L'idée est de voir comment, au regard des violences survenues lors du contre-sommet de Gênes, à l'occasion du sommet du G8, les 20, 21 et 22 juillet 2001, les antimondialisation ont été dans l'obligation, afin de rester légitimes, de fixer leurs enjeux et leurs limites. De se repositionner, donc, par rapport à leur identité en contre. Enfin, il s'agit d'observer comment se questionnent, à nouveau, et à fortiori plus radicalement, ces identités face au drame du 11 septembre 2001, alors que l'idée même de bipolarisation est quasi unanimement circonscrite par le phénomène de l'union sacrée
[...] De la même façon, Bernard Cassen, un des responsables de l'association renvoie dos à dos les casseurs et les leaders du camp adverse : Nous ne laisserons pas criminaliser la contestation de la mondialisation libérale. ( . ) Nous refusons d'être pris en otages, tant par des groupes provocateurs que par des autorités politiques. (Libération 16/07/01). Tout le problème à présent réside, pour ces représentants de définir le nous qu'ils emploient. En effet, ils ont du mal et d'autant plus après le drame de Gênes, de comprendre leur identité dans la pluralité. [...]
[...] Nous avons dit précédemment que l'acceptation du terme générique antimondialisation, était pour les militants qui prennent la parole une manière d'apparaître, dans la représentation médiatique, plus uni(e)s malgré le pluralisme de leur mouvement. Or cette unité est difficile à construire, tout d'abord pour la presse ; en effet, la représentation des militants dans la presse passe le plus souvent par des tribunes ou des interviews de personnalité au sein du mouvement. Ainsi, il est à noter que des organisations comme ATTAC ou les Tuniques Blanches, sont pour Gênes et dans la presse les représentants du mouvement par le fait même qu sont ceux à qui les médias donnent le plus la parole. [...]
[...] Il faut noter que l'attention portée au mouvement antimondialisation, si elle est justifiée, comme on a pu le montrer, par l'importance et le poids que prennent les contre sommets, se développe aussi par rapport au climat déjà violent de ces manifestations. On a pu ainsi analyser comment s'opérait un glissement identitaire pour et par la représentation médiatique, au sein même du mouvement, face à cette violence. Il apparaît ainsi, que le drame survenu le vendredi 20 juillet 2001 pendant une manifestation violente, à savoir la mort d'un jeune militant de 23 ans, tué par un carabinier de 20 ans, devient l'événement principal de Gênes et révèle ainsi une certaine complexité identitaire, qui met en péril la position du mouvement antimondialisation. [...]
[...] Le Nouveau Désordre Mondial titrait à nouveau Le Monde à la une du jeudi 27 septembre 2001. La presse a ainsi quasi unanimement analysé les attentats du 11 septembre 2001, comme la fin d'une ère, d'un ordre mondial présupposé. La bipolarisation des acteurs qui a construit cet ordre dans le processus de ce qu'on appelle la mondialisation, s'est trouvé violemment confronté au drame du double attentat perpétré contre les Twin Towers à Manhattan. De fait, la mondialisation en ce qu‘elle est comprise comme unification économique, politique et culturelle et par conséquent comme l'idée d'union à l'échelle mondiale se trouve remise en question face à la violence d'un tel événement : si l'on comprend la mondialisation, comment prendre en considération la désunion ? [...]
[...] Cette violence prévue de longue date est donc l'aboutissement logique d'un processus lent. Elle était attendue et ainsi comprise une fois survenue. Les articles sont si nombreux pour décrire la situation à Gênes avant le drame, que les débordements apparaissent comme attendus. Il ne s'agit pas ici de nier l'émotion suscitée par la mort de Carlo Guilliani mais seulement de montrer en quoi il est plus facile pour le lecteur de rendre intelligible cette mort. Ce point est à mettre en parallèle avec les attentats du 11 septembre. [...]
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