En 1995, dans son Supplément à l'Agenda pour la Paix, le Secrétaire Général Boutros Boutros Ghali fait état d'une incapacité de l'ONU à «déployer, diriger, commander et contrôler les opérations» menées contre les «responsables de menaces à la paix», c'est-à-dire dans le cadre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Dès lors, il considère très favorablement le développement de coopérations entre l'ONU et les organisations régionales, qui permettraient d'alléger la tâche du Conseil de Sécurité.
Ces organisations régionales ne sont pas définies de façon stricte dans la Charte. Au contraire, ce n'est pas l'acte constitutif de l'organisation régionale et sa référence ou non au Chapitre VIII de la Charte qui importe, mais plutôt ses capacités et ce qu'elle peut entreprendre avec le Conseil. Toutefois, on entend généralement par organisation régionale toute organisation de trois Etats ou plus créée par un accord international et disposant d'une organisation permanente minimum. Nous excluons ainsi dans le cadre de cet exposé les coalitions ad hoc d'Etats disposés («coalition of the willing»), bien qu'elles puissent tout à fait rentrer dans le terme d'organisations régionales.
Dans ce contexte, comment les organisations régionales peuvent-elles légitimement exercer un rôle en matière d'action coercitive en cas de menaces contre la paix ?
[...] Des organisations régionales mandatées, mais à la légitimité contestée Bien qu'il semble que la proximité culturelle et géographique aille dans le sens d'une régionalisation de l'intervention, toutes les organisations et les pays leaders qui les dirigent ne sont pas également acceptables pour mener des actions coercitives. Elles ne sont pas égales aussi bien sur le plan politique que stratégique, et ce, d'autant plus que l'organisation sera considérée comme un hégémon régional. Cela pose ainsi la question de l'impartialité des forces qui interviennent. (Intervention syrienne au Liban en 1976, Force arabe de Dissuasion, créée par la Ligue arabe). Le problème de l'acceptation se pose également pour l'intervention d'organisations régionales d'autres régions, comme lorsque l'OTAN s'engage au Darfour. D'autres questions quant aux modalités d'intervention se posent. [...]
[...] Le Chapitre VIII de la Charte des NU, Accords Régionaux, définit le cadre d'action légal des organisations régionales concernant la paix et la sécurité et de leur coopération avec l'ONU. D'une part, l'article 52 donne la prépondérance aux organisations pour régler de façon pacifique les différends locaux avant de les soumettre au Conseil. D'autre part, l'article 53 qui nous intéresse tout particulièrement ici, pose deux éléments importants: - les organisations régionales peuvent être utilisées par l'ONU pour «l'application des mesures coercitives prises sous son autorité». Les organisations régionales sont donc des instruments qui doivent permettre à l'ONU de mettre en œuvre sa politique. [...]
[...] D'autre part, les organisations régionales veulent pouvoir déterminer en leur sein les modalités de déploiement de leurs forces. Dès lors se pose le problème de savoir comment l'ONU peut contrôler l'emploi de la force par les organisations régionales déployées sur le terrain. Le risque du dépassement du mandat est avéré, lorsque des organisations se réclament de l'approbation internationale pour la mise en œuvre d'actions qui n'étaient pas envisagées au départ. Dans ce cas, l'approbation du Conseil a posteriori ou la non-condamnation vaut-elle autorisation ? [...]
[...] En 2005 par exemple, l'OTAN décide de la mise en place d'un soutien logistique à une autre organisation régionale, l'Union africaine, dans le cadre de sa mission au Darfour. Ce soutien passe par la formation en matière de commandement, et le transport aérien des troupes. II) Un rôle parfois contesté lorsqu'il n'est plus subordonné à l'ONU Les organisations régionales indépendantes de l'ONU et utilisées par les Etats membres Hors du cadre d'une intervention onusienne, les organisations régionales jouent un rôle en matière de défense des intérêts de leurs Etats membres en matière de sécurité. [...]
[...] Dans ce cas, l'organisation régionale peut devenir un instrument non plus subordonné à l'ONU dans le cadre de la gestion de menaces contre la paix, mais un instrument au service de ses Etats membres menacés dans leur sécurité. L'organisation régionale sert de moyen de légitimation de l'action entreprise- en effet, peu d'interventions coercitives aujourd'hui se font sans le recours à un mandat international car l'organisation est en quelque sorte l'assurance que ce n'est pas l'intérêt propre des Etats qui gouvernent l'intervention. [...]
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