Ce livre étudie la perception que la France se fait de l'Amérique, et particulièrement son versant négatif, l'antiaméricanisme français, extrêmement difficile à définir. En effet, l'antiaméricanisme se révèle moins structurel que conjoncturel : en fonction des époques, l'antiaméricanisme est plus ou moins vigoureux. Il dépend du contexte international et de l'image du président américain en France.
Il se fonde avant tout sur l'image française de la réalité américaine ; la période entamée à l'issue de la Seconde Guerre Mondiale illustre ce phénomène : l'antiaméricanisme se fonde alors sur deux mythes, la libération de la France par les Français et le partage du monde à Yalta , qui poussent la France à la sympathie pour l'URSS. Il est vrai que cette période est caractérisée par le lien entre l'antisoviétisme et l'antiaméricanisme, inséparables.
Cependant, on peut trouver des causes plus profondes à l'anti-américanisme, telles que l'habitude française de critiquer ses rivales et leur culture, ou encore l'opposition entre deux universalismes démocratiques. Ainsi, l'importance de l'anti-américanisme sert de baromètre à la vie politique française : quand la France est en bonne santé, elle entretient une bonne image des Etats-Unis, et inversement.
[...] Au niveau juridique, l'admiration pour le modèle américain demeure la norme. Il parait difficile d'appliquer ce modèle en France, ce qui n'empêche pas la fascination pour celui-ci. Il existe un désaccord chez les juristes sur le rôle du président dans ce système, mais ce dernier influence la Constitution de la Vème République : le présidentialisme vient remplacer en partie le parlementarisme (surtout après 1962, avec l'élection du chef de l'Etat au suffrage universel direct), si bien que Maurice Duverger parle de régime semi-présidentiel Enfin, la création du Conseil Constitutionnel (1974) et la régionalisation (loi sur la décentralisation de 1982) semblent pour beaucoup (mais cela reste contestable) être l'application du modèle américain à la française (basé sur le fédéralisme et la Cour Suprême). [...]
[...] Il s'agit, encore une fois, d'un anti-américanisme fortement influencé par le contexte international. Mais, en plus d'être culturel, il devient alors également politique (forte critique du plan Marshall), sous l'égide d'une littérature très critique à l'égard des Etats-Unis ; A. Salacrou, écrivain, parle par exemple d'un peuple robotisé, aseptisé, et sous le règne du dollar. Ceci reflète la crainte de l'extinction de la culture et de la civilisation françaises. Cependant, cette troisième vague d'antiaméricanisme résulte d'une absence de connaissance réelle des Etats-Unis et se base sur les mythes et les stéréotypes américains. [...]
[...] Cependant, cet antiaméricanisme est avant tout culturel (critique de la culture de masse américaine), et extrêmement peu politique. Enfin, la troisième vague débute avec la Seconde Guerre Mondiale. Les Etats-Unis, d'abord, sont liés avec le régime de Vichy, mais ces liens se détendent rapidement, et les actes antiaméricains orchestrés par les collaborateurs se développent alors. De même, bien que la résistance reconnaisse la nécessité de l'intervention américaine, elle souhaite limiter celle-ci (notamment pour des raisons de prestige) et son rôle au sortir de la guerre. [...]
[...] Néanmoins, malgré la pertinence de cette analyse, il semble que celle- ci soit incomplète. Comme nous l'avons souligné, insister sur les raisons davantage sociales et les modes de diffusion au sein de la société de cet antiaméricanisme, en recourant à une méthode comparative plus poussée, aurait permis de mieux l'expliquer, et de parvenir à une définition plus rigoureuse du phénomène étudié. La conférence de Yalta (Crimée) réunissant Churchill, Roosevelt et Staline, mais sans de Gaulle, en février 1945, prépare l'après-guerre et est souvent considérée comme établissant le partage du monde entre les trois principales puissances alliées de la Seconde Guerre Mondiale. [...]
[...] L'Amérique dans les têtes : un siècle de fascination et d'aversion, de D. Lacorne, J. Rupnik et M. F. Toinet, aux éditions Hachette, Paris Introduction Ce livre étudie la perception que la France se fait de l'Amérique, et particulièrement son versant négatif, l'antiaméricanisme français, extrêmement difficile à définir. En effet, l'antiaméricanisme se révèle moins structurel que conjoncturel : en fonction des époques, l'antiaméricanisme est plus ou moins vigoureux. Il dépend du contexte international et de l'image du président américain en France. [...]
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