Qualifié de « Big Bang » par Badie, la mondialisation, ce changement radical à l'échelle du globe est le centre phare de la réflexion contemporaine de l'auteur, l'axe principal de ses schèmes théoriques. Ce sociologue des relations internationales, héritier de Aron et comparse de Rosenau est un imminent politologue né en 1950 au Liban. Devenu professeur à l'I.E.P de Paris, il est directeur du Cycle Supérieur de Relations Internationales de Sciences-Politiques ainsi que du Centre Rotary d'études internationales sur la paix et la résolution des conflits (2001-2005)2.Son actualité dans le monde de la presse politique est foisonnante : il collabore ainsi avec Marie Claude Smouts et publie fréquemment des ouvrages clés tels L'impuissance de la puissance ou Un monde sans souveraineté. Pensant la globalisation comme l'abolition des distances due à l'émergence de nouveaux moyens de technologie , Badie inscrit sa réflexion dans un système post guerre froide caractérisé par les interactions croissantes d'une pluralité d'acteurs interdépendants. Dans une telle configuration, les notions basiques d'Etat-Nation et de souveraineté s'en trouve érodées et tendent alors à se muter et à s'adapter. Les enjeux dessinés par cette nouvelle configuration plurielle sont vulgarisés dans un nouveau schéma tangible appelé « le jeu triangulaire ». Cette structure ternaire met en scène une pluralité d'acteurs hétérogènes (privés, subétatiques, individuels, transnationaux) et met en perspective plusieurs niveaux d'analyse (globale, régionale et locale). A travers cette approche alternative des relations internationales, nous verrons en quoi cette structure ternaire dessine un nouvel ordre dynamique au sein d'un système monde en mutations. Nous nous attarderons premièrement sur le caractère singulier et novateur de cette représentation du monde pour ensuite analyser les enjeux et les mutations belligènes induites sur le modèle de l'Etat-Nation et le système international.
[...] Si pour des raisons idéologiques ou politiques un acteur préfère se voiler la face et rester indépendant des autres pour entreprendre des décisions, il peut être certain de son échec. Pour réussir il faut donc être conscient de l'existence et de la concurrence des autres acteurs. Badie n'oublie pas de citer l'Union européenne qui doit (comme beaucoup d'autres unions et organisations) à la fois être forte sur la scène internationale et à la fois défendre les intérêts et entretenir la souveraineté de chacun de ses membres. Il y a interdépendance des acteurs puisque chacun ne peut subsister sans les autres. [...]
[...] Les interactions entre les secteurs, auxquelles Badie accorde la primauté, ont des relations selon lui moins univoques et plus belligènes. La mobilisation contestataire qui s'inscrit crescendo dans un cadre international se manifeste de façon diffuse et hétérogène sur le système. L'échec du développement, la marginalisation d'une partie de la société du fait de la mondialisation et de la régionalisation [14]ont conduit à une extraversion de la contestation sociale et politique, à son orientation, anti-occidentale et à un comportement de défiance à l'encontre de l'Etat Nation Cette tendance à l'exportation de la contestation confère aux groupes identitaires une légitimité non fondée ainsi qu'une apparence de fonction tribunitienne à l'échelle globale. [...]
[...] Il explique ceci par le fait que cette instabilité et ces contradictions sont le fruit du jeu triangulaire entre l'Etat-Nation, les acteurs transnationaux et les entrepreneurs identitaires. Il attribue à chacune de ces représentations une socialisation propre qui entre en opposition avec les deux autres ce qui crée les tensions et les conflits. La question de l'allégeance politique est cruciale pour repérer dans une société donnée les modes d'identification et les usages de l'autorité Autrement dit, si l'individu n'accorde plus son allégeance à l'Etat, ce dernier, comme nous le verrons en seconde partie, perd de sa légitimité pour exercer son autorité. [...]
[...] Il tente de se régénérer en imitant des pratiques qui lui sont régaliennement étrangères et emprunte des normes et des valeurs aux deux autres entrepreneurs. Dans un contexte de prolifération exponentielle de relations internationales l'Etat utilise à son avantage les flux transnationaux et le progrès technologique afin de renforcer ses moyens de coercition et de communication. Un paradoxe s'exprime alors : l'Etat participe à déconstruire malgré lui le dogme de la souveraineté, à se déterritorialiser et à confondre les différents modes de communalisation et de socialisation Par une transnationalisation illimitée, l'Etat participe à défaire fatalement le système international des communautés politiques qui le rendent légitime. [...]
[...] Appliquons-nous à présent à mesurer les enjeux de ce schéma tangible influent et déstabilisateur. II) La crise du paradigme stato-national A' Les effets dysfonctionnels Dans une approche du changement à l'échelle globale, Badie s'intéresse aux mutations issues du jeu ternaire et tente donc, sans user de téléologie, d'aborder l'impact réel de la structure sur le système international. Après avoir abordé l'argument fonctionnaliste (accordant du crédit aux actions des deux autres acteurs, leur trouvant une fonction singulière dans le système), Badie relativise l'impact fructueux du jeu triangulaire. [...]
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