Journaliste au Monde, Sylvain Cypel a vécu douze ans en Israël dans les années 1960-1970 et y conserve des relations et des souvenirs forts. Envoyé spécial en Israël et Palestine lors de la Première Intifada (1987-1993), il est marqué par l'attitude des deux camps face à leurs histoires, leurs actes et leur enfermement commun dans la posture de la victime, de l'agressé pleinement innocent.
Le concept qui émerge de ce constat et tient lieu de fil conducteur à l'essai est celui de déni. Ce « refus de reconnaître comme vrai un fait, une assertion » correspond à l'attitude des deux camps, les poussant au mensonge face aux populations, à la manipulation des mentalités, notamment par la création d'images, à l'oubli de son histoire, impliquant la montée des antagonismes et le blocage de tout éventuel dialogue et la recherche de solution pour dénouer la crise.
Sylvain Cypel s'interroge sur le processus qui a poussé les Israéliens à emmurer physiquement les Palestiniens (par la construction d'un mur en Cisjordanie) et à s'emmurer eux-mêmes mentalement dans cette position de déni, conduisant à l'impasse politique actuelle. Mais comment aussi, du côté palestinien, le rejet de la constitution en société nationale des Israéliens alimente cette situation de blocage.
[...] Le problème des réfugiés et de la responsabilité d'Israël s'inscrit dans la réalité. Un espoir dans la résolution du conflit naît véritablement avec ce pacte (en complément, voire la carte des frontières et de l'organisation des territoires proposés lors des différentes phases du processus, p7). Néanmoins, la position de déni qui enferme Israël dans l'idée d'une lutte contre un adversaire sans nationalité et d'une absence de responsabilité dans la radicalisation de l'action palestinienne est un frein à toute possibilité actuelle de réconciliation. [...]
[...] Ce mot introduit une idée de désastre, mais pas de défaite. Pour Namzi El-Ju'beh, sa portée est vaste : il empêche la société palestinienne de faire un bilan de ses erreurs puisqu'il représente une idée de non-responsabilité, de plus Israël est présenté comme une sorte d'élément intouchable, insaisissable, les Palestiniens n'ont donc aucun moyen de lutter contre, et enfin, en ne recherchant pas les composantes de la défaite passée, il semble difficile de pouvoir gagner au présent. Comment expliquer, enfin, le manque de mobilisation des Palestiniens face à l'entreprise israélienne d'expulsion en 1948 ? [...]
[...] Il place la force au-dessus de toute considération et adopte une vision d'Israël comme celle d'une terre en expansion. Il planifie l'arrestation et l'incarcération de dizaines de milliers de personnes. On parle d'une guerre contre le terrorisme toujours dans une position de négation de l'existence nationale de l'adversaire. Et c'est surtout ce terme de guerre qui apparaît comme inapproprié à la situation puisqu'il s'agit d'une politique avant tout coloniale, visant à réduire la liberté d'un autre peuple et à prendre possession de son territoire. [...]
[...] Plusieurs actes passés sont d'ailleurs difficiles à révéler : les expulsions de 1948 étaient souvent implicites et n'apparaissaient pas dans des textes officiels. Mais ces nouveaux historiens sont un espoir de lutte contre l'immunisation des étudiants et l'histoire officielle qui leur est imposée. Les prémisses de la recherche d'un récit de passé commun aux Palestiniens et Israéliens permettront d'établir une vision de l'autre dénuée de fantasmes et de préjugés racistes. L'orientalisme et la construction d'une image israélienne pure La pureté des armes est une expression couramment employée en Israël aussi bien par des politiques, des militaires ou des poètes et est significative de cette volonté israélienne de se montrer comme bon et innocent. [...]
[...] Israël différencie ainsi la citoyenneté (Israélienne pour tous) de la nationalité (juive, arabe.). Et comme le déclare Jeff Halper, dirigeant du Gouch Shalom (Bloc de la paix) : La démocratie est réservée à l'ethnie qui détient le pouvoir C'est là toute l'ambiguïté d'Israël, qui se dit démocratique alors qu'elle discrimine 20% de sa population. Ehoud Barak a aussi révélé ce mécanisme du déni de l'autre en 1993, lors des négociations d'Oslo : Il n'y a pas d'interlocuteur niant les propositions présentées. [...]
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