]
[...] Dans le monde chi'ite, c'est la théorie de l'ayatollah Khomeyni, et son concept de régence du docteur de la loi qui constitue la forme la plus radicale. Après avoir cassé le système de la collégialité des grands ayatollahs qui était hors de son contrôle, il va donner l'hégémonie religieuse au personnel politique issu de la révolution. Loin de cléricaliser la vie politique, il politise donc la fonction religieuse. On voit donc bien que la logique de l'islamisme radical, derrière l'exigence d'islamisation, est avant tout celle une définition politique de l'islam Après avoir présenté la genèse de l'islamisme, Olivier Roy entreprend une analyse sociologique de ses acteurs. [...]
[...] Il préfère définir le contenu de l'islamisme comme l'expression idéologique de mouvements sociaux et d'une crise identitaire profonde et violente. Loin d'être un épiphénomène, nous n'en avons pas fini avec l'islamisme comme protestation sociale, recherche d'une identité fondée sur un code normatif, faute de véritables racines, mais aussi comme stratégie de pouvoir pour une intelligentsia exclue des avenues du pouvoir Dans son dernier paragraphe (De la démocratie Olivier Roy en appelle à l'intégration des mouvements islamistes dans le jeu démocratique, comme l'ont fait précédemment les catholiques passant du refus de la république à la démocratie chrétienne ou à la laïcité. [...]
[...] Cependant, même s'il en arrive au même constat qu'Olivier Roy, sa grille d'analyse n'en est pas moins différente. Face à une lecture systémique d'Olivier Roy, Gilles Kepel adopte une lecture que l'on pourrait qualifier de générationnelle en lui donnant une assise plus spécifiquement sociale qu'internationale et géostratégique. Transcendant les particularismes nationaux, c'est une identique alliance entre la bourgeoisie pieuse et la jeunesse déshéritée et urbanisée qui aurait, au cours des années 1970 et 1980, permis l'affirmation politique des courants islamistes. [...]
[...] D'autre part, l'Iran a échoué dans sa volonté de centraliser et de diriger le mouvement islamique mondial (les mouvements chi'ites et certaines masses sunnites radicales). Au contraire, la politique iranienne a tout fait pour figer le clivage millénaire entre chi'ites et sunnites (responsable de l'échec en 1980 d'un rapprochement avec les Frères musulmans arabes). Clivage qui s'accroît aujourd'hui avec les mouvements néo-fondamentalistes, viscéralement hostiles au chi'isme dans la grande tradition du fondamentalisme sunnite. Quant à l'action des réseaux des Frères musulmans, alliés avec des milieux saoudiens (soutiens financiers), elle a plus porté sur le culturel et l'éducation que sur le politique (formation et propagande). [...]
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