La Méditerranée n'a jamais été une barrière : très tôt, la France et les pays proche-orientaux développaient ainsi des relations commerciales, politiques et culturelles. La proximité géographique a bientôt contribué à la fabrication d'une proximité historique et culturelle entre les deux régions. C'est ce qui explique, en partie, l'intérêt que la France porte au Proche-Orient, qu'elle a tendance à considérer comme sa chasse gardée. A cela s'ajoute la question sécuritaire et la volonté d'assurer une paix sociale intérieure à la France, où les minorités arabes et musulmanes sont importantes.
Or, en 1991, avec la fin de la Guerre froide, et alors même que le monde arabe sort affaibli et divisé de la guerre du Koweït (2/08/1990 - 3/04/1991), le Proche-Orient est, plus que jamais, une région de première importance pour les puissances occidentales : c'est là que se joue le contrôle des routes stratégiques de l'énergie, c'est là qu'on trouve les réserves de pétrole les plus importantes, c'est encore là que se situent les Lieux saints des trois religions monothéistes... Aussi, les Etats-Unis se sont employés, avec succès, à renforcer leurs positions dans la région, tandis que la France, après avoir perdu son allié irakien, se trouve marginalisée lors de la conférence de Madrid.
[...] Quel est son poids face aux Etats-Unis ? . ) Mais aussi en terme d'alliances (rapprochement avec les Etats-Unis, action dans le cadre de l'UE ou non, dans celui d'un partenariat euro-méditerranéen ou non . Schématiquement, on pourrait établir les ruptures suivantes : d'abord, de 1991 à 1996, une France affaiblie au Proche-Orient, et qui se tourne en conséquence vers un partenariat euro-méditerranéen ; puis une période que l'on pourrait arrêter symboliquement en 2003, pendant laquelle on revient à une politique arabe rénovée, synonyme de volonté d'affirmer la France comme un acteur-clé au Proche-Orient, où sa popularité s'explique par son indépendance vis-à-vis de la position pro-israélienne des Etats-Unis et atteint de ce fait son apogée avec l'opposition à la guerre d'Irak ; et enfin, une période où la France observe un rapprochement avec son concurrent d'hier, Washington, et avec Israël, tout en relançant le processus de Barcelone. [...]
[...] La France conserve cependant une réelle capacité à jouer un rôle majeur au Proche-Orient, par exemple lorsqu'elle refuse de légitimer une opération militaire comme en 2003. Mais avec une UE dont le tropisme pro-américain s'est accentué, depuis l'adhésion des anciens pays communistes, cette marge de manœuvre est encore réduite. On pourrait donc être tenté de croire qu'avec l'arrivée d'un Président proaméricain au pouvoir en 2007, la France, confrontée à la difficulté de contredire Washington, aurait observé un alignement total sur les Etats-Unis au Proche-Orient. [...]
[...] Cependant, on ne comprendra rien à la présence renouvelée de la France au Proche-Orient et à ses positions proarabes si l'on oublie l'importance de la rivalité avec les Etats-Unis. Car la France cherche à tout prix à se démarquer des Etats-Unis, ce qui ne constitue pas véritablement une rupture avec la présidence de Mitterrand si l'on se souvient des efforts français pour parvenir à une solution politique lors de la deuxième guerre du Golfe. Jacques Chirac marque ainsi sa différence avec Washington à plusieurs reprises : lors de la crise libanaise (avril 1996), puisque les Etats-Unis avaient apporté leur soutien à Tel-Aviv ; lors de la signature de la loi d'Amato-Kennedy (août 1996) ; ou lorsqu'il annonça le retrait français de Provide Comfort (décembre 1996). [...]
[...] La France renoue avec un discours plus proarabe bien que raisonnable et équilibré, fournissant un élément de rééquilibre face à des Etats Unis franchement pro-israéliens. Ce message est d'autant plus séduisant aux yeux des dirigeants et des populations arabes que Jacques Chirac, lui, est personnellement hostile à Israël. Sa popularité devint telle que certains enfants palestiniens reçurent bientôt le nom de Chirac, et que ce même nom fut donné par des marchands du Caire, pendant le ramadan de 2003, à leurs meilleures dates (conséquence de la position française contre la guerre en Irak). [...]
[...] Cependant, la France n'essuie pas les mêmes échecs dans tous les pays du Proche-Orient. Au contraire, les relations franco-libanaises connaissent alors un nouvel élan, après le traumatisme de l'affaire des otages et l'épisode du général Aoun. Avec la guerre du Golfe, les prémices de la guerre de Bosnie et la fin de la guerre froide, la place du Liban dans la politique étrangère de la France s'était réduite au profit d'une coopération scientifique et culturelle. La France souhaite alors normaliser ses relations avec le vieil ami, et profiter de la reconstruction libanaise. [...]
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