Quand la Chine envahit le Tibet

Résumé du document

« Sous peu, les communistes seront à nos portes. Lorsque le moment viendra, nous devrons être prêts à nous défendre. Sinon, nos traditions spirituelles et culturelles seront englouties à jamais. Les monastères seront mis à sac et réduits en cendres, les moines et les nonnes chassés et exterminés. Le peuple sera dépouillé de ses droits et de ses biens. »
C'est dans son testament rédigé en mars 1933 que le Treizième Dalaï-lama rédigea cette vision prophétique. En 1950, la Chine annexait le Tibet, entamant un véritable génocide culturel et religieux. En 1959, le Quatorzième et actuel Dalaï-lama fuyait en exil en Inde, à Dharamsala. Dès lors, les exactions chinoises se multiplient, les violations des droits de l'homme sont un fait quotidien. Mais la communauté internationale semble laisser faire : les intérêts stratégiques sont bien trop importants pour se mettre à dos le géant chinois. Nous discuterons dans ce travail des fondements historiques de la prétention de souveraineté chinoise sur le Tibet. Il s'agit de porter un double regard sur la légitimité de l'annexion chinoise de 1950.

Extraits

[...] La Chine elle, continuait de revendiquer sa totale souveraineté sur le Tibet, jusqu'à l'annexion de 1950 sous couvert de libération pacifique de l'impérialisme étranger (il y avait moins de 10 occidentaux à Lhassa en ce temps-là L' accord en 17 points de 1951, qui déclare l'intégration du Tibet à la Chine a été signé par le Tibet sous menace militaire, les plénipotentiaires désignés n'en étaient pas et les Chinois ont contrefait des sceaux officiels tibétains : autant dire que sa légitimité est des plus douteuses. Il sera d'ailleurs déclaré nul et non avenu par le Dalaï-lama en exil. II) Un peuple tibétain indépendant de fait Lors de l'annexion chinoise, les Tibétains étaient un peuple indépendant de fait. Leur indépendance historique en tant qu'état repose sur l'Édit de 822 Les Tibétains seront heureux en terre du Tibet et les Chinois heureux en terre de Chine qui, gravé sur un pilier encore visible à Lhassa, établissait les frontières entre les deux pays. [...]

[...] La période d'indépendance de fait va de 1911 à 1950. Après la chute de l'empire mandchou (1911), le Dalaï-lama déclare l'indépendance en 1913. Le Tibet possédait alors toutes les caractéristiques d'un état indépendant : des institutions solidement ancrées depuis le VIIe siècle, un territoire, un peuple, une langue, une administration, un drapeau, une petite armée, un chef temporel aussi chef spirituel, émission de passeports, de timbres, de monnaie, et relations avec ses voisins immédiats. Toutefois, en raison des conditions géographiques locales, le gouvernement tibétain ne fit jamais reconnaître officiellement son indépendance par les autres nations, à l'exception de la Mongolie en 1912. [...]

[...] Philippe Picquier - LEVENSON Claude B., La Chine envahit le Tibet, Ed. Complexe - MONIEZ Marc (dir.), Le Tibet, Ed. Peuples du Monde - PICQ Jean, Histoire et Droit des Etats, Paris : FNSP - www.bjinformation.com/ : nombreux articles ; point de vue chinois sur la question du Tibet - www.tibet-info.net : point de vue tibétain Annexes Carte du Tibet et de la région Chronologie des relations sino-tibétaines Accord en 17 points de 1951 Annexe 1 : Carte du Tibet et de la région Annexe 2 : Chronologie des relations sino-tibétaines depuis le XVIIIe siècle[3] 1728 : deux ambans, représentants de l'empereur chinois, s'installent à Lhassa avec pour mission de superviser les relations entre la Chine et son protectorat, le Tibet : accords anglo-chinois : accords commerciaux sur le Tibet non notifiés au gouvernement tibétain : l'expédition militaire du britannique Francis Younghusband franchit la frontière du Tibet sans qu'il n'y ait eu aucune provocation : Entrée des troupes britanniques à Lhassa, d'où le Dalaï-lama s'est enfui pour la Mongolie : Convention de Pékin entre la Chine et la Grande-Bretagne, qui reconnaît la suzeraineté chinoise sur le Tibet 1907 : accord russo-anglais reconnaissant la suzeraineté de la Chine sur le Tibet ; les deux puissances s'interdisent mutuellement d'intervenir au Tibet, qui fait figure d'état-tampon : chute de la dynastie des Mandchoue, les ambans sont déposés : rétablissement du Treizième dalaï-lama dans ses fonctions 1913 : traité tibéto-mongol d'Ourga : les deux pays se reconnaissent mutuellement et s'assurent une aide réciproque 1913 : déclaration d'indépendance du Dalaï-lama 1914 : accords de la Conférence de Simla entre la Grande-Bretagne, le Tibet et la Chine, qui refuse de signer. [...]

[...] Division du pays des neiges en un Tibet intérieur et un Tibet extérieur : proclamation de la République Populaire de Chine, communiste octobre 1950 : les troupes chinoises entrent au Tibet et attaquent la région de Chamdo novembre 1950 : appel du gouvernement tibétain aux Nations Unies. Question soulevée par le Salvador, ajournée sur intervention de l'Inde novembre 1950 : le XVIe Dalaï-lama, âgé d'à peine 16 ans, est investi de son autorité politique et doit traiter avec la Chine 23 mai 1951 : signature de l'Accord en 17 points, intégration du Tibet à la Chine 1956 : actions de guérillas au Tibet oriental (Kham et Amdo) Mars 1959 : soulèvement de Lhassa, fuite du Dalaï-lama en Inde, répression brutale, dissolution du gouvernement tibétain et 1961 : résolutions de l'Assemblée Générale de l'ONU relatives au respect des droits de l'homme au Tibet 1963 : première constitution du Tibet par le gouvernement en exil du Dalaï- lama 1965 : création de la Région Autonome du Tibet le Xichang. [...]

[...] L'expansionnisme chinois est en marche: la Chine revendique déjà sa souveraineté sur des territoires indiens jouxtant le Tibet, le Lakham et le Sikkim sont également convoités. Après la sanglante répression des émeutes urbaines de mars 2008 et la sinisation à marche forcée du Tibet, l'on conçoit aisément que la question du Tibet n'est pas uniquement celle de l'autodétermination d'un peuple de 6 millions d'âmes, mais bien celle du droit à l'existence des nations plus faibles parmi les grandes puissances et de l'intérêt national face à la justice internationale. [...]