La sécurité est au fondement de l'Etat. Cette idée vient de la théorie développée par Hobbes dans Le Léviathan : l'individu, libre dans l'état de nature, accepte d'aliéner à une autorité supérieure – qui est incarnée par l'Etat – une partie de sa liberté. En échange, l'Etat lui garantit la sécurité. Ainsi, on trouve cette définition de la sécurité nationale comme « une tentative de réduire toute menace visant à dégrader la qualité de vie des hommes dans un Etat, ou de restreindre ses choix politiques. » Cette vision souligne le lien privilégié qui est établit entre l'Etat et la sécurité des individus. Cette définition montre que la souveraineté de l'Etat est la garantie de la sécurité des individus. Dans le contexte du phénomène de mondialisation, la sécurité des individus est un enjeu d'autant plus central que la mondialisation concourt à affaiblir les prérogatives de l'Etat. De manière paradoxale, il apparaît que les pays le plus concernés par la mondialisation (le « nord » économique) sont ceux où la sécurité semble assurée avec le plus de qualité. Faut-il en déduire que c'est en atteignant un haut degré de sécurisation que les Etats peuvent renoncer à une partie de leur souveraineté pour s'intégrer au mouvement de mondialisation ? A moins que la crise de l'Etat ne conduise au contraire vers un renforcement de l'obsession sécuritaire ? L'évolution des perceptions du monde montre clairement que la conception classique de la sécurité, perçue comme exclusivement stato-nationale, est dépassée. En effet, les deux niveaux d'analyse classiques (sécurité intérieure et défense nationale) sont de moins en moins pertinents. Il semble que la sécurité doive s'envisager désormais à tous les échelons, et en particulier aux niveaux individuel, et international. En effet, l'individu et l'espace internationalisé se dégagent comme les deux sphères privilégiées des conséquences de la mondialisation.
Cette concomitance amène à se demander dans quelle mesure la mondialisation conduit à une redéfinition de la sécurité ?
[...] En effet, Internet est un moyen de contourner la loi des Etats. La France interdit la vente d'articles nazis, en revanche ce n'est pas le cas des Etats-Unis. Internet pose des problèmes de décalage entre les cadres juridiques nationaux, et le cadre international où il s'inscrit. Dès lors, faut-il soumettre Internet à des législations nationales, alors que son attrait est justement son internationalité ? Ou bien les Etats doivent-ils renoncer à une part de leur souveraineté nationale au nom de la liberté d'expression ? [...]
[...] Aussi, la légitimité du droit d'ingérence repose encore trop largement sur la domination économique, militaire et technologique de l'Occident pour que celui-ci soit légitimé comme un moyen de sécurisation efficace de l'espace mondial. Aussi, les Etats sont privés du seul outil qui leur aurait permis de dépasser l'horizon de leurs frontières. L'Etat est donc limité face à l'évolution du système international, car il est incapable de transcender ses frontières. La mondialisation promeut l'individu. Elle éclate les groupes naturellement formés par la proximité géographique. [...]
[...] Au contraire, ils menacent souvent cette sécurité. En revanche, ils produisent un sentiment d'identification qui est rassurant pour l'individu. Confronté à son espace, à la fois borné, et à la fois trop étendu, l'Etat est impuissant pour répondre aux nouveaux enjeux sécuritaires. Du coup, il se trouve concurrencé par d'autres modèles d'organisation politique. Ainsi, la Chine amorce un retour vers une logique d'Empire dans la mesure où elle renonce à uniformiser l'ensemble de son territoire sous des lois uniques. Cependant, quelque soient les alternatives au rôle de l'Etat, on constate qu'elles s'inscrivent uniquement dans le contexte d'un Etat défaillant. [...]
[...] Ce seul constat suffit à réaffirmer la permanence du rôle de l'Etat comme acteur sécuritaire privilégié. La mondialisation, en même temps qu'elle conduit à une redéfinition de la sécurité, conduit à une redéfinition de l'Etat, qui doit renoncer à une partie de ses prérogatives pour s'adapter aux attentes de ses citoyens. Bibliographie mondialisation de l'(in)sécurité ? Réflexions sur le champ des professionnels de la gestion des inquiétudes et analytique de la transnationalisation des processus d'(in)sécurisation Cultures & Conflits n°58 (2005) pp.53-100 Didier Bigo •Mondialisation et sécurité internationale. Ordre ou turbulence ? Université de Laval, Québec. [...]
[...] De même, la mondialisation concerne avant tout les pays où la tradition étatique est ancienne. De plus, c'est l'Etat qui est appelé à faire face aux nouvelles demandes de sécurité. L'évolution de la définition de sécurité est réelle, cependant, même s'il est un acteur inadapté pour y faire face, l'Etat reste le prestataire central. On peut envisager que d'autres acteurs se substituent à lui, mais cette évolution doit être tempérée par le fait que l'Etat conserve le dernier ressort. En effet, il est le seul à pouvoir permettre à d'autres acteurs de se substituer à lui, ne serait-ce que parce qu'il détient la seule capacité de mobilisation financière efficace : l'impôt. [...]
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