La thématique du déclin français sur la scène internationale est une inquiétude assez ancienne qui existait déjà aux XIVe et XVe siècles, lorsque les désolations de la guerre de Cent Ans ont réactivé le mythe de la chute de Troie. C'est néanmoins en 1870, après la défaite contre l'Allemagne et la perte de l'Alsace Lorraine, qu'elle s'est enracinée dans le débat français.
Tout au long de la Ve République, un débat sémantique teinté d'idéologie a ensuite opposé les responsables politiques sur la place tenue par la France dans le monde : «puissance de premier rang » pour de Gaulle, elle n'est plus qu'une « puissance moyenne » selon Valery Giscard d'Estaing en 1975, et pour d'autres une « puissance moyenne majeure ou une « superpuissance moyenne ».
Trancher parmi ces querelles de termes implique de s'interroger sur les moyens dont dispose encore la France pour exercer une ambition internationale, non seulement sur le plan de sa puissance elle-même, mais également sur le rôle qu'elle peut jouer en tant qu'acteur. En réalité, il faut voir que si la France est bien une puissance d'influence mondiale fragilisée, son champ d'action dépend en réalité surtout de son aptitude à exploiter l'action multilatérale dans laquelle elle doit s'inscrire.
[...] Néanmoins, le délitement de la Françafrique s'explique également par le rôle accru qu'entendent jouer de nouvelles puissances depuis la même période, et qui ont ainsi amplifié le mouvement. Dès 2002, les Etats Unis se sont rapprochés du Golfe de Guinée par intérêt stratégique pour ses hydrocarbures. Leur présence s'explique aussi par leur certitude que le Sahel est une base arrière du terrorisme islamiste. La Chine et l'Inde rejoignent cette conquête du continent africain non seulement en prenant des marchés aux firmes du BTP français, mais aussi en convoitant certaines matières premières comme le manganèse ou le pétrole gabonais. [...]
[...] Dès 1986, les sommets de la francophonie ont permis à la France d'affirmer un rôle de leader des pays pauvres. La charte de la francophonie adoptée ainsi à Hanoï en 1997 rappelle l'exigence de démocratisation et de respect des droits de l'homme, et dès 1992 Bourguiba (alors secrétaire général de l'OIF) évoque la francophonie comme une organisation des non-alignés Reste enfin à évoquer le multiplicateur de puissance que représente l'Europe dont la France est traditionnellement un pilier. Dans les années 1990, cette dernière à permis à la France de fédérer un mouvement autour de quelques débats emblématiques, comme la résistance aux lois Helms-Burton ou d'Amato qui voulaient qui interdire à tout pays de commercer avec Cuba, l'Iran ou la Syrie, ou encore la nécessaire définition de conditions à la fusion entre Boeing et Mac Donnel. [...]
[...] La France pensait pouvoir décider souverainement de procéder à des essais supplémentaires parce qu'elle l'estimait nécessaire et qu'elle voulait manifester sa puissance à travers la force nucléaire. Or, dès les années 1990, il n'est plus possible de mener durablement une politique jugée illégitime par le reste de la communauté internationale sans payer un lourd tribut. C'est ainsi à cause de l'ampleur des réactions, de l'Asie jusqu'à l'Amérique latine en passant par l'Europe occidentale, la France a du réduire le nombre d'essais prévus (de huit à six), les terminer deux mois plus tôt, et donner des gages en matière de désarmement. [...]
[...] Sur tous ces sujets, la France gagnerait à surmonter ses contradictions car elle aspire en même temps à une meilleure protection européenne pour venir au secours des originalités françaises. Ainsi, une enquête Eurobaromètre de mars 2006 révèle que 54% des Français considèrent que l'U.E permet de mieux lutter contre les effets négatifs de la mondialisation En définitive, dès lors qu'elle consent à ne pas être la superpuissance qu'elle fût du XVIIe au XIXe siècle, la France est certaine d'appartenir au club fermé des puissances d'influence mondiale qui peuvent encore entretenir des ambitions internationales. [...]
[...] Sur son continent, elle demeure aux côtés de l'Allemagne un des fondateurs de l'Union Européenne et par la même un créateur d'initiatives. C'est en jouant sur ces différentes échelles qu'elle peut donner de la voix, comme l'a montré en 2002 son opposition à la guerre en Irak : sa position aurait été impossible à tenir si elle n'avait pas eu l'appui de l'Allemagne et d'autres pays européens, mais aussi de la Russie au Conseil de Sécurité et d'une majorité d'autres Etats à l'ONU. [...]
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