L'ingérence au sens commun, signifie intervenir, sans y être invité, dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État. Quant au droit d'ingérence et au devoir d'ingérence, l'un désigne la reconnaissance du droit des États de violer la souveraineté nationale d'un autre État, en cas de violation massive des droits de la personne, l'autre est conçu comme plus contraignant.
Il désigne l'obligation morale faite à un État de fournir son assistance en cas d'urgence humanitaire. Simplement en définissant les termes, on voit apparaître quels sont les points cruciaux et qui focalisent la polémique. L'émergence du concept d'ingérence n'est pas récente. En effet dans De Jure Belli ac Pacis (1625), déjà, Hugo Grotius avait évoqué un “droit accordé à la société humaine” pour intervenir dans le cas où un tyran “ferait subir à ses sujets un traitement que nul n'est autorisé à faire”.
Dans notre réalité contemporaine, l'idée d'ingérence humanitaire a été ranimée au cours de la guerre du Biafra (1967-1970) pour dénoncer l'immobilité des chefs d'États et de gouvernement face à la terrible famine que le conflit avait déclenchée, au nom de la non-ingérence. C'est sur cette idée que se sont créées plusieurs ONG, dont Médecins sans frontières, qui défendent l'idée qu'une violation massive des droits de la personne doit conduire à la remise en cause de la souveraineté des États et permettre l'intervention d'acteurs extérieurs, humanitaires notamment. La diffusion du concept est l'œuvre de Mario Bettati et de Bernard Kouchner.
[...] En effet, cela permet de résoudre de nombreux points de controverse autour de la notion de droit d'ingérence. En effet, tout d'abord, les ingérants seraient des Etats proches des Etats ingérés, ce qui diminuerait la sensation d'ingérence impérialiste. Par ailleurs, la décision de l'ingérence se ferait dans un cadre beaucoup plus démocratique que celui des Nations Unies, qui, nous le savons tous, souffrent d'un déficit démocratique au niveau du conseil de sécurité. [...]
[...] Par conséquent, l'ONU ne peut intervenir si un Etat est récalcitrant à toute aide, au détriment des populations. C'est pourquoi le droit d'ingérence est si important et polémique. En effet, il représente le meilleur outil pour l'aide humanitaire, mais il est aussi en contradiction avec les principes fondamentaux des Etats, à savoir la non-ingérence et la souveraineté. Cependant, le principe de droit d'assistance comporte de nombreux avantages qui vont dans le sens du droit d'ingérence tout en étant acceptables par les parties qui rejettent le droit d'ingérence. [...]
[...] Le droit d'ingérence aujourd'hui - constat et proposition Alors que sous nos yeux se jouent la tragédie Birmane ou encore les massacres au Darfour, la question du droit ou d'un devoir d'ingérence se fait grandissante. Elle est au cœur des débats autour de la réforme de l'Organisation des Nations Unies. De nombreuses voix s'élèvent pour affirmer la nécessité d'établir un véritable droit à l'ingérence humanitaire. Car même si le concept est souvent évoqué il n'est pas encore intégré au droit international. [...]
[...] Ce débat sur les motifs de l'ingérence humanitaire s'est rouvert suite à l'intervention américaine en Irak en 2003. En outre, même si le droit d'ingérence connaît un fondement implicite à travers les différentes opérations internationales mises en œuvre et des résolutions de l'ONU, le consensus reste ancré dans la promotion de la souveraineté des Etats. Le concept de droit d'ingérence reste flou quant aux acteurs auxquels il s'applique (États, organisations humanitaires, organisations de sécurité collective). C'est pourquoi les juristes font plus volontiers référence au droit d'assistance humanitaire qui tente de résoudre la tension entre l'assistance humanitaire et les principes de non-ingérence. [...]
[...] Cependant d'autres solutions peuvent être envisagées pour promouvoir cette idée qui apparaît être cruciale en ce moment. La première proposition consiste à mettre en avant le droit d'assistance plutôt que le droit d'ingérence, qui en lui-même est controversée. Au contraire, le droit d'assistance connaît un certain consensus de la part de la communauté internationale. En effet, il respecte le principe de la souveraineté car le pays qui doit subir l'ingérence doit être d'accord. En outre, il permet de donner une aide rapide et efficace pour les populations. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture