Lorsque Samuel Huntington publie en 1993 son article “The Clash of Civilizations ?” dans la revue Foreign Affairs, c'est en fait en réaction à l'ouvrage de Fukuyama “La fin de l'Histoire” paru en 1992. Ce regard tragique, cette version apocalyptique de l'humanité tranche singulièrement avec l'heureux épilogue de l'aventure universelle imaginé par Francis Fukuyama. Les réactions provenant de tous les continents sont immédiates. C'est alors qu'il décide d'en faire un ouvrage où il développe et enrichit d'exemples concrets son idée centrale d'un “clash” inévitable et sanglant entre les religions telles qu'elles se nourrissent des religions.
Parallèlement c'est dans le contexte de l'après-Guerre Froide où depuis la chute du mur de Berlin et la fin du monde bipolaire, les conflits et les affrontements n'ont cessé d'augmenter, que S. Huntington a écrit “le Choc des Civilisations”. L'auteur qui dirige actuellement l'Institut des études stratégiques d'Harvard a été membre du conseil national de sécurité sous l'administration Carter. Fondateur et l'un des directeurs de la revue Foreign Policy, il possède donc une grande connaissance des relations internationales. Le livre ambitionnait sur le mode de la prospective, de nous exposer quel visage aurait le monde au début du XXIe siècle, quels rapports les Etats entretiendraient les uns les autres. L'auteur cherche à démontrer qu'à l'ordre bipolaire de la Guerre Froide s'est substitué un ordre multipolaire basé sur les civilisations ; il en déduit que le XXIe siècle, sensé être essentiellement religieux, se caractérisera par un affrontement probable des grandes civilisations.
Après avoir, dans un premier temps, essayé de déterminer quelle est la thèse de l'auteur, il est intéressant de suivre le mécanisme de sa démonstration puis de se demander si cette thèse est pertinente...
[...] C'est le cas de la guerre d'Afghanistan (1979-1989), qui oppose l'URSS à l'Afghanistan (soutenu par les USA), et de la guerre du Golfe qui oppose l'Irak au Koweït (soutenu par l'Occident) et qui en définitive se trouvent être des affrontements Islamo- Occidentaux. Les guerres civilisationnelles pour leur part, se caractérisent par des affrontements très violents qui mettent en jeu les questions fondamentales d'identité, et trouvent leurs racines dans l'histoire. On constate que dans les années 1990, les deux tiers des guerres civilisationnelles se déroulaient entre musulmans et non musulmans. Cela s'explique principalement par une prédisposition à la violence, à l'absence d'un Etat phare dans l'Islam et à l'explosion démographique. [...]
[...] Ce sont désormais l'Allemagne et la France qui jouent ce rôle, avec autour d'elles les adhérents à l'UE, mais aussi les membres associés. Le problème de l'Europe est de savoir précisément où elle se termine ; et c'est là qu'intervient la frontière religieuse : l'Europe se finit là où finit la chrétienté occidentale et où commencent l'Islam et l'Orthodoxie. En ce qui concerne le monde orthodoxe la base de son unité est formée par la Russie et l'Ukraine. En Extrême-Orient, la Chine tente de retrouver sa place hégémonique, perdue au cours du XXe siècle. [...]
[...] Alors qu'autrefois les non Occidentaux cherchaient le secret du succès dans les valeurs et institutions occidentales, aujourd'hui ils le cherchent dans leur propre culture. Le renouveau religieux constitue la manifestation la plus puissante d'un rejet de l'Occident. En outre, l'Asie, de part sa croissance économique et le monde Arabo-musulman, grâce à son enrichissement dû au boom du pétrole dans les années 1970, et d'une modernisation (urbanisation, élévation du niveau d'études, intensification des communications et des métiers . vont jouer un rôle important. Ces deux civilisations qui auront des effets déstabilisants sur l'ordre international, vont en effet s'affirmer face à l'Occident. [...]
[...] Enfin, chaque civilisation s'accorde à dire, qu'un monde multiculturel est nécessaire. Pour autant, des dispositions universelles sont présentes dans toutes les cultures, et c'est bien cela qui fonde la coexistence culturelle, c'est-à-dire à accepter la diversité, et à rechercher les points communs. Cet effort contribuerait à atténuer le choc des civilisations, et à renforcer la Civilisation en tant que société civilisée et moderne. Toutefois, en cette fin de XXe siècle, cette Civilisation semble en danger avec le développement partout dans le monde de la violence, de la drogue, du déclin de la solidarité . [...]
[...] Et ce phénomène de retour vers ses racines se produit parmi les civilisations non-occidentales. Les Etats- Nations qui constituent les principaux acteurs de la scène internationale prennent en compte les liens communautaires, c'est-à-dire qu'ils regroupent les individus ayant le sentiment d'appartenir à la même aire culturelle. La politique occidentale sera dirigée vers le maintien d'une hégémonie mondiale en déstabilisant les civilisations hostiles militairement et diplomatiquement, en jouant les uns contre les autres dans un genre d'équilibre des Puissances et en apprenant à vivre dans la diversité. [...]
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