Le préambule du Traité instituant une Constitution pour l'Europe du 16 décembre 2004 consacre la détermination originelle des Etats européens à s'unir « d'une manière sans cesse plus étroite » en oeuvrant « pour la paix, la justice et la solidarité dans le monde ». Ce principe fondamental qui sous-tend la construction de l'Union s'inscrit en opposition sous-jacente à l'organisation politique des Etats-Unis que les Européens qualifient d'impériale. Cette conception de l'ordre mondial n'est pas sans rappeler aux Européens leurs expériences coloniales antérieures, et est accueillie globalement comme une menace pour l'équilibre politique international. Ce désaccord entre Vieux Continent et Nouveau Monde est néanmoins encadré par la nécessité pressante de s'entendre sur une vision commune de l'organisation politique de la planète. L'enjeu en est la présentation d'un modèle occidental cohérent face à la menace islamique naissante.
Dès lors, les analystes contemporains s'interrogent sur la forme politique que prendra l'Occident de demain. L'idéal américain d'une organisation « impériale » du monde s'effacera-t-il, au profit d'un modèle européen d' « union » mondiale ? Afin de répondre à cette question, il est utile de s'interroger au préalable sur la vocation de la forme impériale à disparaître.
Une réflexion préalable sur les nuances que revêt cette notion d' « empire » au XXIème siècle est indispensable afin de préciser ce que les Européens entendent par ce concept en l'attribuant aux Etats-Unis. Ce travail de définition conditionne l'étude des facteurs qui peuvent conduire au déclin de la forme impériale, et des alternatives qui se présentent pour l'avenir. Enfin, reste à considérer l'idée de « vocation » de la forme impériale à disparaître, en rappelant que la liberté des sociétés dans la détermination de leur ordre politique les place aujourd'hui face à des choix déterminants pour leur avenir.
[...] Du choix solidaire des deux grandes puissances occidentales vers une attitude ou vers l'autre dépendra le déclin de l'impérialisme américain ou sa consécration. A ce titre, la fin du mandat de George Bush pourra constituer un tournant déterminant de la politique américaine et montrer l'instabilité d'une vision politique impériale dans un régime démocratique. Deuxièmement, la réponse apportée aux défis de l'énergie conduira les Etats-Unis à trancher entre le choix d'un autoapprovisionnement en hydrocarbures rendu possible par les nouvelles technologies, ou la nécessité d'accroître leur influence dans la péninsule arabique. [...]
[...] La forme impériale est-elle vouée à disparaître ? Le préambule du Traité instituant une Constitution pour l'Europe du 16 décembre 2004 consacre la détermination originelle des Etats européens à s'unir d'une manière sans cesse plus étroite en oeuvrant pour la paix, la justice et la solidarité dans le monde Ce principe fondamental qui sous-tend la construction de l'Union s'inscrit en opposition sous- jacente à l'organisation politique des Etats-Unis que les Européens qualifient d'impériale. Cette conception de l'ordre mondial n'est pas sans rappeler aux Européens leurs expériences coloniales antérieures, et est accueillie globalement comme une menace pour l'équilibre politique international. [...]
[...] De plus, la forme impériale fait aujourd'hui l'objet de résistances qui mènent à son déclin. Au concept d'empire, les Etats de l'Union Européenne tentent d'opposer un ordre juridique supranational fondé sur le traité. Cette paix mondiale aux yeux des Européens s'incarne dans une institution internationale centrale, l'Organisation des Nations Unies. L'acceptation des Etats-Unis de nombreuses décisions de l'ONU, en dépit de leur réticence initiale, laisse entrevoir la possibilité d'un compromis avec les Etats européens sur l'idée d'un ordre mondial alliant codécision et respect des souverainetés nationales. [...]
[...] Comprendre la signification actuelle du concept de forme impériale impose donc au préalable d'en appréhender la dimension historique. De la création du premier empire, formé à Rome en 27 av. JC, à la capitulation du Japon impérial le 2 septembre 1945, les empires se sont succédés sous des formes diverses. L'empire romain, et à sa suite le Saint Empire Romain Germanique, constituèrent le premier exemple d'un rassemblement d'Etats sous une autorité dominatrice, par souci de paix politique. La notion d'empire acquit par la suite une dimension économique, lorsqu'au XVIe siècle le développement du commerce international incita les puissances européennes à se bâtir un empire colonial en vue d'en exploiter les ressources. [...]
[...] Les Etats-Unis constituent aujourd'hui un des derniers bastions impériaux, mais leur influence semble vouée au déclin en raison de l'émergence d'un ordre politique mondialisé, limité par un principe de non-ingérence. Les Etats- Unis conservent toutefois encore une autorité indéniable sur leur sphère de contrôle, dont l'affaiblissement prochain dépendra de la réponse apportée à trois questions d'actualité récurrentes en Occident. La première porte sur l'attitude que les Etats-Unis et l'Europe doivent adopter face à la menace terroriste grandissante. Si l'Union Européenne semble privilégier la voie diplomatique et le biais du renseignement, les Etats-Unis ont démontré leur désir d'envahir les Etats du Moyen Orient en y diffusant leurs valeurs démocratiques par la force. [...]
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