Le 27 octobre 1962 fut le jour « le plus dangereux de l'histoire de l'humanité » dit à l'époque un conseiller de John Fitzgerald Kennedy. En effet ce jour-là le monde est passé très près d'une troisième guerre mondiale, thermonucléaire cette fois; ce fut le point culminant de la crise des missiles de Cuba, mais aussi de la Guerre froide. Celle-ci débute peu après la fin de la Seconde Guerre mondiale en 1947 et s'achève en 1991 avec l'éclatement de l'Union soviétique et la chute du bloc communiste. Dans République impériale, Les États-Unis dans le monde, Raymond Aron qualifie la Guerre froide de « Guerre improbable, pas impossible » et en donne plusieurs caractéristiques : il s'agit tout d'abord d'une opposition entre deux modèles idéologiques antagonistes qui cherchent à imposer leur doctrine politique et économique au monde en ralliant des pays tiers. On a d'un côté le bloc américain à l'idéologie capitaliste-libérale et le bloc soviétique à l'idéologie marxiste-léniniste. Une grande particularité de la Guerre froide est que ces deux Grands ne s'affrontent jamais directement, en effet dès 1949, les États-Unis et l'URSS disposent tous deux de l'arme nucléaire ce qui crée un équilibre de la terreur. Toutes les crises de la Guerre froide passent donc par l'intermédiaire de pays tiers comme l'Allemagne avec les crises de Berlin en 1948 et 1961, la guerre de Corée de 1950 à 1953 ou encore la crise de Suez en 1956. Ces conflits ne se déroulent jamais sur le territoire des deux superpuissances, mais toujours à la périphérie, le monde est alors un gigantesque échiquier sur lequel chacun des deux Grands tente d'avancer ses pions. Tout le système de la Guerre froide est alors fondé sur la dissuasion nucléaire : l'armement nucléaire dont chaque pays dispose dissuade l'autre d'attaquer sans quoi les répercussions pourraient être dramatiques pour les deux belligérants. Cependant en octobre 1962 à Cuba, le monde ne semble jamais être passé aussi près de l'holocauste nucléaire après la découverte de l'installation de missiles soviétiques à moyenne portée sur l'île dirigée par Fidel Castro.
[...] La crise de Cuba était donc une crise de plus entre les deux grands biens qu'elle fut la plus dangereuse. L'installation de missiles soviétiques à Cuba avait clairement pour but de déstabiliser l'ordre international et de prendre l'ascendant sur les Etats- Unis, la dimension psychologique est donc très fort dans cette crise. L'île n'était donc pas l'enjeu essentiel de la crise, on peut le voir par la sortie de la crise qui a été gérée par les deux Grands sans Cuba. [...]
[...] Par ailleurs, un mythe a été détruit : celui de la victoire spectaculaire de Kennedy. En effet, la résolution de la crise de Cuba était alors perçue comme un retrait des missiles nucléaires de Cuba par Khrouchtchev qui avait été contraint par Kennedy qui le menaçait d'une intervention par la force. En réalité, les deux chefs ont conclu un accord, que nous analyserons dans la dernière partie, ce qui nous montre que l'équilibre des deux s'applique toujours après la crise et qu'il ne balance pas en faveur des Américains. [...]
[...] Pour conclure, nous avons vu que la crise de Cuba a de multiples facteurs à la fois profonds et historiques, mais aussi plus contingents et idéologiques. Elle constitue bien le paroxysme de la guerre froide puisque le risque nucléaire n'a jamais été aussi fort et c'est l'équilibre stratégique entre les deux Grands fondé sur la dissuasion nucléaire qui a permis de sortir de la crise avec le retrait des missiles soviétiques de l'île. Néanmoins, cette crise présente des traits originaux par rapport aux autres crises de la Guerre froide ainsi pour la première fois un affrontement direct se produit dans la sphère d'influence américaine et c'est bien le dialogue et les compromis entre les diplomaties soviétiques et américaines durant cette semaine d'octobre 1962 qui ont permis d'éviter un drame nucléaire. [...]
[...] Pour l'URSS, Cuba est la preuve que la révolution socialiste peut résister à l'impérialisme américain, du côté des Etats- Unis, Cuba doit demeurer dans leur sphère d'influence (chasse gardée) c'est pourquoi l'île va cristalliser les oppositions entre les deux Grands et constituer un terrain d'affrontement idéologique idéal. La crise de Cuba, un prolongement de la crise de Berlin? La crise de Cuba peut aussi trouver ses origines dans une autre crise de la guerre froide: la crise de Berlin de 1958 à 1961, Cuba peut en effet être vue comme une revanche sur Berlin pour les Soviétiques. Sur le continent européen, la ville de Berlin est un enjeu majeur pour les deux Grands depuis 1958. [...]
[...] La construction du mythe de la victoire de Kennedy La crise de Cuba fait deux vainqueurs: Kennedy, qui a su montrer sa fermeté et obtenir le départ des missiles; Castro, qui a sauvé sa tête, son régime, son île. Mais elle laisse une victime sur le carreau: Nikita Khrouchtchev, et avec lui sa théorie du tout- nucléaire. Désormais, Castro s'émancipe de la tutelle soviétique et tente de jouer sa propre partition dans les affaires communistes mondiales. Guevara atteint alors son bref apogée politique. Cependant, c'est lorsque l'on tente de dépasser la simple narration des faits qui se sont succédé pendant ces treize jours d'octobre 1962 que les difficultés apparaissent. Si certains avaient tendance à placer John F. [...]
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