Auteur de l'Impuissance de la Puissance, Bertrand Badie est né en 1950 à Paris. Professeur des Universités à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris, enseignant-chercheur associé au très prestigieux CERI (Centre Études et de Recherche Internationales), il est depuis 2002 directeur du centre Rotary international pour la paix et la résolution de conflits et depuis 2003 membre de l'association française de science politique et du comité exécutif de l'association internationale de science politique. Bertrand Badie a contribué à établir les Relations Internationales en France comme une discipline à part entière, notamment grâce son cours intitulé 'Espace Mondial' à l'IEP de Paris, qui a fait des émules dans les IEP de provinces et les universités françaises. Cette discipline a longtemps été le monopole des universités anglo-saxonne, où elle s'est forgée ses lettres de noblesse tandis que le continent européen se concentrait sur la sociologie des comportements. B. Badie, ponte des Relations Internationales en France, reste fidèle à cette tradition, mais élargit son champs d'étude à la scène internationale. Avec plus de quatorze livres publiés en une vingtaine d'année, B. Badie est un auteur prolixe qui a contribué, notamment avec l'aide de M.C Smouts, à l'écriture d'ouvrages de référence comme Le Retournement du Monde (1992), l'Etat Importé (1992), ou encore la Fin des Territoires (1995)
L'Impuissance de la Puissance est une réflexion sur les paramètres nouveaux des Relations Internationales et sur la place et l'efficacité du concept de puissance dans ce contexte. Le point de départ de la réflexion de B. Badie est un paradoxe dont les États-Unis sont au centre: jamais un état n'a, dans l'Histoire, accumulé autant de ressources de puissance (économique, militaire, symbolique); jamais pourtant il ne s'est révélé aussi peu capable de maîtriser les enjeux auxquels il doit faire face (terrorisme). La puissance, qui se définit comme la capacité d'empêcher son ennemi et de contrôler son allié est toujours recherchée et cultivée par les états comme si les paramètres des relations internationales étaient restées les mêmes qu'au XIXe siècle.
B. Badie écrit en 2004 dans le contexte d'une guerre américaine en Afghanistan qui s'enlise et d'une guerre en Irak qui laisse dubitatif bien des observateurs sur la possibilité d'une paix proche. Le régime des Talibans avait été officiellement renversé en représailles aux attentats du 11/09. Or est-il légitime et surtout efficace d'attaquer un état souverain en représailles à des attaques d'un réseau terroriste, qui par définition n'a pas de base territoriale? Aujourd'hui encore, l'Afghanistan n'a pas retrouvé de stabilité politique, tout comme l'Irak libre de l'après S. Hussein. Dans les faits la puissance n'est plus aussi efficace qu'elle veut le laisser penser. Elle serait même devenue un facteur de déstabilisation. L'exemple récent de l'attaque du Liban par Israël, officiellement pour lutter contre le réseaux terroriste du Hisbollah, montre que la puissance, aussi grande soit-elle, n'assure pas la victoire, face à des réseaux qui utilisent d'autres tactiques, et qui jouent dans d'autres arènes que les États.
Face à ces démonstrations de puissance, la stratégie de nuisance adoptée par certains acteurs a conduit à la multiplication des attentats à travers le monde, le 11/09/01 à New York, le 12/11/02 à Bali; 11/03/04 à Madrid, le 7 et le 21/07/05 à Londres, sans compter les attentats suicides à Tel Aviv. Dans l'Impuisance de la Puissance, B. Badie nous propose une réflexion sur les moyens de sortir de cette dialectique contre-productive, puissance contre stratégie de nuisance, pour assurer la paix mondiale en prônant l'abandon de la notion de puissance et la construction d'un véritable système multilatéral.
Ce livre est composé de trois parties qui traitent respectivement du passé (I-la puissance d'hier ou l'illusion des gladiateurs), du présent (II-l'impuissance d'aujourd'hui) et du futur (III-le cavalier solitaire prit au piège) des Relations Internationales. Chaque partie est composé de trois chapitres qui traitent de sujets variés et dont je me propose de faire une synthèse.
[...] Dans la Norme Sans la Force, l'énigme de la Puissance Européenne, il démontre que l'Europe se veut une puissance normative, faisant jouer son influence grâce au commerce, au contraire des États-Unis qui affichent leur puissance sous forme matérielle, qui suscite des oppositions frontales. Avec son titre tapageur, l'Impuissance de la Puissance n'est pas un ouvrage de recherche pour les initiés mais un livre de vulgarisation des Relations Internationales, qui va à l'encontre de l'idéologie néo- réaliste dominante dans le monde. [...]
[...] Badie met en avant le non- pouvoir de ceux qui sont trop faibles pour gagner mais assez efficaces pour peser sur les règles du jeu et décider des évènements internationaux Dans la troisième et dernière partie, le Cavalier Solaire prit au piège, B. Badie met en avant les avantages du multilatéralisme pour rétablir un certain équilibre des relations internationales Le multilatéralisme est perçu par les États-Unis comme une entrave à leur action comme le souligne le trait d'esprit de M. [...]
[...] Cette puissance est devenue si grande qu'il n'est plus question de la concurrencer, reste donc à la contester. Il offre une typologie originale des différents types de contestation de la puissance. Le contexte est primordial et il répertorie deux causes majeures de l'émergence de tels comportements: l'échec des aides au développement et surtout la mondialisation de l'information qui joue en défaveur de la puissance, car plus elle s'affiche, plus elle devient la cible des mécontentements. Le premier degré de contestation de la puissance est la recherche de l'autonomie d'une part des acteurs non étatiques qui veulent échapper au contrôle de l'état la puissance étant menacée par cette information déréglée (informations sur la torture) et d'autre par les acteurs étatiques qui veulent protéger leur marge d'indépendance (France, Russie, Chine). [...]
[...] Badie renverse le concept de puissance et la perception qui lui est associée en montrant que la puissance est devenue un facteur de désordre. L'influence remplace la puissance, et l'Union Européenne, qui a du mal à forger une politique de sécurité commune, pourrait bien sans le savoir devenir un laboratoire du post-étatisme. Faute d'imposer sa puissance, l'Union Européenne monnaye sa place sur l'arène internationale en prônant des valeurs humanistes. Si l'influence est moins visible que la puissance, elle n'en est pourtant pas moins efficace dans un monde médiatisé. [...]
[...] En perdant leur ennemi l'URSS, les États- Unis ont perdu une stratégie. Au chapitre la violence sociale contre les États, B. Badie souligne que les caractéristiques de la guerre ont changé. Il ne s'agit plus d'affrontements entre armées étatiques institutionnalisées comme le veut la théorie Clausewitzienne qui définit l'intérêt national comme étant au centre de la discorde. Bien au contraire, les marquages identitaires sont exacerbés. La violence devient une fin en soi, un mode de socialisation, comme ce fut le cas en Sierra Leone. [...]
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