Avec la chute de l'URSS, on assiste à la fin d'une configuration bipolaire de l'équilibre des puissances. Son grand rival disparu, les Etats-Unis (devenus « hyper-puissance » selon le mot d'Hubert Védrines) semblent alors à même de régner sur le monde, à la fois politiquement, culturellement, économiquement et idéologiquement, sans qu'aucune coalition ne semble se former en réponse. La réussite de la Guerre du Golfe qui réunit une multiplicité de pays sous la direction des Etats-Unis, sans grande réaction de la part du reste du monde, apparaît comme la consécration de cette domination politique et idéologique. L'équilibre des puissances semble ainsi rompu, si l'on prend par exemple la définition que le juriste Emmerich de Vattel en avait proposée au XVIIIe siècle : « situation telle qu'aucun pouvoir n'est en mesure d'être prépondérant et d'imposer sa loi aux autres ». Suivant cette définition, la puissance sans contrepoids des Etats-Unis apporte une sorte de démenti au modèle de l'équilibre des puissances telles qu'il a été traditionnellement posé et tel qu'il s'est réalisé de manière récurrente au cours de l'histoire des relations internationales.
[...] Mais il reste que fondamentalement, le modèle d'équilibre des puissances implique une pluralité d'acteurs étatiques, qui pour certains cherchent à conquérir les autres nations, et pour les autres à prévenir les intentions impérialistes de ceux-ci, et ce, essentiellement par la violence, la menace, la contrainte la politique internationale est une lutte pour la puissance dit Morgenthau). Mais la situation exceptionnelle des États-Unis depuis 1989 semble bien contredire bien cette affirmation. Et d'autre part les attentats du 11 septembre remettent en cause cette conception hégémonique des États-Unis, selon des modalités inédites. Avec l'opposition d'un pouvoir non étatique, on semble se retrouver devant une configuration nouvelle des rapports de force entre les puissances, qui oblige à interroger la validité du modèle de l'équilibre des puissances. [...]
[...] En outre, la recherche d'un équilibre des puissances doit aujourd'hui tenir compte des nouveaux facteurs de puissance, hors militaire. Soft balancing : diffusion des modèles social et économique, culture, politique (propagation des droits de l'homme). La conservation du modèle d'équilibre des puissances demande donc à la fois un élargissement de ses cadres classiques tant pour ce qui est des acteurs que des facteurs de puissance. Il semble trop tôt pour l'écarter définitivement, notamment lorsque les États-Unis reprennent le chemin du hard power avec leur intervention unilatérale en Irak et devant la montée de la Chine comme puissance économique et militaire. [...]
[...] Ainsi l'Union Européenne, les organisations commerciales régionales, la puissance du Japon et la montée de la Chine en terme économique comme militaire représentent des pôles secondaires. Ce que certain auteurs interprètent comme le signe d'une multipolarité est également défendu par ses acteurs : D. de Villepin déclarait en février 2003 Nous croyons qu'un monde multipolaire est nécessaire renchéri ensuite par Putin, et la France le prouve au conseil de sécurité de l'ONU quand elle refuse la guerre en Irak. Si les États Unis ne se sentent pas contraints par l'ONU, elle offre au moins une tribune de taille pour la contestation. [...]
[...] La politique externe est liée à la politique interne. En effet, la mondialisation a ouvert l'opinion publique à l'international, et une superpuissance prônant des valeurs démocratiques est contrainte par cette opinion. Cette opinion s'exprime dans le monde entier grâce à la mondialisation de l'information, et l'opinion devient un acteur transnational majeur dans les relations internationales (lobbies à l'intérieur du pays, ONG au niveau mondial ou simplement diffusion d'idées par internet) Cette opinion mondiale est utilisée également par d'autres acteurs transnationaux nouveaux, les premiers à menacer directement les USA au sens réaliste du terme par la violence physique : ce sont les terroristes. [...]
[...] Pour Morgenthau, cet équilibre a pour objet de préserver le statu quo en veillant à ce qu'aucune nation n'impose son hégémonie. Dans un tel système, les états dits faibles peuvent former une coalition pour contrer un élément trop puissant balancing ou se ranger aux côtés du plus fort pour bénéficier de son soutien bandwagoning La persistance du processus de rééquilibrage des puissances au cours de l'Histoire Question : cet équilibre des puissances est-il constant ? Est-il toujours le même au cours du temps ? [...]
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