Karachi, violences politiques, Hindous, Sindhis, Mohajirs, Pachtounes, rivalités « sectaire », chiites, sunnites, soufis, politique d’« islamisation »
Karachi est une mégapole de 18 millions d'habitants, qui a la particularité d'être systématiquement classée parmi les villes les plus dangereuses du monde. La violence qui y règne est en effet tout à fait préoccupante : de 1 000 à 2 000 meurtres sont recensés chaque année. S'ajoute un fait particulièrement frappant : un tiers de ces meurtres sont qualifiés d'assassinats politiques par la police. Les violences politiques et ethniques s'imbriquent à Karachi, car l'appartenance ethnique est décisive et détermine généralement l'affiliation politique.
[...] Nous examinerons la logique territoriale de l'imbrication des violences à Karachi. I. Un contexte d'immigration intense, rapide et diverse : les problèmes d'une urbanisation non maîtrisée A. Karachi dans la seconde moitié du XXe siècle : la mère des immigrés En 1947, Karachi est déjà une grande ville, peuplée essentiellement d'hindous et de Sindhis. Cinq ans plus tard, la structure de la population est complètement transformée : la ville compte de musulmans. Durant cette période, l'immigration massive est allée de pair avec un exode des personnes de religion hindoue. [...]
[...] De façon générale, la police est unanimement accusée d'être politisée et de manquer de neutralité. Elle est, à l'heure actuelle, incapable d'enrayer les violences. B. Karachi dans la donne politique nationale et régionale En 2008 les talibans pakistanais prennent le contrôle de la vallée de Swat avant d'être chassés en mai 2009 par l'armée. Les affrontements dans la région provoquent un exode massif et réfugiés s'installent à Karachi. Cet exode pose des difficultés à la ville. La question du risque que des talibans s'y réfugient est particulièrement brulante. [...]
[...] La criminalisation de la politique municipale A. Confrontation entre mafias de quartiers et autorités municipales L'appartenance ethnique et religieuse est le principal déterminant de l'affiliation politique à Karachi. Les conflits politiques sont donc directement des conséquences des rivalités ethniques. Mais dans le même temps, les partis attisent et manipulent les ressentiments ethnicoreligieux au service d'enjeux de pouvoir. Les quartiers les plus pauvres constituent un bastion pour le parti Mohajir MQM (Mouvement national uni) fondé dans les années 1980, qui détient actuellement le pouvoir. [...]
[...] La première forme de violence y est bien souvent crapuleuse. Mais il est d'autant plus facile de racketter les membres des groupes minoritaires qu'ils ne disposent pas de soutiens politiques. La conséquence est la constitution de ghettos parsis ou hindous, sortes d'ilots dans la ville qui permettent aux habitants de se protéger de ce type de violence. Le quartier de Naraïnpura par exemple, abriterait une population de habitants. Il est comparable à un ghetto dans la mesure où il est presque complètement fermé. [...]
[...] Ces violences ont des causes multiples, mais sont très imbriquées. Et le parti au pouvoir a tout intérêt à entretenir les tensions communautaires. L'urbanisation de la ville n'a pas été pensée : elle est surtout le résultat d'une logique de guerre de territoires résultant dans la ghettoïsation des communautés les plus faibles. Pour ne rien arranger, de nombreuses armes circulent, conséquence des guerres successives en Afghanistan. Boivin (2001) en conclut que l'évolution tumultueuse de la ville est paradoxalement liée à sa réussite : le dynamisme économique qui caractérise toujours Karachi, et qui en fait un pôle d'attraction est aussi ce qui attire le banditisme. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture