L'ingérence, c'est-à-dire l'intervention dans les affaires d'un État sans y avoir été invité, est un principe ancien des relations internationales. Mais depuis la fin des années 1980, l'idée d'ingérence s'est généralisée et l'on parle progressivement de « droit d'ingérence », voire de « devoir d'ingérence » qui prend une forme plus contraignante. Or, le droit d'ingérence est l'objet de nombreuses critiques, du fait de l'ambiguïté de cette notion qui ouvre la voie à un vaste champ d'utilisation, mais surtout en raison de sa contradiction apparente avec le principe fondamental de souveraineté étatique.
Hugo Grotius parlait déjà en 1625 dans De Jure Belli ac Pacis d'un « droit accordé à la société humaine » pour intervenir lorsqu'un tyran « ferait subir à ses sujets un traitement que nul n'est autorisé à faire ». Au XIXe siècle, les Européens parlaient « d'intervention d'humanité » lorsqu'ils allaient – officiellement – sauver les chrétiens vivant en Turquie. Mais ce n'est que dans les années 1980 que le concept d'ingérence fut théorisé.
[...] L'ingérence démocratique rappelle en effet un autre combat mené au nom d'impératifs moraux qui, avant d'être une œuvre humaine honteuse, fût une mission civilisatrice ».Les dérives impérialistes de certains Etats occidentaux nourrissent ces critiques, comme l'ingérence des Etats-Unis en Irak depuis 2003 qui révèle des logiques géostratégiques. Alors que la morale internationale »demeure très sélective. Bibliographie - Moreau Defarges P., Droits d'ingérence dans le monde post-2001, Presses de Sciences Po - Bricmont J., Impérialisme humanitaire : droits de l'homme droit d'ingérence, droit du plus fort ?,Aden - Bettati M., Le droit d'ingérence : mutation de l'ordre international, Odile Jacob - Guigue B., Morale internationale ou droit du plus fort Revue internationale et stratégique, 2007/3, 67. [...]
[...] Les mutations du système interétatique mondial, dominé par une institutionnalisation croissante, ont donné à l'extérieur un droit de regard sur l'intérieur Cependant, l'Etat est toujours souverain et il ne peut y avoir d'ingérence que si les droits de l'homme ne sont pas respectés. La souveraineté est donc une construction historique qui doit être constamment redéfinie. Le paradoxe apparent entre droit d'ingérence et souveraineté peut être dépassé en actualisant le concept de souveraineté, à la lumière de l'évolution des relations internationales qui connaissent une moralisation progressive. Cependant, le droit d'ingérence est aujourd'hui une notion controversée, notamment dans les anciens pays colonisés attachés à une souveraineté indépendante. [...]
[...] Mais plus que s'opposer à la souveraineté des Etats, le droit d'ingérence ne conduit-il pas aussi à une redéfinition de la souveraineté étatique ? Certes, il dépasse les définitions traditionnelles restrictives, voire une conception bodinienne de la souveraineté : limitée à l'intérieur par les lois fondamentales et à l'extérieur par les normes du droit des gens. Mais avec le développement de la société interétatique, la ligne de partage conventionnelle entre l'intérieur et l'extérieur des Etats est en constante redéfinition, tel un contrat social en renégociation permanente. [...]
[...] Dans l'ordre mondial, les Etats sont souverains et égaux. Alors que le droit d'ingérence n'a aucun fondement juridique dans le droit international, on assiste à la multiplication des interventions de la part de différents acteurs dans les affaires intérieures d'autres Etats au nom de principes supérieurs comme les droits de l'homme. La Cour permanente de Justice internationale avait également reconnu dès 1928 lors de l'Affaire de l'île des Palmes le droit des Etats d'intervenir sur un territoire étranger pour protéger ses ressortissants lorsque leurs droits fondamentaux ne sont pas respectés Le Conseil de sécurité des Nations Unies lui-même avait exceptionnellement approuvé en 1991 l'aide apportée par la communauté internationale au Koweït, contraire au principe de non- ingérence. [...]
[...] En quoi le droit d'ingérence conduit-il à une redéfinition de la souveraineté des Etats ? L'ingérence, c'est-à-dire l'intervention dans les affaires d'un Etat sans y avoir été invité, est un principe ancien des relations internationales. Mais depuis la fin des années 1980, l'idée d'ingérence s'est généralisée et l'on parle progressivement de droit d'ingérence voire de devoir d'ingérence qui prend une forme plus contraignante.Or, le droit d'ingérence est l'objet de nombreuses critiques, du fait de l'ambiguïté de cette notion qui ouvre la voie à un vaste champ d'utilisation, mais surtout en raison de sa contradiction apparente avec le principe fondamental de souveraineté étatique. [...]
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