Au début du 20ème siècle, le Sénateur américain Albert Beveridge déclarait : « Le destin nous a tracé notre politique : le commerce mondial sera à nous. La loi américaine, l'ordre américain, s'implanteront sur ces rives jusqu'ici sanglantes et plongées dans les ténèbres de l'ignorance mais qui deviendront bénies et heureuses sous l'action des forces de Dieu ». Cette déclaration apparaît bien prophétique aujourd'hui, surtout depuis la fin de la Guerre Froide qui a marqué la consécration de la puissance américaine. Mais cette puissance, réelle, s'accompagne de fortes résistances de la part du monde dans son ensemble. Les formes radicales de l'anti-américanisme – hors terrorisme – se manifestent par exemple aujourd'hui avec la défense de l'exception culturelle, la critique des OGM et d'une science asservie à l'impératif de profit. Les attaques en règle contre la mondialisation, avec le dogme de l'ouverture des marchés, la sanctification des multinationales et l'appel à un désengagement de l'Etat, se lisent comme l'incarnation du modèle américain, haï par les anti-mondialistes. Les rapports entre américanisation du monde et mondialisation, à première vue évidents, apparaissent de plus en plus complexes. Ils constituent une source de frustrations et de tensions pour ceux qui ressentent la puissance américaine comme une puissance hégémonique « globale ». Notre note tentera dans un premier temps d'expliquer pourquoi la mondialisation apparaît si logiquement comme une extension du modèle américain. Ensuite, nous mènerons une analyse critique des interactions complexes entre l'anti-américanisme et le processus de mondialisation.
[...] Jean-Marie Guéhenno, Américanisation du monde ou mondialisation de l'Amérique ? in Politique étrangère, 1/99. Robert Reich, L'Economie mondialisée, Dunod In Paul Kegan, Understanding media : the extension of man, Routledge Joseph Nye, Soft power Foreign Policy, Automn 1990. Janet Finkelstein, La quête du world dominance : vers un empire global et non territorial in Revue française de géoéconomie, été 1997. General Electric est le plus grand conglomérat américain et l'une des 5 premières entreprises mondiales par le chiffre d'affaires, le taux de rentabilité et la capitalisation boursière. [...]
[...] Les déclarations indiquées ici sont extraites d'une interview accordée au journal Le Monde le 3 octobre 2001. Cité dans Le Monde octobre 2001. Fouad Ajami, Stranger in the Arab-Muslim world in The Wilson Quarterly, Spring 2001. Georges Duhamel dénonce dans Scènes de la vie future le machinisme américain une civilisation d'insectes Denis Lacorne, The barbaric Americans in The Wilson Quarterly, Spring 2001. Interview d'Hubert Védrine dans Europe Magazine, juillet 2000. Dans le Point septembre 2001. Stanley Hoffmann est Professeur de civilisation française à Harvard University. The Wall Street Journal octobre 2001. [...]
[...] Elle tombera probablement victime de ses excès L'anti-américanisme intellectuel européen et le rôle des mouvements antimondialisation dans l'équivalence antimondialisation/anti-américanisme L'anti-américanisme n'a rien de neuf. C'est une attitude de rejet d'un peuple et de ses symboles qui fonctionne comme toute autre idéologie discriminatoire. Cette idéologie a pour caractéristiques de dénigrer l'Amérique et ses actions, de stéréotyper son peuple et ses dirigeants en refusant presque de les voir comme des êtres humains, et d'accuser l'Amérique d'être seule responsable des malheurs du monde. En premier lieu, notons que l'anti-américanisme est une constante dans la vie politique européenne. [...]
[...] Les Etats-Unis divisent les Européens car ils offrent un système de valeurs universelles qui sert tantôt de modèle, tantôt de repoussoir. Avec la dénonciation des multinationales dans les années 60 déjà, puis l'épisode de la guerre du Vietnam, dans les années 70, on peut retrouver à chaque époque une variante du sentiment anti-américain. Mais il existe des formes plus viscérales, particulièrement chez les intellectuels. Dans son Introduction à la Métaphysique (1952), Martin Heidegger évoque l'Europe broyée par les pinces de la grande tenaille avec d'un côté la Russie, de l'autre l'Amérique Le philosophe allemand dénonce à travers l'Amérique le monde du matérialisme, l'univers de l'uniformité, de la décadence de l'esprit, dont le seul aboutissement est la castration de l'esprit et l'invasion du démoniaque A la même époque, Emmanuel Mounier, fondateur de la revue Esprit dénonçait les Etats-Unis comme le pays le plus immoral du monde, asservi au pouvoir de l'argent qui lui tient lieu d'âme L'Amérique était pour lui une barbarie qui menaçait toute civilisation humaine Au lendemain de la seconde guerre mondiale, cet anti-américanisme viscéral franco-allemand se teinte en outre d'une coloration anti-impérialiste. [...]
[...] D'autre part, les antimondialistes tentent d'éloigner leur anti-impérialisme de celui des islamistes. A propos des islamistes, Bensaïd parle d'« anti-impérialisme des imbéciles parodiant le mot célèbre du socialiste allemand August Bebel (1840- 1913), qui qualifiait de socialisme des imbéciles l'antisémitisme dans le mouvement ouvrier. Assez significative pour avoir été reprise par le Wall Street Journal, la réaction d'Alexis Mital[14], coréalisateur avec Richard Puech et David André d'une série de documentaires consacrés à la mondialisation sur Canal + mérite d'être citée. [...]
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