Dans les premières pages de cet ouvrage, Sygmunt Stein témoigne du fait que l'URSS de Staline a ébranlé sa foi dans le communisme, ce qui l'a poussé à aller combattre en Espagne au sein des Brigades internationales, pour la raviver.
Sygmunt Stein est un juif qui, jeune, s'engagea dans le Bund puis dans le mouvement communiste en Pologne où il occupait des fonctions importantes. Mais face à la persécution brutale des mouvements communistes et socialistes en Pologne à partir de 1934, il est contraint de fuir et se rend alors en Tchécoslovaquie, où il dirigea une organisation communiste, le Gezerd. Il participa également à la rédaction d'un journal en yiddish dans lequel il se battait pour combattre l'antisémitisme, répandu au sein du mouvement communiste. Il affirme qu'il effectuait son travail de militant communiste comme une sainte mission, « avec l'aveuglement d'un amoureux et la rigidité d'un bolchévique. » (p.17). En fait, il est profondément communiste puisqu'il croit au projet de Staline d'établir une sorte d'État juif, le Birobidjan, en Sibérie. Ainsi, le Parti voyait en lui « non seulement un leader obéissant, fidèle à la ligne du Parti, mais aussi un travailleur inspiré ». « J'associais très étroitement l'amour de la culture, la tradition juive et les juifs, que je portais au plus profond de mon cœur, à une foi d'airain dans le rôle historique de l'Union soviétique », écrit-il. Par exemple, dans son journal, il montre la grandeur de l'Union soviétique en racontant l'histoire du général juif Yakir, un juif issu d'une famille pauvre qui est devenu l'un des dirigeants bolchéviques grâce au communisme. Mais il commença peu à peu à émettre des doutes sur la ligne du Parti en Union soviétique, il fermait alors les yeux sur les péchés de Staline, et préférait être bercé par son amour de la culture juive, qui aurait bientôt une nouvelle vie au « Pays d'octobre ». Lors des procès de Moscou de 1936, sa foi dans le stalinisme est confrontée aux inquiétudes, notamment lorsqu'il apprend que Zinoviev et Kamenev sont condamnés à mort pour s'être opposés à Staline.
[...] Suite à cela, beaucoup ont été démoralisés, comme George Orwell, et ont alors décidé de quitter l'Espagne de manière définitive. Finalement, pour Stein, le crime le plus odieux de la Russie soviétique est d'avoir détruit la foi humaine, d'avoir rendu les communistes malheureux, terriblement déçus et ébranlés dans leur foi. Nombreux sont ceux qui ont ressenti une profonde désillusion, comme Stein, et qui ont alors eu honte d'eux-mêmes, se considérant comme les bourreaux du peuple espagnol, malgré eux. Ceux qui se sont engagés au sein des Brigades internationales étaient souvent de véritables idéalistes. [...]
[...] Comment pouvait-on encore se réclamer du communisme après avoir commis de tels actes ? Il avoue que la découverte lors des premiers jours à Albacete de trois corps gisants sur leur brancard a constitué son premier traumatisme de la guerre civile espagnole. Bouleversé par la liquidation des opposants politiques, il finit par s'y adapter et pense que ce n'est qu' une conséquence normale de la domination stalinienne sur le cours de la guerre civile.» À partir de ce jour, il commence sérieusement à se détacher en secret de ses illusions communistes. [...]
[...] Mais les Brigades internationales étaient également composées d'anciens criminels, d'anciens légionnaires qui sont rapidement devenus officiers grâce au communisme. En effet, les comités de recrutement, dirigés par les communistes sous le contrôle de l'URSS, mobilisèrent des représentants de la pègre, des bons tueurs, afin de surveiller le comportement des communistes fanatiques qui pouvaient causer des problèmes en Espagne. En effet, Stein explique qu' un communiste reste communiste tant qu'il vit dans un Etat capitaliste et tant qu'il ne voit pas la réalité du communisme. [...]
[...] De manière plus générale, il exagère sûrement quant à la brutalité et à la cruauté des officiers et hauts gradés de l'armée, et concernant la composition des Brigades internationales. Les repris de justice étaient-ils si nombreux ?On peut également penser qu'il exagère lorsqu'il décrit l'anéantissement de la compagnie Botwin, envoyée au front sans armes, ou presque, face à des troupes franquistes extrêmement bien équipées, auquel il a échappé quasiment par miracle. Plus encore, il affirme clairement que Staline aurait saboté la lutte contre les forces fascistes, mais cela est loin d'être validé aujourd'hui par les historiens. Ce témoignage est également empreint de déformations gênantes pour l'historien. [...]
[...] Les rares armes qu'ils recevaient étaient antiques et parfois inutilisables. La réalité de Stein était que les combattants se noyaient dans le sang parce qu'ils n'avaient rien pour se défendre face aux troupes de Franco, bien armées et bien équipées. Par exemple, avant de partir au front, pas un seul homme de la compagnie Botwin n'avait touché une arme et lors du combat, seuls dix vieux fusils furent distribués pour 120 combattants ! Pire encore, la Russie se faisait payer à prix d'or pour ce matériel militaire datant de l'époque des tsars et détournait même les cargaisons d'armes provenant d'autres pays démocratiques (Suisse, Mexique). [...]
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