Selon Bertrand Badie, 'le territoire n'est pas un donné, c'est un construit' : son usage comme instrument de l'action politique correspond à une histoire, qui est l'objet de la première partie de l'ouvrage. L'auteur analyse ensuite les crises qui secouent le principe de territorialité depuis une trentaine d'années, puis, dans une dernière partie étudie les modes de régulation possible de cette crise du territoire
[...] Badie explique dans cet ouvrage. J'ai donc trouvé ce livre très enrichissant, notamment parce l'auteur y oublie rarement d'intégrer les limitations de son développement (par exemple à propos de l'histoire du principe territorial) et d'expliquer pourquoi il choisit telle ou telle voie, ce qui est particulièrement convaincant. Agréable à lire, B. Badie n'en est dans cet ouvrage que plus persuasif encore . [...]
[...] Dès lors, le territoire connaît une universalisation qui s'accomplit par un jeu complexe d'importations et d'exportations, par le biais des guerres et des traités de paix, de la colonisation et de la décolonisation (que B. Badie décrit dans L'Etat importé). Ainsi l'instabilité apparue notamment au Moyen-Orient et en Afrique découle-t-elle d'un décalage entre une territorialité officielle, importée par les colonisateurs occidentaux, et les logiques sociales et culturelles d'un monde de solidarités, d'espaces et d'identités qui lui sont propres. Des "crises multiples" . secouent le concept de territoire et la philosophie qu'il sous-tend. [...]
[...] La régionalisation offre des voies de régulation originales. Une construction européenne à plusieurs vitesses permet par exemple une "régulation pluri-spatiale", qui contient et neutralise les crispations nationalistes. Il faut citer également l'émergence de régions du fait d'acteurs privés et liés par l'intérêt économique, comme en Asie. Ces intérêts doivent pouvoir dépasser les conflits territoriaux. De plus, ces régions coexistent avec le maintien d'Etats très différents politiquement, économiquement ou culturellement. L'auteur s'intéresse également au développement des réseaux, générateurs de nouvelles solidarités, qu'ils soient économiques ou culturels, qu'ils s'appuient sur les diasporas ou les ONG. [...]
[...] Badie ne prétend pas traiter le sujet de façon globale et définitive ni rédiger un "manuel" de relations internationales. Au contraire, l'ouvrage se veut un "essai" sur le désordre international et l'utilité sociale du respect. Il s'agit donc bien plutôt d'un livre regroupant des réflexions sur le monde contemporain en termes de territoire, d'Etat, d'individu et d'identité. Bertrand Badie nous offre en effet un tour d'horizon de grande qualité sur l'évolution du territoire et de ses principes constitutifs, en pointant du doigt le problème à mon avis majeur de l'évitement de la responsabilité individuelle dû à la mondialisation en réseaux. [...]
[...] Badie (Bertrand), La Fin des Territoires Introduction Bertrand Badie, sociologue et anthropologue, est actuellement professeur de sciences politiques à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris. Il a beaucoup étudié les rapports entre le pouvoir et l'Etat en Afrique et au Moyen-Orient, ce qui l'a amené à prendre en compte les spécificités de chaque culture dans la construction du politique. Il a notamment écrit Les Deux Etats (1987), Le retournement du monde en collaboration avec M.-C. Smouts (1992), L'Etat importé (1992), Culture et politique (1993) ainsi que Le Développement politique (1994), ou encore Le défi migratoire avec C. [...]
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