Le phénomène non gouvernemental est à replacer dans un contexte particulier : celui de la mondialisation et de l'ère post-guerre froide. C'est en effet au moment où s'épuise la vision bilatérale du monde, à la fin des années 1980, que les ONG connaissent leur apogée médiatique. A l'époque, de nouveaux concepts tentent de saisir la réalité de ce monde en mutation. Ils opposent aux théories néo-réalistes selon lesquelles les Etats demeurent les seuls acteurs pertinents des relations internationales, une théorie de la transnationalité qui rend compte d'une mutation du mode de régulation à l'échelle internationale. Désormais, les Etats et les organisations internationales ne seraient plus les seuls à mettre en œuvre des politiques; à la logique étatique viendrait se superposer une logique multicentrée qui renvoie à la construction d'un espace transnational. Les ONG appartiennent à cette nouvelle catégorie d'acteurs transnationaux dont l'investissement de l'espace public international échappe au déterminisme des Etats.
Les Organisations Non Gouvernementales sont aujourd'hui de plus en plus nombreuses, certaines de plus en plus grandes et leur notoriété n'a eu de cesse d'augmenter. Très médiatisées, à l'annonce d'une catastrophe humanitaire ce sont des acteurs très attendus par l'opinion publique. Paradoxalement leur définition reste floue et débattue, le champ d'étude est encore à approfondir. Cette défaillance en fait un terme libre d'appropriation si bien que derrière le vocable apparaissent des intentions très diverses. Fleurissent ainsi des ONG unipersonnelles ou MONGOs (« My Own NGO »), de vraies entreprises s'abritant derrière un statut juridique associatif pour mieux pénétrer les marchés et de plus en plus de GONGOs (« Gouvernemental NGOs ») c'est à dire des pseudo ONG créées de toute pièce par les Etats (souvent peu démocratiques).
Les ONG se distinguent des Organisations Internationales Gouvernementales par leur composition par des individus et non par des Etats ou des firmes transnationales, se détournant ainsi d'éventuelles activités lucratives.
Devant les nombreuses définitions nous choisirons de nous baser sur celle développée par Philippe Ryfman, dans son livre intitulé Les ONG, qui s'articule autour de cinq composantes caractéristiques :
· Etre de caractère associatif avec la définition d'un idéal ou d'une conviction dans un but non lucratif et tourné vers le bénéfice d'autrui.
· Etre de la forme juridique particulière correspondant au terme « d'association » ou « d'organisation non lucrative » en rigueur dans le pays d'origine.
· Entretenir un rapport avec les puissances publiques comme privées tant au niveau national qu'international mais selon une visée autonome, à savoir que l'Etat ne doit pas être à l'origine de sa création ni la domestiquer.
· Faire référence à des valeurs et avoir une volonté d'action citoyenne dans un cadre démocratique.
· Etre de caractère transnational. (Nous préciserons quand il s'agit d'ONG d'ampleur national, local ou internationale)
Si la définition du terme ONG varie souvent selon les auteurs, ce terme désigne généralement des organisations composées d'individus qui se regroupent volontairement en associations pour poursuivre des objectifs communs et non lucratifs. Aujourd'hui regroupées sous la même terminologie, des organisations de défense des droits de l'homme, des organisations de développement, des associations caritatives, des urgentistes, des défenseurs de l'environnement mettent leurs compétences au service d'un idéal dit « humanitaire » ou de « solidarité » à travers lequel se voient recyclées différentes traditions idéologiques : charité chrétienne, militantisme social-chrétien, tiers-mondisme, internationalisme, humanisme républicain ou environnementalisme. Notons qu'en France, le terme ONG renvoie exclusivement à des organisations de solidarité, contrairement au terme anglo-saxon NGO qui désigne toute organisation qui n'est pas gouvernementale, qu'il s'agisse d'une organisation terroriste ou d'une association de solidarité.
A l'heure actuelle, une multitude d'ONG est ainsi présente sur la scène mondiale et leur action ne peut être ignorée par les Etats. Il s'est en effet constitué un espace d'interaction entre les ONG et l'Etat. Animée par une mission d'intérêt public, l'action des ONG vient croiser l'action publique à l'échelle internationale et nationale. C'est pourquoi, les ONG ont pour réputation de concurrencer l'Etat sur son domaine de prédilection, la politique internationale, mais aussi de transgresser sa souveraineté et sa compétence territoriale. Cependant, les ONG représentent-elles réellement des adversaires ou des rivaux pour les Etats et ont-elles réellement participé au recul de l'Etat sur la scène internationale ? (I) Ou bien travaillent-elles au contraire de concert avec lui ? (II)
[...] Un peu plus de deux mille ONG sont aujourd'hui bénéficiaires de ces statuts. A partir des années 1990, chaque événement mondial, chaque sommet économique, est accompagné par un forum parallèle tenu par des ONG. La mobilisation non gouvernementale n'est pas l'exclusivité de l'Occident; dans de nombreux pays et pour diverses raisons, les ONG constituent aujourd'hui un important secteur d'activités. Le phénomène de l'irruption d'une quantité d'ONG autochtones ne peut cependant être détaché de tout contexte international car leur financement provient en majorité d'organisations internationales, d'ONG ou de gouvernements occidentaux. [...]
[...] Les grandes ONG internationales sont ainsi capables de jouer sur de multiples registres : l'opérationnalité, la revendication, l'analyse géopolitique des conflits internationaux ou infranationaux. Elles seules sont en mesure de géo politiser leurs actions. En outre, la notoriété à laquelle les ONG ont accédé renforce leur position dans les interactions complexes à l'œuvre dans la société internationale contemporaine. Le rôle politique des ONG au moment des grandes conférences internationales, leur faculté d'interpellation des Etats, leur puissance médiatique et financière font que certains les tiennent pour plus influentes ou puissantes que certains gouvernements. [...]
[...] Le potentiel d'influence des ONG s'est accru au cours des dix dernières années. Beaucoup d'entre elles se sont internationalisées et sont présentes dans de nombreux pays. C'est une des spécificités des ONG : leur intervention dépasse les frontières de l'Etat-nation. L' ingérence désigne en effet l'idée de s'insérer dans un espace public considéré comme universel. Leur professionnalisme s'est également renforcé et leurs ressources financières se sont également accrues. Elles ne se contentent plus d'action d'aide et de secours sur le terrain, elles sont aujourd'hui capables d'alerter l'opinion publique et de mobiliser des soutiens par de grandes campagnes de presses. [...]
[...] Ces rapports montrent que les ONG ont des moyens et sont devenues des relais importants. Elles ont un rôle spécifique : elles apparaissent comme des médiateurs, elles produisent du sens en transformant les problèmes en questions politiques, poussant ainsi les Etats à s'en saisir. Mais l'Etat n'est plus le seul acteur des relations internationales et n'est plus tout puissant : ONG / OI / Firmes transnationales /les contraintes de la loi du marché limitent son autonomie Cependant, si les ONG peuvent à terme être des contre-pouvoirs potentiels, il n'est pas dans leur vocation de devenir des adversaires de l'Etat. [...]
[...] Après le départ de l'armée soviétique et la liquidation du parti communiste afghan, la guerre continue avec plus de violence encore ; Kaboul est détruite, les puissances s'en désintéressent et rares sont encore les ONG mobilisées pour le peuple afghan. L'aide alimentaire elle-même n'échappe pas aux choix partisans et à la logique des intérêts dominants, celle du donateur. Les ONG se trouvent affectées à des actions de soutien à la balance commerciale des pays que les Etats donateurs choisissent d'assister. [...]
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