Pour définir un paradigme, l'on commencera par la définition la plus simple et la plus claire, qui est celle de Marie-Claude Smouts (dans "Le dictionnaire des Relations Internationales"). Pour elle, un paradigme est un ensemble de « principes généraux à partir desquels travaillent les spécialistes ». Ainsi, un paradigme se rapproche d'une certaine idée, conception générale. En ce sens, un paradigme ressemblera à un concept, voire à une théorie. Dans la discipline des relations internationales, nous sommes confrontés à deux paradigmes dominants : le paradigme réaliste et le paradigme idéaliste. Cependant il convient de mentionner le paradigme constructiviste, qui pour Batistella et Smouts, pourrait s'apparenter à un troisième paradigme dominant en relations internationales.
Lorsque Bertrand Badie évoque les paradigmes, c'est pour nous dire qu'ils ne « s'entretuent pas » mais qu' « ils s'enrichissent ». Cette proposition est-elle justifiée ? En effet, à première vue, en relations internationales, les paradigmes semblent s'opposer et non s'enlacer. Dans quelle mesure, pourraient-ils alors s'enrichir, et pourquoi ?
La citation de Badie possède un caractère assez épique et provocateur avec le terme « entretuer », cela nous amène donc à étudier dans une première partie la guerre des paradigmes, position que nous nuancerons dans une seconde partie pour montrer qu'il existe bien des influences réciproques en Relations Internationales, et ce, en vue d'un certain progrès de compréhension et d'affirmation de la discipline.
[...] Enfin, le dernier oppose toute une série de paradigmes mineurs : positivistes avec Auguste Comte, postpositivistes avec Habermas, constructivistes avec Finnemore et Wendt., et postmodernistes. Le mot débat, lui aussi, renvoie à une dimension épique et par là même il renvoie à la tuerie niée par Badie. Certes, le mot entretuer semble un peu trop fort, mais l'idée y est tout de même. Il convient de remarquer que le débat est souvent plus intense au sein même d'un paradigme paradoxalement, et non pas, entre les paradigmes dominants. [...]
[...] Étayons désormais le constat des influences entre les paradigmes pour voir en quoi les paradigmes ne s'entretuent pas toujours mais parfois s'entrelacent. Au sujet de la guerre en Irak, l'on a remarqué des positions paradoxales : Mearsheimer, réaliste, était contre la guerre e n Irak, pour lui, c'était contre les intérêts des Etats-Unis. Cela peut paraître incohérent pour un réaliste, car d'habitude la guerre était plutôt leur allié. Rappelons Hobbes ; l'état de nature est la guerre de tous contre tous et c'est un état de guerre permanent. [...]
[...] Et l'enjeu est important pour cette discipline puisqu'il s'agit de mieux la cerner pour mieux agir en conséquent sur la scène international et mieux dominer cette sphère caractérisée par Marie Claude Smouts comme complexe et fragmentée Lorsque Bertrand Badie dit que les paradigmes ne s'entretuent pas, ils s'enrichissent la première partie de l'argument semble contestable. En effet, souvent les paradigmes, dominants et les sous- paradigmes de la même famille existent en opposition entre eux, et par la même peuvent s'entretuer lorsque l'un tend à effacer les valeurs et l'essence même de l'autre. Et si les paradigmes peuvent s'entretuer, ils peuvent aussi s'enlacer, donnant naissance à de nouveaux paradigmes. [...]
[...] Ainsi, les paradigmes ne sont pas en lutte perpétuelle mais parfois puisent les uns dans les autres pour davantage progresser. Il s'agit de regarder derrière pour ne pas effectuer les mêmes erreurs et pour davantage comprendre au mieux les forces et interactions qui animent la scène internationale. La théorie peut devenir performative. Il s'agit désormais d'aborder un champ plus moral et éthique. Le but des paradigmes ne devient plus celui de s'entretuer mais de s'entrecroiser, de se redéfinir pour s'enrichir. [...]
[...] Dans les consciences, c'est le premier qui semble plus connu et plus popularisé En effet, lorsqu'on parle de réalisme, on pense aussitôt à des auteurs tels que Hobbes ou Machiavel, qui sont pour le coup des réalistes offensifs. La position post- réaliste semblerait même faire perdre son essence au paradigme réaliste dans le sens où elle oublie le principe majeur de recherche de puissance. Ainsi les racines du réalisme semblent comme tuées par l'apparition de ce sous-paradigme. Cela revient à dire que les paradigmes peuvent s'entretuer et cela suppose une bataille mutuelle entre deux paradigmes, une résistance de la part du paradigme qui tend à être remplacé par un autre. [...]
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