Selon le sénateur belge Alain Destexhe, « les valeurs modernes universelles sont les Droits de l'Homme, la justice et l'Humanisme. On doit toujours venir au secours d'un peuple en détresse ». Néanmoins, les interventions humanitaires doivent s'effectuer dans le respect des normes. Ainsi, Matha Finnemore analyse le rapport entre normes et interventions humanitaires.
Martha FINNEMORE est professeur de Science Politique et d'Affaires Internationales à l'Université George Washington. Elle est experte en Organisations Internationales, ainsi qu'en éthiques en affaires internationales.
Les idées et les intérêts de Martha Finnemore l'associent au courant de pensée constructiviste, selon lequel le changement est pensé à partir du rôle de l'impact des idées. Ainsi, la norme va définir le comportement des Etats et réguler l'emploi de la force.
L'ouvrage de Martha Finnemore que nous utiliserons principalement pour notre étude est The Purpose of Intervention qui a remporté en 2003 le prix de l'Association Américaine de Science Politique Woodrow Wilson. Dans cet ouvrage, elle constate une évolution de la forme et de la signification des interventions militaires par les Etats. Pour étudier ce changement dans les conduites des acteurs internationaux, elle distingue les différentes interventions militaires en trois catégories :
1. l'intervention dans le but de collecter des dettes
2. l'intervention militaire humanitaire
3. l'intervention pour assurer la paix et l'ordre international
Dans le cadre de notre analyse, nous n'étudierons que le cas des interventions militaires humanitaires. Celles-ci existaient déjà aux XVIIème et au XVIIIème siècles, sous la l'appellation de « guerre ». La définition de l' « intervention » en tant que catégorie militaire autre que la guerre est apparue au début du XIXème siècle, en Europe : « l'intervention implique souvent l'occupation de l'Etat ciblé et l'installation d'un gouvernement entièrement nouveau par la force, actions strictement limitées ou restreintes dans leur objectif politique ». Ces actions ont connu une évolution à partir du début du XXème siècle.
Est caractérisée d'intervention militaire humanitaire, selon Finnemore, toute conduite qu'un Etat a qualifiée d'« intervention » dès le début des activités. De plus, cette conduite doit inclure des actions militaires dont les forces ont dû s'interposer face à une opposition. Finnemore exclut de son étude les interventions visant à protéger des individus suite à un désastre naturel ainsi que les interventions menées par un Etat dans le but de protéger uniquement ses propres ressortissants.
[...] On constate une réelle volonté d'économie de la part des Nations Unies. Ainsi, dans la résolution 872 du Conseil de Sécurité il est précisé qu'il faudrait réduire les moyens de la force totale maximum de la MINUAR, tant dans la planification que dans l'exécution de la mission. Les troupes de la MINUAR sont donc passées, au point culminant du génocide, c'est-à- dire en avril 1994, de 2500 à 270 hommes[14]. De plus, ces derniers n'ont pas le droit d'utiliser la force, même pour protéger les droits humanitaires des populations comme le souligne la résolution 846 du Conseil de Sécurité. [...]
[...] Une intervention humanitaire intéressée ? Selon Martha Finnemore, les Etats interviennent au XXème siècle pour des raisons humanitaires sans attente d'une quelconque contrepartie que ce soit économique, stratégique, financière de la part des Etats prenant part à cette intervention. En effet, selon elle, c'est une des différences majeures d'avec les interventions du XIXème siècle, où à cette époque, tout était calculé dans un but de satisfaire un intérêt national. Or, si au XXème les Etats menaient réellement des interventions militaires humanitaires sans intérêt, pourquoi dans le cas rwandais, dont la nécessité d'une intervention rapide est incontestée étant donnée la gravité de la situation, la communauté internationale n'avait toujours pas réagi de façon efficace face au génocide et aux violations de la loi humanitaire internationale au Rwanda, après sept semaines de massacres et des centaines de milliers de morts ? [...]
[...] De plus, le multilatéralisme permet d'augmenter la transparence des actions des Etats intervenants, ainsi qu'une répartition des coûts de l'intervention (plus le nombre d'acteurs partis à l'intervention sera élevé, plus le coût de celle-ci sera limité). Aujourd'hui, le multilatéralisme s'est institutionnalisé et est une condition sine qua non à une intervention militaire humanitaire. A cela, s'ajoute le fait que l'intervention doit être menée sous les auspices multilatéraux d'une Organisation Internationale, telle que l'Organisation des Nations Unies, ainsi que par des forces multilatérales composées de soldats provenant d'Etats désintéressés On assiste donc à un rejet de l'unilatéralisme et du multilatéralisme stratégique, tel que pratiqués au XIXème siècle. [...]
[...] Au contraire, pour Finnemore, les Etats ne sont plus intéressés depuis que la notion et le contenu des interventions militaires humanitaires, en corrélation avec le contexte normatif, ont évolué au début du XXème siècle. En effet, le but premier recherché par un Etat n'est plus territorial ou stratégique mais humanitaire Finnemore va baser son analyse des interventions humanitaires principalement sur un comparatif entre celles menées au XIXème siècle et celles du XXème siècle. De là, elle va constater que la société internationale a fait évoluer la norme au travers de l'évolution du contexte. Ainsi, à l'orée du XXème siècle, trois facteurs principaux ont changé : 1. [...]
[...] FINNEMORE Martha, Defining national interests in international society, Ithaca, NY, Cornell University Press p Notre traduction. DESTEXHE Alain, Rwanda, essai sur le génocide, éditions complexe, Campin, Belgique p.72. Résolution 929 http://www.un.org/french/ga/search/view_doc.asp?symbol=S/RES/929(1994), accédé le 29 novembre 2007. DESTEXHE Alain, op.cit, p.74. Ibid., p.73. Ibid, p.74. Report on the situation of human rights in Rwanda http://unbisnet.un.org:8080/ipac20/ipac.jsp?session=1W97822D809K 3.90428 &prof ile=bib&uri=full=3100001~!414401~!0&ri=2&aspect=power&menu=search&source=~!h orizon#focus, visité le 29 novembre 2007. Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide http://www.un.org/french/millenaire/law/1.htm, accédé le 29 novembre 2007. [...]
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